"L’esprit Caréco demeure plus important que le développement intensif du réseau"
JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Pouvez-vous nous repréciser brièvement votre parcours ?
JEAN-PIERRE LABONNE. J’ai passé vingt-neuf années au sein du groupe Derichebourg, jusqu’en 2006. J’ai exploité une quinzaine de broyeurs, et j’ai fini directeur général adjoint pour la région Sud-Ouest. C’est à ce moment que je suis devenu consultant pour Caréco, qui avait de larges projets sur la valorisation des matières. Enfin, j’ai pris la direction générale de Caréco en juillet dernier.
JA. Depuis deux ans, Caréco perd de gros et historiques adhérents (GPA 26, Allo Casse Auto…), à quoi imputez-vous cette fuite des cerveaux ?
J-PL. On ne peut être satisfait de perdre des partenaires de cette ampleur. Mais chez Caréco, nous sommes plus attachés à l’état d’esprit qu’au développement intensif du réseau. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous ne sommes “que” 80 adhérents, sur 1 600 démolisseurs en France.
Cela peut expliquer le départ des deux entreprises que vous évoquez. Peut-être qu’avec le temps et leur croissance, ils sont devenus si gros qu’ils ont un peu perdu l’esprit Caréco. Pour résumer, s’ils ont choisi de partir, c’est qu’ils ne trouvaient plus leur compte chez Caréco et, de notre côté, nous n’avons pas cherché à les retenir…
JA. Où en êtes-vous du développement de votre outil informatique ?
J-PL. Au départ, nous avons racheté le système élaboré par François Logeay, propriétaire de Genève Occasions, à Niort. Nous lui avons ajouté de nombreuses fonctionnalités grâce à un service informatique de six personnes, et l’avons appelé “Galaxie Pièces”. Son déploiement à grande échelle est maintenant lié à celui de Global PRE, un outil informatique permettant d’établir, à partir d’une nomenclature universelle propre au métier de recycleur, une correspondance entre une pièce de réemploi et une pièce neuve (constructeur ou équipementier). A ce jour, 60 adhérents Caréco ont abondé au capital de Global PRE, ce qui montre combien le sujet est stratégique. Cette référence unique est le seul moyen d’interfacer les stocks de tous nos démolisseurs partenaires. Néanmoins, le projet a pris du retard. Nous l’espérons opérationnel pour mi-2013.
JA. A quand un site marchand ?
J-PL. Nous avons fait 90 % du travail. Notre site e-commerce est quasi opérationnel et ouvrira vraisemblablement en 2013. Il regroupe l’ensemble des stocks de nos adhérents Caréco, avec des photos précises des pièces concernées, et non des images génériques ! C’est très fastidieux pour un démolisseur, qui doit reprendre l’ensemble de son stock pour répertorier les composants à vendre.
JA. Comment faites-vous pour fédérer tous vos adhérents autour d’un tarif unique ?
J-PL. Les partenaires Caréco ont effectivement déjà donné leur accord sur une base tarifaire déterminée ici, au siège, sur la référence du prix du neuf. Le site affichera donc bien un prix unique pour les pièces, et toutes les ventes passeront par ce site. Les adhérents n’auront pas à gérer la partie commerciale. Un internaute achètera une pièce qui vient de Marseille, mais il la paiera à la centrale Caréco, qui se chargera de payer le démolisseur, moins une commission. En gros, ceux qui vendaient peut-être plus cher que le tarif déterminé espèrent des volumes supplémentaires grâce à la vente en ligne. Et je souligne que les sites de vente personnels des démolisseurs pourront tout à fait continuer de cohabiter avec notre site central, avec une politique tarifaire propre.
JA. Depuis que les assureurs ont le droit de chiffrer les réparations de sinistres avec des pièces de réemploi, constatez-vous un réel engouement de leur part pour ce fonctionnement ?
J-PL. La Macif et la Maif ont lancé des tests en région niortaise depuis deux ans. C’est opérationnel, mais nous voudrions maintenant que cela se duplique dans d’autres régions. Quoi qu’il en soit, qu’il s’agisse des experts ou des réparateurs, les essais menés ont été fructueux, et les craintes sont levées quant à la qualité des pièces notamment.
JA. Avec, ces dernières années, le développement d’Indra, qui appartient en partie à Renault, est-ce plus difficile de s’approvisionner en véhicules de cette marque ?
J-PL. Il est clair que, désormais, quasiment aucune Renault en fin de vie issue du réseau constructeur n’arrive dans un centre Caréco…
JA. Pouvez-vous nous parler de votre initiative pour le montage des pièces ?
J-PL. Nous avons monté un réseau de montage fédérant des ateliers professionnels, qui s’engagent à monter des pièces de réemploi achetées chez Caréco. Il s’agit des “points service remonte”, qui sont à ce jour pas moins de 50.
JA. Pouvez-vous détailler votre projet d’atelier 99 ?
J-PL. Nous avions présenté ce projet à l’Ademe il y a deux ans, avec l’objectif de créer un atelier de désassemblage capable d’aboutir à un taux de recyclage et valorisation de l’ordre de 99 %. Malheureusement, la crise économique a freiné plusieurs démolisseurs intéressés, mais nous constatons qu’aujourd’hui, les demandes reviennent, notamment sur Albi et Bordeaux.
Il s’agit d’un atelier supplémentaire, dans lequel les voitures transitent après le process normal de démontage des composants les plus intéressants destinés à la revente au comptoir ou sur Internet. Dans cet atelier, nous désassemblons encore un maximum de choses pour la valorisation ou le recyclage, afin de remettre au broyeur un élément qui se rapproche le plus de la simple carcasse métallique. L’investissement se situe entre 700 000 et un million d’euros.
JA. Etes-vous parvenus à signer des accords-cadres avec les constructeurs, pour devenir leurs centres VHU agréés ?
J-PL. Non, nous n’avons pas d’accords-cadres. Au coup par coup, certains démolisseurs Caréco sont centres VHU pour diverses marques, mais c’est assez complexe car, de son côté, Renault traite avec sa filiale Indra, qui enlève les voitures dans ses concessions. Chez PSA, c’est Derichebourg et Gallo. Il nous reste donc les importateurs, avec qui nous cherchons un moyen de travailler. C’est le cas des Allemands, notamment VW, BMW et Mercedes, qui travaillent en direct avec les centres VHU de leur réseau.
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