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Les constructeurs commercialisent !

Publié le 16 mai 2012

Par Gredy Raffin
5 min de lecture
Pour le consommateur, les avantages de l’automobile connectée sont évidents et répondent à l’évolution des modes de vie et de consommation, commentent certains analystes. Cette tendance n’est plus à prendre sur le ton de la prospective car les constructeurs sont prêts à lancer des véhicules à forte diffusion. La liste des équipementiers et des partenaires pourrait s’en trouver modifiée.
On déflore à peine le sujet, mais il apparaît déjà comme une évidence que la voiture connectée n’est pas la seule affaire des constructeurs automobiles.

Un Américain âgé de 18 à 24 ans sur deux préfère se passer de voiture que d’Internet. Cette statistique édifiante, tirée d’une récente étude du cabinet Gartner, ne saurait laisser les constructeurs de marbre, car ce qui est vrai outre-Atlantique ne tardera pas à le devenir sur le Vieux Continent. Et de toute évidence, ils l’ont bien compris, à en croire la composition des stands du salon de Genève 2012. Avec plus ou moins d’avancées, les projets des constructeurs allaient tous dans le même sens, celui du service connecté. L’enjeu est de taille. Avec un potentiel commercial de plus de 6 milliards de dollars et des estimations qui portent à 90 % la part de voitures communicantes d’ici 2020, selon une étude de Machina Research, le marché de l’automobile connectée a de quoi concentrer toutes les attentions des constructeurs mondiaux. De quoi susciter aussi toutes les convoitises des sociétés tierces, dont les équipementiers, les fabricants d’accessoires électroniques ou encore les professionnels de l’informatique et des réseaux. N’est-ce pas Bouygues Telecom qui vient de signer un partenariat d’envergure internationale avec PSA (notamment Peugeot) ? N’est-ce pas encore Intel qui vient de créer un fonds de 100 millions de dollars (soit plus de 75 millions d’euros) dédié aux sociétés et projets qui accélèrent la connexion entre les véhicules et les appareils grand public ?

Les effets d’annonce se sont multipliés en deux ans, chacun y allant de son appellation. Cependant, le choix se résume à deux solutions. Soit on intègre une carte SIM à la voiture, avec l’inconvénient d’avoir à payer un abonnement supplémentaire, soit on utilise un smartphone, comme modem, avec toute la problématique technique sous-jacente. “En substance, ces deux modèles correspondent à deux visions, l’une européenne, l’autre américaine”, résume un observateur.

Il y a cependant fort à parier que l’utilisation du smartphone va s’imposer rapidement, car réunis sous une seule bannière, celle du Car Connectivity Consortium, nombreux sont les acteurs à miser sur ce modèle, dans une logique de standardisation des protocoles de communication, connue sous le nom de MirrorLink. Ils y voient, certes, la possibilité d’apporter du service utile en voiture, mais ils calculent surtout le revenu potentiel d’un tel schéma. Ils imaginent que, d’ici quelques années, les conducteurs consommeront des applications d’aide à la conduite, comme ils en consomment sur leur iPhone ou leur tablette, avec des revenus substantiels à la clé.

Stéphane Lagresle, directeur marketing de TomTom pour les GPS embarqués, s’interroge néanmoins sur le principe de dupliquer l’écran du smartphone sur l’écran tactile de la voiture : “L’approche est pertinente, mais la connexion du mobile par Bluetooth, pour utiliser des applications, limite les possibilités et le champ d’action. Pourquoi ne pas envisager le cloud computing ? Ainsi, la voiture s’inscrirait dans un écosystème dont feraient également partie tous les produits connectés du conducteur.”

La continuité de service, le facteur critique

Derrière ces problématiques demeure une autre question, autrement plus fédératrice : les réseaux de communication sont-ils prêts à supporter un essor d’une telle ampleur ou va-t-on au-devant d’un crash à grande échelle ? Ciena s’est penché sur l’équation. Equipementier du secteur des télécommunications et spécialiste dans le transport des informations, le groupe prépare d’ores et déjà le terrain, car “il est évident qu’il y aura un impact sur la constitution des réseaux”, relève Eric Sèle, vice-président et directeur général des branches Europe du Sud, Centrale, Moyen-Orient et Afrique. Les ingénieurs de Ciena se concentrent sur quatre axes, dont, en premier lieu, l’accroissement de la bande passante. “En quelques années, le trafic d’informations a été multiplié par 20 000”, rapporte Eric Sèle. Il faudra aussi parfaire et fiabiliser le maillage du réseau de communication afin de garantir une continuité de service, même en région reculée. En effet, une fois les services opérationnels, il ne sera pas acceptable qu’ils ne soient disponibles que dans les régions peuplées ou qu’ils subissent des ruptures. “Nous devons mettre en place des centres d’aiguillages afin d’assurer une continuité de service dans les millisecondes qui suivraient une interruption inopinée”, explique Eric Sèle. Ce dernier souligne, en marge de tous ces facteurs, l’aspect critique du temps de latence pour les services d’aide à la conduite et la confidentialité des données échangées.

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ZOOM - Les systèmes embarqués pèsent sur la note

“Pour couvrir la majorité des besoins, les véhicules se voient dotés de systèmes électroniques ou mécatroniques dans lesquels la part du logiciel embarqué croît d’année en année. A ce jour, selon le Rapport “briques génériques” du logiciel embarqué, daté d’octobre 2010, on estime que 41 % des innovations se concrétisent par du logiciel, dont une part de plus en plus importante sur des fonctions sécuritaires. Certains véhicules embarquent jusqu’à 50 microcontrôleurs et jusqu’à 100 millions de lignes de code (plus de 10 fois plus que dans un Boeing 787). Au total, environ 20 % du coût d’une automobile vient de la conception et de la réalisation des systèmes embarqués”, souligne Loïc Noury, de MathWorks, société d’ingénieurs experte dans la modélisation graphique des infrastructures et de tests de faisabilité, grâce notamment à son outil Simulink.

“Android va s’imposer”

Les voitures et leur système d’info-divertissement font l’objet d’une bataille souterraine entre les géants de l’informatique. Microsoft a ses entrées chez les constructeurs, mais la concurrence se fait de plus en plus rude et les éditeurs de systèmes propriétaires lorgnent sur le marché. “Il se pourrait que ce soit Linux qui sorte vainqueur de la lutte, car ce système d’exploitation est ouvert et répond donc aux attentes des constructeurs”, prophétise Cristina Segal. Directrice des solutions Android chez Wind River, elle voit la solution de Google, basée sur Linux justement, et aussi capable de proposer un écosystème d’applications, s’imposer dans le temps, aux dépens de Microsoft et Apple.

Reste à mettre au point une version purement automobile et à sécuriser les protocoles de communication afin d’éviter toute attaque extérieure malveillante.

 

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