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“Le low cost tire tout le métier du contrôle technique vers le bas”

Publié le 22 avril 2013

Par Frédéric Richard
6 min de lecture
Martine Houlière, présidente de Sécuritest - Toujours très prompte à s’exprimer sur le marché du contrôle technique et les dangers qui guettent ce secteur particulièrement concurrentiel, Martine Houlière nous livre son bilan de l’année écoulée, et revient sur les grands sujets qui l’ont occupée ces derniers mois.
Martine Houlière, présidente de Sécuritest.

Journal de l’Automobile. Comment se porte votre activité ?
MARTINE HOULIERE.
Les deux réseaux Sécuritest et Auto Sécurité ne présentent pas les mêmes tendances. Sécuritest a réalisé une belle année 2012, au regard du contexte du marché. N’oublions pas que le dernier trimestre a été catastrophique et a lourdement pesé sur le bilan global. Néanmoins, nous parvenons à maintenir nos parts de marché à 17,79 %, ce qui représente une très légère progression de 0,15 %.

JA. Comment êtes-vous parvenus à ce résultat ?
MH.
Je suis convaincue que ces bons résultats viennent du dynamisme de nos affiliés. Par exemple, quand nous avons lancé et proposé la prise de rendez-vous en ligne, ils n’ont pas tergiversé et se sont facilement lancés. Par ailleurs, du fait que nous étions les premiers sur le sujet, nous avons aussi gardé une certaine avance.

JA. Comment vos affiliés ont-ils géré la baisse d’activité de la fin d’année ?
MH.
J’avais mis en garde contre cette possible chute, mais beaucoup se sont fait piéger. Ainsi, on a malheureusement pu constater çà et là quelques défaillances dans plusieurs centres, aboutissant à des licenciements de contrôleurs, par manque d’activité. Il n’y a pas de secret, la croissance du nombre de centres étant supérieure à celle du volume global de contrôles, cette situation est inévitable.

JA. Constatez-vous une concentration de vos affiliés ?
MH.
Les opérateurs multisites ont toujours existé, ce n’est pas une tendance nouvelle. Je parlerais plutôt d’entrepreneurs qui défendent leur zone de chalandise. De plus en plus, ils saisissent l’opportunité d’ouvrir un centre supplémentaire, si tant est qu’une zone commerciale se développe autour de chez eux par exemple. Cela pour éviter qu’un concurrent ne s’y installe. Et je les y encourage, je le reconnais, si le potentiel de travail est d’au moins un contrôleur, donc en gros de 2 000 contrôles par an.

JA. Est-ce que l’inflation galopante du nombre de centres est terminée ?
MH.
Je pense que nous arrivons au point haut de la courbe. Les centres rattachés sont maintenant assez nombreux. Alors, quand un candidat se présente, nous pratiquons bien sûr des études de marché, mais également des études d’impact sur nos centres en place. Il ne s’agit pas d’ouvrir un centre pour en affaiblir un autre. Néanmoins, nous ne maîtrisons pas du tout ce que font les autres réseaux, et encore moins les indépendants !

JA. Comment éviter à vos affiliés de céder aux sirènes du low cost ?
MH.
Nous leur avons expliqué ce qui se cache derrière ces offres de CT low cost. Je fais un peu le parallèle avec des exploitants de centres qui ont fait des opérations avec Groupon. De la même manière qu’avec les offres de CT Easy ou CT Malin, il s’agit de casser les prix avec des tarifs de - 20 ou - 40 %. Et ce, avec un principe simple : tous les créneaux horaires sont remisés. Mais celui qui signe pour ce genre d’offre, étant forcé de baisser ses prix, va, certes, attirer du monde, mais ne sera pas rentable au final. D’autant plus qu’il y a fort à parier que les autres centres, autour, se sentant acculés devant une telle perte de business, se mettent à faire de même. A terme, c’est tout le métier que l’on tire vers le bas, avec les problèmes de rentabilité que cela sous-entend.

JA. Pourquoi les réseaux ne proposent-ils pas eux-mêmes ce type de formule ?
MH.
Nous allons le faire, dans quelques mois ! Mais nous sommes en train de développer une formule selon laquelle nous proposerons à nos affiliés de commercialiser les créneaux à faible charge ou en urgence, avec un discount de 20 %. En aucun cas il ne s’agit d’ouvrir des créneaux pour le mois suivant à - 30 % !

JA. En tant que présidente du SCTV, quel est votre avis sur les réglementations européennes ?
MH.
Le SCTV (Syndicat du contrôle technique des véhicules) a été reçu à la DSCR fin janvier, et j’ai fait part à Henri Prévost, adjoint de Frédéric Péchenard, délégué interministériel à la Sécurité routière, et Daniel Kopaczewski, sous-directeur de la sécurité et des émissions des véhicules à la DGEC, de mon inquiétude face à ce marché dont l’évolution est quasiment nulle, avec un nombre de centres en hausse, des pouvoirs publics qui hésitent à mettre en place des mesures pourtant susceptibles de faire remonter l’activité (CT annuel pour les véhicules anciens, CT des deux-roues…).

Parmi les pistes que nous avons évoquées à cette occasion, nous allons suggérer d’imposer une durée minimum pour réaliser les prestations de CT. Mais également l’élargissement du périmètre d’action des centres en autorisant la réalisation de prestations complémentaires. Sur ces deux points, Henri Prévost a demandé à notre syndicat de travailler avec notre administration de tutelle (la DGEC) et de préparer des recommandations.

JA. Pourquoi imposer une durée minimum ? Les compteurs d’exception ne relèvent-ils pas déjà ce type de dérive ?
MH.
Si l’on regarde la progression du taux de contre-visites sur les dernières années, on s’aperçoit qu’il baisse. Entre 2008 et 2012, le taux est passé de 22 % à moins de 21 %. Et dans le même temps, le nombre de défauts soumis à CV est passé de 67 à 72. Donc, je m’interroge. Aujourd’hui, avec la concurrence qui s’accroît, certains peuvent être tentés de réaliser des visites à la va-vite, donc de moindre qualité. Quant aux compteurs d’exception, ils suivent aujourd’hui seulement deux paramètres à ce sujet. Le premier si un contrôle complet prend moins de quinze minutes, et le second si l’opérateur réalise une visite de moins de vingt minutes sur un véhicule de plus de 10 ans. Ce que nous proposons est beaucoup plus pointu.

JA. Quel est votre avis sur les outils de comparaison de prix du CT qui viennent d’apparaître sur Internet, Simplauto en tête ?
MH.
Je trouve qu’il y a toujours intérêt à comparer, surtout dans un contexte de crise économique. Néanmoins, dans le cas du CT, les tarifs sont, certes, différents selon les régions, mais je vous invite à faire le test de ces outils sur une même ville. Les disparités sont en général assez faibles. La base qui apparaît sur le site n’est qu’une compilation de données issues des réseaux eux-mêmes. Les centres n’ont, pour l’heure, pas fait la démarche d’adhérer au concept. Car si un exploitant de centre décide d’aller plus loin et de proposer la prise de RDV en ligne via Simplauto, il doit s’abonner pour 49 euros par mois, et reverser 20 % de commission par rendez-vous pris sur le site. Je ne suis pas sûre qu’un exploitant soit aujourd’hui prêt à payer pour cette valeur ajoutée.

Ce mode de site comparatif fonctionne sur des zones où certains cassent les prix. Or, je rappelle que les concepts comme CT Easy ou CT Malin représentent une dizaine de centres en France sur 6 000 sites !

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