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Le casse-tête des recycleurs

Publié le 19 juin 2009

Par Sarah Motro
5 min de lecture
Le monde des recycleurs est en ébullition : prime à la casse, baisse du cours de la ferraille, dévaluation de la monnaie dans les pays d'exportation ont un impact non négligeable sur leur activité. Mais la pièce de réemploi favorisée...
Le monde des recycleurs est en ébullition : prime à la casse, baisse du cours de la ferraille, dévaluation de la monnaie dans les pays d'exportation ont un impact non négligeable sur leur activité. Mais la pièce de réemploi favorisée...
...par la procédure VE devrait leur offrir de belles perspectives.

Le succès de la prime à la casse ne profite pas vraiment aux professionnels du recyclage automobile. Si le surplus se chiffre à 150 000 véhicules (300 000 véhicules d'ici la fin de l'année selon le CNPA), il ne représente que 10 % du marché des véhicules en fin de vie. Il pose, bien sûr quelques problèmes d'encombrement : "J'ai un adhérent qui traitait une centaine de véhicules par jour avant la mise en place de la prime, indique Bertrand de Lavilléon, directeur général délégué de Caréco, aujourd'hui il en reçoit 300 par jour comment peut-il y faire face ?" Mais ces soucis ne concernent en fait qu'une minorité : 300 centres de recyclage seulement sur les 1 400 entreprises agréées en France. Pourquoi ? La plupart d'entre elles refusent de passer par les gestionnaires distributeurs "imposés" par les constructeurs aux concessionnaires. Ces acteurs feraient payer des frais de gestion très importants, 35 euros pour un véhicule qui en vaut 30, aux recycleurs. "De nombreuses entreprises de recyclage d'automobiles sont capables de gérer le surplus généré par la prime à la casse, commente Patrick Poincelet, président des recycleurs au CNPA, mais à condition que les concessions traitent en direct avec elles. Nous montons le ton lorsque nous entendons parler d'engorgement, les entreprises qui acceptent de payer les véhicules au prix fort sont souvent peu structurées".

Eviter les gestionnaires-distributeurs

La branche des recycleurs a alerté celle des concessionnaires pour les informer des dysfonctionnements résultant de ce type de pratique : "Le passage par les gestionnaires-distributeurs se pose surtout avec les réseaux des marques françaises, nous n'avons pas ce souci avec les constructeurs étrangers", indique Patrick Poincelet. "Les constructeurs français ne veulent pas que les pièces reviennent dans le circuit, ils imposent donc à leur distributeur de passer par des intermédiaires", ajoute Bertrand de Lavilléon qui vient de lancer une plaquette d'information à l'attention de ses 40 adhérents. L'objectif : amener ces centres de recyclage à démarcher les concessions avoisinantes et leur conseiller d'amener les véhicules concernés par la prime à la casse directement chez eux.

"La profession a été capable de gérer les Juppette et Balladurette (mesures d'incitation mises en place respectivement en 1994 et 1996, NDLR), qui représentaient 600 000 véhicules, là les quantités sont divisées par deux", intervient Patrick Poincelet.

Finalement, pour le président des recycleurs au CNPA, la prime n'aurait pas dû être mise en place : "Elle déstabilise tout le marché, nous avons une année pleine puis un grand trou, ce n'est pas bon pour la profession. La prime est là pour compenser la mauvaise gestion des constructeurs", juge-
t-il. Selon lui, la prime a encouragé les automobilistes à abandonner des véhicules encore en bon état dans les centres de recyclage. "C'est un gâchis sur le plan environnemental, ajoute-t-il. Avec l'encombrement, les centres de recyclage n'ont pas le temps de faire de la revalorisation, le broyage est favorisé. Et quand on détruit, on produit des émissions de CO2 !".

Nouveau marché

Au-delà de la prime à la casse, les recycleurs d'automobiles doivent faire face ces derniers mois à plusieurs difficultés. A commencer par la baisse du coût des matières premières : "Nous avons vu le prix de la ferraille chuter brusquement passant de 280 euros à 20 euros la tonne." Une baisse qui a eu un impact direct sur la rentabilité des ventes des démolisseurs. Ils auraient perdu, selon le CNPA, 60 % en moyenne sur leur chiffre d'affaires par rapport à l'année dernière. Deuxième frein sur l'activité des centres de recyclage : la dévaluation de la monnaie de 40 % selon Patrick Poincelet, dans les pays hors de la zone euro comme la Pologne ou la République Tchèque. Le négoce des véhicules accidentés pour la réparation vers l'exportation en a été fortement affecté : il enregistre une perte de 50 % en moyenne pour les recycleurs sur le territoire national. Dernier coup dur pour la branche : la modification de la taxe payée par les clients à l'importation dans les pays étrangers. Désormais, cette taxe est calculée sur la valeur initiale du véhicule et non plus sur celle facturée après accident. Le CA sur ce marché serait en baisse de 60 % en France. "Mais la profession peut aujourd'hui compter sur le marché des pièces de réemploi", indique Patrick Poincelet. En effet, depuis le 1er juin, la procédure VE autorise l'utilisation de ces pièces dans les réparations pour en réduire les coûts. Le nombre de véhicules économiquement réparables va donc augmenter au profit des centres de recyclage. Actuellement, les recycleurs d'automobiles représentent 5 % sur le marché de la pièce de rechange en France : "S'il y a un réel développement des pièces de réemploi, les recycleurs pourraient doubler leur chiffre d'affaires sur le secteur", annonce Patrick Poincelet.

FOCUS

Chère prime…

Le ministère de l'Industrie a affirmé que le coût de la prime à la casse serait supérieur aux 220 millions d'euros prévus initialement. Le dispositif pourrait être prolongé de quelques mois pour éviter aux professionnels de l'automobile un "trou d'air"début 2010.

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