La crise ? Une affaire de prix avant tout
Si c'est trop cher, on n'achète pas…
Le marché, en ce moment, c'est un peu la cour des miracles. On y voit des paralytiques qui se mettent à bondir, guéris qu'ils sont grâce aux mesures de soutien à l'automobile. C'est déjà vrai en France ; ça l'est à la puissance dix en Allemagne, où les primes à la casse, nettement plus élevées qu'ailleurs, ont provoqué un véritable record de ventes. Ce sont surtout les voitures des segments d'entrée qui en ont profité. Voici un premier décryptage, à vérifier sur la durée : d'abord, "si c'est trop cher, on n'achète pas". Ensuite : "on achète beaucoup pendant les soldes". Enfin : "Ce qui continue à être trop cher pendant les soldes n'intéresse personne sauf les gogos, espèce en voie d'extinction par temps de crise". Où est, dans tout ça, le "juste prix" qui nous est, c'est le cas de le dire, si cher ? Il est sans doute, pour les voitures bas de gamme, sur le Rhin, quelque part entre Strasbourg et Kehl. Pour les modèles encore beaucoup trop chers, notamment les SUV et autres crossover, le "juste prix" est on ne sait où. Quoi qu'il en soit, il va falloir baisser les prix de 15 à 25 % (c'est notre estimation), c'est-à-dire faire en sorte que les soldes durent toute l'année, si on veut que la demande reprenne ses couleurs, et il va falloir entrer dans une logique de baisse continue, répétitive des prix, si on veut éviter que d'autres crises soient, pour l'automobile, aussi catastrophiques que l'actuelle.
Ford, Henry. Version 2009/2010 ?
Pour que l'automobile soit accessible au plus grand nombre, il faut que les prix auxquels on la propose soient en ligne avec les ressources financières des consommateurs. Si on parvient à accomplir cette prouesse, on sauvegardera par la même occasion l'emploi dans l'industrie automobile… Ce n'est pas exactement du Fordisme "vintage", mais ça y ressemble pas mal. En fait, Henry aurait sans doute su adapter au 21e siècle la révolution qu'il introduisit au début du précédent. Que ferait-il ? Il nous plaît d'imaginer qu'il chercherait le moyen de faire baisser encore, puis encore, puis encore, les prix des véhicules, donc leurs coûts, dans la droite ligne de sa pensée originale. Certes, il faudrait pour cela une nouvelle révolution dans la façon de penser l'automobile. Il faudrait agir non pas sur les coûts de la main-d'œuvre mais, par exemple, sur ceux des matériaux. Ceci supposerait qu'on cesse de considérer que la durée de vie d'une voiture doit être de vingt ans au bas mot : cette malédiction entraîne aujourd'hui au moins deux conséquences déplorables. D'une part, la nécessité d'utiliser des matériaux qui durent vingt ans, des sous ensembles qui fonctionnent pendant vingt ans, à un prix max. D'autre part, la persistance d'un marché de l'occasion hypertrophié, qui est un obstacle au développement de la demande de VN. Vingt ans, c'est trop, décidément. Mais… saura-t-on mettre en œuvre une réduction progressive de la durée de vie des véhicules, sur la base d'une réduction continue des coûts de leurs composants ? Vous avez dit "Recherche et développement" ?
Ernest Ferrari, consultant
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