Kia met du CRM dans ses affaires
En ces temps de questionnements sur la nécessité de mener des réformes de fond dans notre pays, Kia prend le taureau par les cornes et accomplit les siennes. Un vaste projet en ce sens couve depuis près d’un an maintenant. Il se veut, pour ainsi dire, l’œuvre d’un homme, Frédéric Jost. Arrivé en avril 2012 en remplacement de Lionel French-Keogh, parti chez Nissan, le directeur commercial de Kia France a effectué un tour de France au cours de l’été qui a suivi, afin de faire le bilan des activités et comprendre les secrets de fonctionnement de la marque. “Il s’est avéré que nous avions encore un système d’information digne d’un importateur et non d’une filiale”, a-t-il déploré. Pour preuve, certains éléments de terrain demeuraient ignorés ou impossibles à quantifier par la direction nationale. “Comment peut-on parler d’un réel pilotage de l’activité dans ces conditions ?”, interpelle le directeur commercial.
Entre les gros faiseurs et les garagistes les plus modestes, Kia compte un réseau hétérogène. L’ambition est d’apporter une solution de gestion de la relation client uniformisée aux plus de 200 points de vente du réseau. Ainsi, le constructeur et les distributeurs pourront suivre au mieux leurs performances, savoir, par exemple, à qui sont vendus les véhicules, quel est le montant des reprises, l’état des stocks VO, ou bien même retracer la vie de leurs clients… En accord avec les exigences de Kia Motors Europe et Kia Motors Corporation, la filiale française a donc étudié les solutions technologiques à sa disposition.
Le choix s’est rapidement porté sur V12 de Datafirst et ce, pour de nombreuses raisons. D’abord pour sa représentativité dans le réseau. Sans préconisation, eCars21, le DMS de Datafirst, équipe déjà 40 % des points de vente. Ensuite, “parce qu’il nous faut un partenaire qui connaît la méthodologie de travail d’une structure internationale”, explique Frédéric Jost. Enfin, tout simplement parce que V12 est aujourd’hui le produit le plus abouti. Les avertis ajouteront que Kia partage une partie de son réseau avec les marques Opel et Ford, cibles commerciales du Coréen et dont les distributeurs sont rompus à l’utilisation de V12.
Travail sur les hommes
Au terme d’un tour de France effectué en avril dernier pour accompagner le lancement officiel de V12, 50 % des distributeurs ont souscrit à l’offre de déploiement. Celle-ci étant facturée 1 900 euros par affaire, installation, paramétrage, connexion et accompagnement inclus. “Nous visons une pénétration de 80 % à courte échéance”, projette clairement Frédéric Jost. Autrement, il restera la solution maison, Trafic Showroom, fournie par le constructeur, mais qui se révèle pauvre en fonctionnalités, admet le directeur. Ce dernier souligne notamment l’impossibilité de planifier une tâche de rappel et l’obligation de ressaisir les informations au minimum quatre fois par client. “Il nous faut mieux outiller les vendeurs afin qu’ils soient plus en phase avec les exigences du marché, qu’ils soient capables d’accompagner le client sur son parcours d’achat”, explique-t-il. A titre d’exemple, l’expérience prouve que les utilisateurs de V12 recontactent 95 % des clients après livraison d’un véhicule, soit trois fois plus que les statistiques actuelles du réseau Kia, qui flirte avec les 30 %. La direction nationale espère ainsi accroître la fidélité de 40 %. Ce n’est pas rien.
Mais les outils ne font pas l’homme. A cette date, Kia recense 250 vendeurs exclusifs sur un total de 400 environ en mesure de signer des bons de commande, en France. Frédéric Jost va inviter les concessionnaires à augmenter cette population et à former chacun d’entre eux aux arcanes de la marque. Dans son approche philosophique, Kia se veut assez proche de Ford dans sa gestion des forces commerciales, voire d’Opel. “Nous structurons nos équipes pour fidéliser les clients”, confirme le directeur commercial.
Augmenter le taux de relance
Autre but de la manœuvre : exploiter davantage les opportunités créées par le monde digital. Sur les 13 000 leads exploitables générés par le site Internet de Kia, seuls 40 % ont été recontactés par les concessionnaires. Un grave manquement selon les dirigeants. Avec V12, le système ne reposera plus sur du déclaratif, mais sur des faits, et dès lors, les sanctions pourront être appliquées. “Même en s’y prenant mal, 12 à 15 % des demandes formulées par Internet doivent aboutir à une vente, estime Frédéric Jost. Désormais tout prospect non traité dans les délais sera refacturé 15 euros au distributeur concerné”, annonce-t-il.
Mais justement, qu’en est-il du délai préconisé ? A la rentrée de septembre, quand V12 sera largement implémenté dans les points de vente, Kia commencera à devenir plus strict. Les concessionnaires auront trois jours pour répondre. Eu égard à ce qui est imposé chez les autres marques concurrentes – Opel en tête –, on peut parler d’une gentille souplesse. Mais la sanction pourrait venir des consommateurs. Ces derniers tolèrent rarement d’attendre au-delà d’une poignée d’heures.
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FOCUS - Kia Occasions : la V2 en attente
A la rentrée prochaine, Kia devrait faire des annonces au sujet du label VO, dont la redéfinition est en cours. Avec l’aide de consultants de Dekra Automotive, des études et des tests cliniques ont été menés, et les résultats devraient prochainement être connus de Kia Europe. “Lancé en 2008, le label a besoin d’une nouvelle image, soutenue par une communication corporate”, confirme une porte-parole de la filiale française. L’Allemagne, la Belgique et l’Italie sont également concernées.
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FOCUS - Après-vente : Kia ajoute des tablettes
Au 1er juillet prochain, les tablettes tactiles feront leur apparition dans des ateliers du réseau Kia. 19 sites pilotes hétéroclites ont été retenus, aux abords des grandes agglomérations, sur la base de leurs résultats aux enquêtes de satisfaction. “Nous avons pris des bons et des moins bons, explique Hervé Charbit, chef du service Technique & Service de Kia Motors France, mais tous étaient volontaires et participeront à l’amélioration de la solution”. Kia Motors France se donne six mois pour la peaufiner et, en janvier 2014, les tablettes tactiles de réception active (des Samsung renforcées, N.D.L.R.) seront accessibles à tous les distributeurs. Hors négociations volumétriques, l’abonnement au service serait de 115 euros par mois et pour dix licences, fait savoir Hervé Charbit, et sera compatible avec les DM de Datafirst, Everlog, Eris Informatique et Fiducial. Ce projet de tablettes tactiles est à la fois une initiative conjointe de Kia France et Kia Motors Europe.
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QUESTIONS A... Kevin Ginisty, directeur HG Automobiles.
Journal de l’Automobile. Kia accélère la marche dans le domaine de la CRM, comment cela est-il perçu par les distributeurs ?
KEVIN GINISTY. La démarche est appréciée car nous passons tout simplement d’une gestion faite sur le papier à une gestion digitalisée, avec tout le gain de temps que cela permet. Nous sommes assez d’accord avec le message de constructeur, c’est-à-dire que, de toutes les évolutions à venir dans la marque, V12 est de loin la plus structurante. Après, il faut bien comprendre que cette “révolution” n’en est pas une en soi, car l’automobile reste un secteur globalement en retard dans le domaine de la gestion de la relation client.
JA. Chacun des opérateurs ayant sa stratégie propre, quelle marge de manœuvre vous reste-t-il ?
KG. Lorsque l’on est un grand groupe, il nous est possible de créer un process de travail multisite. On profite alors d’une visibilité sur les activités, qui redonne du pouvoir aux forces managériales. Personnellement, je ne crois plus au marketing automobile traditionnel, mais justement dans la gestion de la relation et l’effort de relance, qui ont un impact plus important sur la perception des clients.
JA. Sous quel délai espérez-vous amortir cet investissement ?
KG. V12 étant en modèle locatif, nous n’avons pas de logique ROI, d’autant plus que notre soumission aux fluctuations du marché rend difficile l’analyse de la performance de l’outil. Cela nous a pris à peu près un an pour l’implanter à 70 % et un an supplémentaire pour en assurer une utilisation pleine, mais il est difficile de quantifier son apport en termes de ventes. Je suppose qu’une partie de la population des concessionnaires, qui n’aime pas le changement, achète la solution par souci de respect des normes du constructeur, mais n’en utilise pas pleinement le potentiel.
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