"Il n’y a plus mille solutions, les marges, il faut aller les chercher sur les Achats"
JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Vous achevez actuellement votre Tour de France du président, en quoi consiste cette initiative et qu’en retirez-vous ?
Bernard Souza. Chaque année, nous réalisons ce que nous appelons le Tour de France du président dans le réseau. Il s’agit en fait d’une tournée de proximité, afin de rencontrer les adhérents selon le principe de la prise directe, dans un contexte différent d’une convention. Cette année, il était articulé autour de huit dates. C’est un moment que j’apprécie tout particulièrement, un moment fort. Nous échangeons sans protocole et sans détours avec les adhérents, en toute franchise. Nous ne prenons pas de gants et la langue de bois est proscrite ! Bref, nous gagnons beaucoup de temps en fait ! Et cette année, j’ai encore pu mesurer une implication authentique et très forte du réseau.
JA. L’année 2012 s’annonçait très difficile, mais plusieurs de vos confrères la jugent finalement moins délicate que prévu : quelle est votre lecture du marché ?
BS. Je suis tout de même très partagé par rapport à votre question. Au sein du réseau Axial, les accords commerciaux sont en progression, de l’ordre de 20 %. Certes… Mais le marché classique reste très tendu ! La sinistralité est bel et bien orientée à la baisse. Or, notre système repose sur les volumes… La pression est très forte sur les entreprises et on voit beaucoup d’affaires affaiblies sur le marché. Il faut arrêter de se résigner et de dire que ça aurait pu être pire. Nous sommes des chefs d’entreprises, on ne peut pas se contenter du “moins pire”.
JA. Même si le contexte général n’est guère favorable, les relations avec les donneurs d’ordre sont-elles plus fluides qu’il a quelque temps ?
BS. Non, il n’y a aucune détente significative sur ce front… D’ailleurs, les augmentations consenties en début d’année n’ont pas été fortes, parfois en dessous du seuil de l’inflation… En caricaturant un brin, on peut dire que quand les donneurs d’ordre sont polis, ils nous écoutent, pas plus…
JA. Pourtant, le réseau Axial apparaît très fort et très pérenne depuis quelques années, comment expliquez-vous cette assise ?
BS. C’est une vraie satisfaction dans la mesure où c’est le fruit d’un travail de longue haleine. D’une certaine manière, ça prouve que nous allons dans le bon sens, avec une intelligence collective au service d’un réseau coopérateur. Tous nos moyens sont mis au service du collectif et nous avons su résister à bien des tentations court-termistes. En outre, notre indépendance est précieuse, car elle nous offre notamment une vraie flexibilité. Les adhérents sont bien conscients de ces forces.
JA. Quels sont les axes d’amélioration que vous identifiez pour le réseau ?
BS. D’une manière générale, nous sommes déjà au taquet au niveau de la productivité, contrairement à ce que laissent entendre certains insensés. Au niveau des ventes, nous n’avons plus de marges à envisager, nous sommes déjà au ras des pâquerettes depuis un moment. Bref, les marges, il faut aller les gagner sur les Achats, c’est la seule solution. Et qui mieux qu’une centrale d’achats indépendante peut le faire ?
JA. Est-ce à dire que le développement d’Edra est désormais votre chantier prioritaire ?
BS. La structuration et le développement d’Edra sont effectivement prioritaires. Il s’agira d’augmenter le volume d’achats auprès de la centrale, afin d’obtenir ensuite de meilleures conditions commerciales. A notre échelle, nous devons nous inspirer de ce qu’ont réalisé les grands industriels. Cependant, nous avons aussi d’autres projets inscrits dans notre agenda. A l’automne, nous dévoilerons une offre globale focalisée sur les fournitures d’atelier, ainsi qu’une autre offre dont je ne peux rien dire de plus aujourd’hui, si ce n’est qu’il s’agit d’une problématique sensible. En outre, nous redéploierons une campagne de communication nationale. Cet effort, directement lié à la notoriété, doit s’inscrire dans le long terme, car vous êtes vite oubliés…
JA. Quand Bernard Lanne (PPG) affirme que les donneurs d’ordre sont les véritables clients des carrossiers, qu’est-ce que cela vous inspire ?
BS. Lorsque vous passez un accord avec un donneur d’ordres, c’est effectivement bien lui qui vous adresse ensuite le client. Où est le problème ? Qui dit agrément dit des volumes garantis, c’est donc dans le domaine du gagnant-gagnant. Surtout que l’intérêt de tous réside dans le bon traitement du client.
JA. Au niveau des accords-cadres, l’heure est-elle au développement ou à la consolidation ?
BS. Nous entrons davantage dans une période de consolidation de l’existant. Mais simultanément, à l’échelle régionale ou locale, nous cherchons à développer notre activité avec les moyens comptes.
JA. Naguère artisan, le carrossier contemporain est-il vraiment devenu un chef d’entreprise à part entière, un manager ?
BS. Dans le jeu des reprises familiales, beaucoup de jeunes arrivent désormais à la tête de carrosseries. C’est bon signe pour la profession. D’autant que ces jeunes sont souvent bien diplômés et portent une nouvelle approche du marché, notamment pour les outils informatiques et la relation clients. Notre profession est plutôt jeune en fait ; on peut dire qu’elle est apparue au début des années 60. Nous parvenons donc à la troisième génération de carrossiers et il y a un changement positif qui recèle un gros potentiel.
JA. Le tableau n’apparaît pas aussi rose pour le recrutement et la formation des jeunes au niveau de l’atelier, n’est-ce pas ?
BS. La situation est effectivement toujours plus délicate à ce niveau. D’une part, on propose souvent aux entreprises des jeunes en échec scolaire, alors qu’au vu de la complexité grandissante des véhicules, nous avons plus que jamais besoin de têtes bien faites et de jeunes ayant choisi leur voie. D’autre part, nous devons aussi rendre notre profession plus attractive. Sachant que notre spectre d’évolution de carrière est réduit, nous devons jouer sur les salaires et surtout sur la formation.
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