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Entretien : Thierry Hesse, commissaire général du Salon du Mondial de l'Automobile.

Publié le 23 mai 2008

Par Tanguy Merrien
10 min de lecture
Entre deux conférences de presse aux quatre coins du monde pour présenter la nouvelle édition du Mondial 2008, Thierry Hesse, commissaire général du Salon, a dressé en quelques points, pour le Journal de l'Automobile, le portrait d'une manifestation qui...
Entre deux conférences de presse aux quatre coins du monde pour présenter la nouvelle édition du Mondial 2008, Thierry Hesse, commissaire général du Salon, a dressé en quelques points, pour le Journal de l'Automobile, le portrait d'une manifestation qui...

...fête son 110e anniversaire.

"Nous n'aurons pas l'afflux, craint par certains, de constructeurs chinois"

Journal de l'Automobile. Comment se présente la nouvelle édition du Mondial ?
Thierry Hesse. Elle s'annonce excellente puisque nous allons, cette année, dépasser notre propre record de nouveautés avec plus de 70 premières mondiales. Cela s'explique en premier lieu par le dynamisme des constructeurs français. En effet, nous sommes en plein milieu du plan de Carlos Ghosn, annonciateur de beaucoup de nouveautés et nous sommes également en phase annoncée du plan de Christian Streiff, là aussi porteur de grandes premières chez PSA Peugeot-Citroën. Par ailleurs, de manière très confidentielle, les principaux constructeurs étrangers nous ont déjà annoncé le lancement de très nombreux nouveaux modèles à Paris. Et c'est un gage de succès parce que ce qui attire visiteurs et médias, ce sont les nouveautés et les concept-cars qui seront très bien représentés dans l'édition 2008.

JA. Relève-t-on de nouveaux arrivants ?
th. Pour la première fois, nous allons recevoir la marque Infiniti à côté de Nissan, et d'autres nouvelles marques. Par ailleurs, nous assistons au retour de Valeo qui, pour des raisons conjoncturelles, était absent en 2006. C'est une bonne nouvelle pour le Salon. Et puis, ne l'oublions pas, nous avons un nouveau président du comité d'organisation du Salon, Louis Schweitzer, qui entend bien que Paris reste le plus grand Salon du monde en termes de fréquentation, devant Tokyo.

JA. Pour être très prosaïque, où en est votre carnet de commande ?
th. Nous sommes en croissance en m2, et tous les grands constructeurs reviennent sans exception. Nous assistons plutôt au retour de marques qui n'étaient pas là ou à la venue de nouvelles marques. Nous n'aurons pas l'afflux, craint par certains, de constructeurs chinois, du moins pour le moment.

JA. Avez-vous eu quelques grosses surprises pour cette édition ?
th. Nous avons eu des modifications, des adaptations comme Aston Martin qui quitte l'environnement du groupe Ford ou encore des constructeurs comme Dacia, Kia ou Hyundai qui souhaitent de plus grands espaces compte tenu de la progression de leurs marques mais nous n'avons pas eu de surprises. Je suis seulement étonné du fait que les constructeurs chinois n'aient pas demandé à venir en masse, mais l'offre est tellement riche que c'est de l'ordre de l'épiphénomène.

JA. Comment intégrez-vous la mobilité durable ?
th. Je considère que nous ne pouvons pas avec des constructeurs français particulièrement en pointe sur le sujet que ce soit dans le domaine de l'électricité - on a vu le déplacement important de Carlos Ghosn en Israël - que ce soit dans celui du biocarburant - confer l'implication et les investissements forts de PSA dans ce domaine -, rester, en tant que Salon, à l'écart de ce grand mouvement. Donc, nous avons élargi et présentons tout ce qui se fait dans le domaine pile, électricité, biocarburant, moteurs hybrides, etc.

JA. Vous allez donc dédier un espace spécifique "vert" ?
th. Certainement et nous en reparlerons lorsque tout sera finalisé. Déjà, en dehors des constructeurs plus spécialisés en véhicules électriques, comme Bolloré avec Pininfarina, nous assistons aussi au retour de Matra qui revient au domaine de l'automobile en présentant des modèles électriques très innovants. Nous sentons qu'il y a un vrai mouvement, un vrai intérêt à la fois des grands constructeurs et des constructeurs plus modestes comme Heuliez ou Venturi de présenter des modèles très innovants écologiquement. Ce sera un point fort de l'édition 2008 du Salon.

JA. Avez-vous développé la présence des équipementiers ?
th. Les grands Salons internationaux de l'automobile professionnels et grands publics que sont Paris, Genève, Tokyo, Francfort ou Detroit subissent une diminution régulière de la présence des équipementiers. C'est un problème de fond qui n'est pas nouveau. Est-ce que c'est dû à la durée du Salon, à des choix stratégiques des grands équipementiers ? Toujours est-il qu'ils désertent les Salons "vitrines" pourtant de l'industrie automobile. Nous ne notons pas, cependant, de "compensation" vers les Salons exclusivement professionnels comme Equip'Auto ou Automechanika où se retrouvent tous les acteurs majeurs de l'équipement.

JA. Avez-vous réussi à résoudre la quadrature du cercle des constructeurs voulant être tous au même endroit, dans le hall 1 ? Et avec toutes leurs marques ?
th. Rappelons les origines : à mon arrivée il y a 19 ans, tous les constructeurs et les équipementiers étaient rassemblés dans le hall 1 ! Au fil des ans, Nous avons permis aux constructeurs français d'avoir les surfaces optimales qu'ils souhaitaient avoir et aux constructeurs étrangers qui se sentaient un peu brimés par le passé, d'avoir des volumes plus importants. Le phénomène que vous évoquez, c'est-à-dire, pour un constructeur, d'avoir toutes ses marques ensemble, est l'une des raisons qui nous ont poussés à utiliser d'autres halls pour les constructeurs. Nous avons commencé par le 3 puis le 4, qui ont permis à Volkswagen et à Toyota de bien s'installer, puis nous avons occupé le 5, dans lequel le groupe General Motors a pu aligner, lui aussi, toutes ses marques. Le moyen de résoudre le problème, c'est de répartir les groupes qui veulent présenter toutes leurs marques dans les différents halls et en fonction de leurs souhaits.

JA. Cependant, le hall 1 reste la star…
th. Historiquement, le hall 1 est celui des constructeurs. Pourtant, le fait de leur permettre d'aligner leurs marques nous conduit, pour Renault par exemple, à lui consacrer un espace plus important du fait de l'augmentation de la surface du stand Dacia et de l'arrivée d'Infiniti. Mais nous sommes à Paris et il est normal, logique de donner le nombre de m2 souhaité par les deux grands groupes nationaux. Cela veut dire qu'il faut faire des choix. Nous avons déjà de la chance d'avoir un hall 1 d'une surface de 50 000 m2.

JA. Vous évoquiez le retour de Valeo, dans le hall 1 ?
th. Nous avons un règlement dont bénéficie aujourd'hui Valeo, qui stipule qu'on place les gens à l'ancienneté. Et l'absence à deux éditions du Salon fait repasser l'ancienneté à zéro. Donc Valeo garde sa place.

JA. Comment vous situez-vous par rapport aux autres Salons ?
th. Nous avons une situation intermédiaire entre les deux autres grands Salons automobiles européens, entre Genève qui est beaucoup plus petit et qui est aussi un Salon assez convivial et Francfort qui est considéré par nombre de personnes comme beaucoup trop grand. Nous nous situons entre les deux sur le plan des surfaces d'exposition des constructeurs. Ceci étant, nous avons beaucoup plus de visiteurs que les deux Salons que nous venons d'évoquer. Francfort, par exemple, est en dessous du million.

JA. Sur un plan pratique, avez-vous maintenu les mêmes horaires ?
th. Pour le grand public, nous avons conservé les horaires et la durée décidée, il y a quelques années. Après les deux journées de presse, les 2 et 3 octobre, le Salon ouvrira au public du samedi 4 au dimanche 19 octobre, soit trois week-ends. En ouvrant sur trois week-ends, nous bénéficions d'une meilleure circulation dans le Salon, renforcée par ailleurs par l'élargissement des allées. Avec le hall 5, élargi cette année à des marques de prestige, nous allons nous retrouver dans une situation où le visiteur circulera mieux, verra mieux les modèles et aura un cadre de visite plus agréable. J'ajoute que les travaux du tramway étant terminés, il sera plus facile pour les visiteurs de se rendre sur le Salon. Et, point très important, les halls constructeurs seront rafraîchis pendant la durée du Salon, rendant la visite plus confortable.

JA. Les constructeurs ne vous reprochent-ils pas cet allongement de la durée qui est coûteuse en présence ?
th. Cela fait 8 ans que nous avons adopté cette durée et les constructeurs ont fait leur calcul. Est-ce qu'il faut faire un Salon plus court et avoir des visiteurs mécontents qui ne voient pas les modèles ? Le fait d'ajouter 5 jours et un week-end a permis d'avoir une visite normale et agréable du Salon. Cela a permis d'avoir plus de visiteurs, soit près d'1,5 million… Je pense que c'est l'intérêt de tout le monde même si c'est lourd pour les exposants comme pour les organisateurs ! Il est vrai que nous avons réduit les horaires et que nous fermons à 20 h au lieu de 22 h, les samedis, dimanches et lundis.

JA. Que sera la grande exposition ?
th. Nous avons choisi pour la désormais traditionnelle exposition spéciale, une grande manifestation autour des taxis du monde qui sera très colorée. En France, nous avons une tradition forte des taxis. Nous avons également des études effectuées par les constructeurs sur les taxis du futur. Et puis, nous comptons, avec le partenariat du secrétaire d'Etat au tourisme, présenter des taxis du bout du monde dans leur environnement "touristique". Cela devrait être très riche aussi bien au niveau des véhicules que sur le plan du tourisme.

JA. Comment se portent actuellement les Salons et leur visitorat ?
th. Il faut distinguer les Salons exclusivement professionnels et les Salons professionnels ouverts au public. D'une part, un Salon professionnel, en fonction des nouveautés présentées, et de la façon dont l'organisateur va chercher l'acheteur en France et à l'étranger, et fait venir au Salon, de l'autre, une grande machine dont l'objectif est de faire venir le maximum de visiteurs. L'automobile fait toujours rêver et c'est une grande chance. Les visiteurs d'un Salon automobile auront toujours envie de s'asseoir au volant, de sentir l'odeur du cuir, de toucher la carrosserie et cela ne se remplace pas.

JA. Cependant l'automobile est responsable de tous les maux, aujourd'hui ?
th. Dans la mesure où il y a un vrai débat qu'il ne faut pas cacher entre les passionnés de l'automobile, et ceux qui se posent des questions sur les motorisations, sur la puissance, sur la sécurité, sur les nouvelles énergies, il est inévitable d'en parler sur le Salon qui devient un lieu privilégié pour évoquer ces sujets. L'intérêt d'un Salon comme le Mondial de l'Automobile, en dehors de la passion et du rêve que provoque le produit, réside dans le fait que les gens viendront pour avoir des réponses aux grandes questions d'actualité. Au moment où il est question des bonus-malus, où nous assistons à une volonté d'une certaine réorganisation du monde de l'automobile, le Salon tombe à pic pour apporter des réponses. C'est pourquoi, nous avons également la présence, en tant qu'exposants, des acteurs concernés comme l'EDF, les sociétés d'assurance et de crédits, les sociétés d'autoroutes, les organismes chargés de la sécurité… Parallèlement, le nombre de sociétés qui facilitent l'usage de la voiture comme la navigation, la sécurité ou le confort continue à croître. Et le visiteur sait et connaît les Salons où il va pouvoir obtenir l'offre la plus vaste et la plus diversifiée.

JA. Une nouvelle présidence, qu'est-ce que cela change ?
th. C'est une tradition d'alterner la présidence d'un groupe à l'autre. Le nouveau président connaît très bien le Salon - Louis Schweitzer a été exposant pendant de nombreuses années -, il sait ce que le Salon peut apporter à l'industrie nationale et mondiale à la fois par sa grande connaissance de l'automobile et aussi par son recul et sa connaissance des grandes évolutions de la société. Le fait d'avoir plusieurs casquettes, président de la Halde, du conseil de surveillance du Monde, etc. cela donne d'autres éclairages, et c'est une chance pour le Salon.

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