Datafirst n’est pas à vendre
...Journal de l'Automobile. Tout d'abord, pouvez-vous nous présenter Datafirst en quelques mots ?
Robert Sguerzi. Datafirst conçoit et déploie des solutions de gestion globales pour la distribution automobile : distributeurs, groupements et constructeurs automobiles internationaux dont BMW, Citroën, Peugeot, FMC (Ford, Volvo, Jaguar, Land Rover, Mazda), et GM (Opel, Saab, Chevrolet, Vauxhall). Nous sommes basés à Lyon, notre effectif est de 130 personnes. Notre DMS eCARS21 répond aux attentes de la distribution automobile, pour chaque point de vente, dans les domaines du marketing, de la vente, des services et des pièces de rechange. Enfin, nous avons réalisé en 2006 un chiffre d'affaires de 12,4 millions d'euros.
JA. Quel est le positionnement de Datafirst sur le marché international ?
Notre originalité est d'être positionné, avec un produit unique, eCARS21, sur l'ensemble de l'Europe avec une forte présence en Europe Centrale et en Turquie. Nous avons acquis une culture pertinente et originale auprès des constructeurs avec qui nous travaillons. Nous sommes d'ailleurs certifiés auprès de 15 d'entre eux. Datafirst occupe, par exemple, au sein des réseaux de General Motors Europe, la première place en tant qu'éditeur, eCARS21 est utilisé par 30 % des distributeurs européens Opel utilisant un système certifié. Enfin, nous prenons progressivement une place importante dans les réseaux Renault, Nissan et Dacia grâce à des homologations récentes obtenues successivement en Roumanie, en Pologne et en Italie.
JA. Quelle est votre stratégie de développement ?
Nous avons assuré notre développement essentiellement par croissance interne grâce à des créations de filiales et des partenariats avec des distributeurs locaux. Ce réseau permet notamment de pratiquer des tarifs adaptés au marché local et de s'implanter durablement dans chaque pays. Enfin, nous maîtrisons totalement notre centre de développement, une force qui nous permet de nous déployer dans tous les pays, avec une méthodologie ad hoc et surtout une solution unique et multimarques.
JA. Vous avez également réalisé quelques acquisitions ?
En effet, nous sommes déjà homologués pour les marques Volvo Jaguar et Land Rover du groupe FMC. Mais nous souhaitions également pénétrer le marché Ford, sur lequel nous n'étions pas présents. Pour atteindre cet objectif, nous avons racheté début 2005, deux filiales européennes d'UCS, éditeur américain, UCS France et UCS Espagne. Le pragmatisme avant tout. Sur le marché espagnol, de nombreux clients, équipés de la solution UCS, ont souhaité migrer vers notre propre solution, eCARS21, qu'ils ont jugé plus moderne. Cette application est d'ailleurs aujourd'hui certifiée par Ford en Espagne, et nous serons certifiés par Ford Europe pour ce marché d'ici la fin de l'année, une fois les critères de pénétration d'eCARS21 sur ce marché atteint. Récemment, nous avons encore accentué notre présence chez FMC avec l'homologation italienne des marques Volvo, Jaguar et Land Rover.
JA. Comment définiriez-vous votre valeur ajoutée ?
Datafirst est un éditeur indépendant français, de dimension européenne, proposant une solution unique pour les distributeurs de toutes tailles et de toutes marques. Nous avons construit une méthodologie unique avec l'ensemble de nos partenaires, garantissant aux constructeurs un déploiement homogène de qualité et aux distributeurs le partage d'expérience de tous les pays. Et c'est là que nous marquons notre différence.
JA. Vous revendiquez votre statut d'indépendant français, mais pour combien de temps encore ?
Tant que notre actionnariat, qui est privé, jugera que ce statut d'indépendant sert sa vision et ses intérêts stratégiques, nous le resterons. La taille d'une entreprise est un élément critique, qui ne doit pas devenir obsessionnel. Notre développement, maîtrisé au fil des ans, suffit à démontrer la justesse de cette approche.
JA. Pourtant, l'heure est à la rationalisation du secteur ?
L'heure est à la concentration dans le milieu de la distribution automobile en général. Il est de plus en plus difficile de subsister en restant seul et indépendant. Les distributeurs européens se sont regroupés en plaques afin de minimiser les risques, et le phénomène est toujours en marche. Dans ce contexte, la rationalisation s'est effectivement accrue au sein des éditeurs informatiques qui ont dû investir de manière considérable pour étendre leur marché. Soit par de la conquête, soit par le rachat de parc déjà installé. Et ces acquisitions ne sont pas achevées, il reste encore de petites sociétés nationales. L'intérêt pour un réseau de concessionnaires est de disposer d'un produit informatique largement distribué, et à ce titre, eCARS21 avec ses 15 000 utilisateurs, est l'une des solutions européennes les plus répandues.
JA. Les constructeurs poursuivent-ils leur politique de préconisation ?
Le choix d'un DMS par un constructeur pour son réseau réside dans l'apport économique et technologique de celui-ci. Une informatique de gestion ne peut se concevoir sans une interopérabilité avec les autres logiciels (DCS pour la communication). La perte de rentabilité d'un logiciel non certifié a récemment été chiffrée par un cabinet indépendant à 150 euros par VN. Un DMS certifié et répandu en Europe est, pour un constructeur, l'assurance d'un déploiement rapide de ses outils, sans la contrainte de gestion que peuvent générer les interfaces multiples.
JA. Reportent-ils sur leurs fournisseurs les frais d'installation ?
La tendance observée est la suivante : en échange d'un marché européen, les constructeurs diminuent leurs contributions aux développements des interfaces nécessaires vis-à-vis de leurs fournisseurs informatiques. Mais cela leur permet également de rationaliser le nombre de ces prestataires ainsi que le nombre de solutions hétérogènes, quelquefois obsolètes. Ils peuvent alors déployer de nouveaux outils pour leurs propres réseaux qui alourdissent en effet, de manière considérable, les investissements des éditeurs informatiques.
JA. Ces derniers ont-ils les moyens de développer de nouveaux produits tout en s'internationalisant ?
Aujourd'hui, un produit uniquement national ne survit pas, et un produit monomarque ne peut résister longtemps. Les produits multimarques sont nécessaires compte tenu de l'évolution du marché. Et seul un grand nombre d'utilisateurs peut couvrir les investissements inhérents au développement de ces derniers. Un prestataire national peut tout à fait conserver son parc clients grâce à son expertise métier, ses compétences d'intégrateur, son service de proximité, bref, tout ce qui représente sa valeur ajoutée. Il doit également intégrer pour ses clients les logiciels constructeurs et d'autres plus spécifiques à certains métiers, une comptabilité nationale… tout en offrant un support d'accompagnement marketing et technique. C'est la politique que nous suivons en tant qu'éditeur indépendant et international s'appuyant sur des partenaires nationaux assurant le nécessaire service de proximité.
JA. L'ASP, qui consiste à externaliser la gestion des données informatiques, est-elle toujours la voie de l'avenir ?
Sans aucun doute. Elle répond à un besoin simple des distributeurs : qu'ils puissent se débarrasser des tâches informatiques pour se concentrer sur leurs métiers, tout en maîtrisant leurs coûts. Datafirst agit depuis des années comme un évangélisateur à propos de cette solution centralisée sur le Web. Et nous sommes heureux de constater le déploiement des offres dédiées que proposent nos confrères aujourd'hui en la matière, après maintes réticences de leurs parts. Ils ont su adapter leurs produits. Ils ne leur restent qu'à finaliser cette mutation et adapter leurs coûts.
JA. Le chiffre d'affaires du DMS est-il réellement évalué à 150 millions d'euros pour la France et 1,2 milliard d'euros pour l'Europe, comme on a pu le lire ?
Ces chiffres ne sont pas très réalistes. Il faut prendre plusieurs facteurs en compte. En France, le marché VN et VO est très important, avec un nombre d'agents trois fois plus important que de distributeurs. Le chiffre d'affaires des éditeurs DMS est d'environ 60 millions d'euros pour le marché français. En Allemagne, en Italie et en Espagne par exemple, on observe un équilibre entre les deux catégories tandis que dans les pays du Nord, le nombre d'agents est négligeable. En fonction de ces paramètres, le CA des éditeurs varie d'un pays à un autre entre 3,5 et 35 millions d'euros. La somme de 1,2 milliard pour l'Europe n'est qu'une mauvaise extrapolation. Nous sommes bien loin de la réalité qui avoisine plutôt les 300 ou 400 millions d'euros.
JA. L'annonce de tels chiffres a-t-elle des conséquences pour votre secteur ?
Ces données erronées attirent de fait de nouveaux acteurs tels que les éditeurs ERP. Par une analyse simpliste, ces derniers sont convaincus d'aborder un marché rentable et homogène. Or, il n'est ni l'un ni l'autre. Il n'est pas homogène, certains éditeurs ne parviennent pas à unifier leurs produits. Il n'est pas non plus rentable dans le sens ou l'entendent ces groupes mondialistes. Les coûts de nos consultants, par exemple, sont les plus bas du marché. Et les investissements des distributeurs, calculés en pourcentage de leur CA est également, et de loin, l'un des plus bas.
JA. Quelles sont justement les dépenses des concessionnaires en informatique ?
Trop faibles. Elles sont 10 fois inférieures à celles d'une PME. Certains ont le même outil informatique depuis 20 ans, sachant qu'il est considéré comme obsolète au bout de la 4e année. Comment espèrent-ils augmenter leurs performances dans ces conditions ? Les concessionnaires ont énormément investi pour renouveler leur showroom, améliorer les services indirects… mais ils ont complètement écarté le poste informatique, le considérant comme une charge, alors qu'il s'agit d'un outil générateur de profit. Ils ont également le sentiment de payer trop cher. Or, à l'inverse des prix des terrains ou de l'immobilier, qui ont augmenté de manière exponentielle, les coûts informatiques ne cessent de diminuer depuis 15 ans.
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