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Industrie

Record de profit pour les constructeurs : la crise entraîne un changement de modèle

Publié le 23 juin 2022

Par Jean-Baptiste Kapela
5 min de lecture
AlixPartners a publié son étude annuelle consacrée au secteur de l’automobile. Le cabinet de conseil ne prévoit pas de sortie de crise des semi-conducteurs au moins avant 2024, mais les constructeurs ont pallié le problème des volumes avec de la création de valeur pure.
Les annonces d’investissement dans les VE ont doublé et s'élève dorénavant à hauteur de 526 milliards de dollars selon le cabinet AlixPartners.

Dans un contexte mouvementé pour le secteur automobile, AlixPartners a sorti sa "boule de cristal" pour les années à venir. Le cabinet de conseil a présenté ce jeudi 23 juin, les résultats de son étude 2022 : Global Automotive Outlook. Entre l’électrification et la crise actuelle, la transition du secteur n’est plus à venir, elle existe déjà. Mais les constructeurs enregistrent une forte hausse de leur rentabilité, signe que la stratégie de volume peut être remplacée par celle de la valeur.

 

Globalement, le cabinet projette une baisse de la production mondiale de véhicules qui descendrait à 79 millions de véhicules, en raison de problèmes en Chine et en Europe. Ainsi, concernant la crise des semi-conducteurs, AlixPartners ne prévoit pas de reprise au moins avant le début de l'année 2024. L’Europe est particulièrement touchée par cette crise. Avec une prévision de marché en 2022 de 15,9 millions d’unités, et donc une baisse des volumes de 3 % entre le période 2020-2022 et une légère hausse de 1 % entre 2023 et 2026. En France, AlixPartners projette 2 millions de véhicules vendus et des ventes VP qui oscillent entre 2,2 et 2,4 millions d'unités entre 2023 et 2027.

 

Des véhicules sensibles à l’inflation

 

Par ailleurs, la flambée du prix des matières premières due à la guerre en Ukraine a fait grimper radicalement le coût de production des véhicules… Ainsi, le prix des matières premières par véhicule a doublé par rapport à la période pré-Covid, avec un niveau moyen passant de 1 475 dollars en 2020 à 2 827 dollars en 2022 pour un véhicule thermique.

 

L’étude d’AlixPartners permet également de constater que le véhicule électrique est plus sensible à l’inflation des matières premières. De fait, le coût moyen des matières premières par véhicule à batterie a explosé de 2 924 dollars en moyenne en 2020 à 6 533 dollars en moyenne en 2022. "Lorsque nous regardons la courbe, c’est l’Himalaya" ironise Alexandre Marian, codirecteur de la partie pratique industrielle et automobile d'AlixPartners. À noter que les matières premières spécifiques aux VE représentent un coût par véhicule de 3 600 dollars.

 

Accélération des ventes d’électriques

 

"Nous observons que la transition vers le VE est en bon chemin. Avec une accélération massive des ventes due à la hausse du prix des carburants", explique Laurent Petizon, codirecteur de la partie pratique industrielle et automobile d'AlixPartners. Ainsi, les ventes mondiales de VE ont fortement accéléré en 2021 pour atteindre 8,3 % de part de marché dans le monde. Le cabinet de conseil prévoit, à l’horizon 2035, environ 50 % de véhicules électriques à batterie, 4 % d’hybride rechargeable, 25 % de véhicules hybride et 21 % de thermique dans le monde.

 

"Nous devrions bientôt arriver vers un mass market pour le véhicule électrique. Il y aura un switch entre "apporter des solutions techniques sur le marché" vers “apporter des solutions économiques" en mesure de répondre aux besoins des clients. Nous devrions passer d’une période où certains constructeurs sont focalisés à être les premiers sur le marché à un autre où ils chercheront des produits capables de répondre à la demande” présente Alexandre Marian, codirecteur de la partie pratique industrielle et automobile d'AlixPartners. D’ici à 2024, près de 200 modèles à batterie devraient être lancé par la totalité des constructeurs qui font des annonces couvrant tous les produits, sur plusieurs segments, et ce, à l’échelle mondiale. Le cabinet observe aussi que les partenariats dans l’électrique ont explosé, avec une croissance de près de 40 % par an de ces derniers. Laurent Petizon ponctue : “Il y a dix ans, ça n’existait pas.

 

AlixPartners observe aussi que les annonces d’investissement dans les VE ont doublé et s'élève à hauteur, 526 milliards d’euros. "Il faut préciser, par ailleurs, que les investissements sont répartis de manière équivalente entre Europe, Etats-Unis et Chine. La transition est donc inéluctable", a réaffirmé Alexandre Marian. Ainsi, en 2035, les véhicules électriques devraient être majoritaires dans toutes les grandes régions du monde. En Chine et aux États-Unis, les VE représenteraient, selon AlixPartners, respectivement une part de 59 % et 56 %.

 

Profitabilité des constructeurs

 

En attendant, la pénurie des semi-conducteurs a permis aux constructeurs de mettre en place une stratégie de production, en flux tendu, sans stock, et surtout avec des ventes de véhicules à plus forte marge et sans remise. Les rentabilités moyennes enregistrées par les 25 principaux constructeurs mondiaux ont atteint un niveau historique, de l’ordre de 12,6 % en 2021, soit un gain de 3,2 points par rapport à 2020.

 

Selon AlixPartners, pour la première fois, la rentabilité moyenne de ces 25 principaux constructeurs automobiles dépasse celle des 50 plus grands équipementiers mondiaux, qui s’établit à 10,8 %. Grâce à cette hausse de profitabilité, la valeur et l’attractivité du secteur automobile progressent. Le cabinet prévoit un quasi-doublement de la valeur du secteur d'ici à 2023, pour atteindre 89,2 milliards de dollars contre 46,8 milliards en 2021. Plus de la moitié de cette valeur devrait provenir des constructeurs (63 %).

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