Christophe Périllat, Valeo : "Je suis inquiet pour l'industrie automobile européenne et française"
Le mois d'octobre 2024 aura été le théâtre d'annonces chocs de la part des industriels français du secteur de l'automobile. La dernière en date n'est autre que celle du groupe Valeo, qui a confirmé, le 27 novembre 2024, la suppression de 868 postes sur huit de ses sites français, sans préciser à quelle échéance.
Cette annonce suit la présentation des mauvais résultats enregistrés par l'équipementier lors du troisième trimestre 2024. Cette conjoncture l'a d'ailleurs conduit à revoir son objectif de chiffre d'affaires annuel à la baisse, visant désormais 21,3 milliards d'euros, soit une baisse de 3,3 % par rapport aux prévisions initiales.
"Les ventes ne seront pas exactement celles que nous avions prévues", avance Christophe Périllat, directeur général de Valeo, dans un entretien pour BFM Business. Selon le dirigeant, cette baisse relève d'une "transformation pour le meilleur" du secteur.
Décarbonation et emplois
Cette transition vers la voiture décarbonée, Valeo l'a engagée depuis plusieurs années déjà, investissant neuf milliards d'euros dans la recherche et le développement.
"Lorsque l'on ouvre le capot d'un véhicule électrique, il n'y a plus rien de commun avec un véhicule thermique, donc nous devons adapter notre production", poursuit le directeur général. Le groupe se diversifie notamment avec des technologies dédiées aux moteurs électriques, aux onduleurs, aux chargeurs ainsi qu'aux pompes à chaleur.
"Cette transformation a cependant des conséquences sociales parfaitement mesurées", estime Christophe Périllat. Pourtant, à l'instar du manufacturier clermontois Michelin, Valeo a évoqué en juillet la vente, voire la fermeture, de deux de ses usines françaises, entraînant la suppression de plusieurs centaines de postes.
Si le directeur général évoque des possibilités de reconversion pour les postes concernés, il précise que cette restructuration est la conséquence de la transition vers l'électrique : "La construction du véhicule électrique demande moins de valeur ajoutée et moins de main-d'œuvre".
Cette situation semble d'ailleurs se durcir sur le Vieux Continent. Ainsi, la PFA estime à 65 000 le nombre de suppressions de postes en cinq ans en France dans la filière. Outre-Rhin, les prévisions sont encore plus alarmantes, selon l'organisme VDA qui table sur 200 000 suppressions de postes d'ici à 2035.
Une perte de compétitivité en Europe
Au-delà de l'électrification du parc roulant, Christophe Périllat s'inquiète d'un autre constat : en cinq ans, l'Europe a perdu 25 % de compétitivité par rapport à la Chine. Pour cause, l'inflation a lourdement pesé sur l'industrie européenne, et les points de compétitivité ne se regagnent pas si facilement. Ce qui fait dire au directeur général : "je suis vraiment inquiet pour l'industrie automobile européenne et française."
Si l'adoption de droits de douane par l'Union européenne pourrait freiner la progression des marques chinoises, Christophe Périllat rappelle que "ces taxes seront profitables pour les constructeurs, pas pour les équipementiers". Il précise pourtant qu'aujourd'hui "80 % de la valeur des véhicules provient des équipementiers."
Loin de s'inquiéter de la concurrence étrangère, à condition que les règles du jeu soient les mêmes pour tous, le directeur de Valeo rappelle que sa mission est de "travailler avec tous les constructeurs".
L'équipementier, récompensé du titre de fournisseur de l'année par General Motors, envisage d'accroître encore sa puissance en Amérique du Nord, qui représente déjà 20 % de son chiffre d'affaires, car les productions de ce territoire doivent majoritairement contenir des éléments fabriqués dans la zone. Contrairement à l'Europe...
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