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Industrie

Chaises musicales

Publié le 3 octobre 2008

Par Gredy Raffin
6 min de lecture
La mutation du marché de l'autoradio touche évidemment la distribution. Une valse à trois, entre des hypermarchés en voie de disparition, des centres-autos qui se renforcent et des sites Internet en embuscade. Explications....
La mutation du marché de l'autoradio touche évidemment la distribution. Une valse à trois, entre des hypermarchés en voie de disparition, des centres-autos qui se renforcent et des sites Internet en embuscade. Explications....
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Rares sont les produits aussi difficiles à commercialiser que les autoradios ! Même les hypermarchés, qui étaient depuis longtemps présents sur ce créneau et tiraient leur épingle du jeu grâce à des prix agressifs qu'eux seuls étaient capables de proposer, délaissent tour à tour le segment. Hormis Auchan, seules quelques enseignes, comme Les Mousquetaires (Roady) ou Leclerc (L'Auto), continuent d'y évoluer. La raison principale de ce désengagement tient dans le fait que la baisse généralisée des prix ne leur confère plus cette position avantageuse face à la concurrence des autres canaux de distribution et, qu'en sus, les marges, en net recul, ne rentabilisent plus les investissements consentis dans l'entretien de linéaires spécifiques et d'équipes commerciales dédiées.
Heureusement pour les fabricants et les consommateurs, le désintéressement ne s'est pas généralisé. Bien au contraire. Malgré des marges qui "s'érodent annuellement de 1,5 point depuis près de 8 ans", comme le déplore un distributeur, les centres-autos ont continué d'investir. Résultat : ils connaissent une croissance vertigineuse et dominent le marché avec 75 % des parts (contre 10 % pour les grandes surfaces alimentaires), en croissance de 5 points. "Nous avons une légitimité forte", argue Laurent Proust, directeur des magasins Autobacs. "Plus le marché se complique, plus nous nous renforçons", renchérit quant à lui, Christophe Reutenauer, responsable chez Norauto. Contrairement aux hypermarchés, "la largeur d'offre permet de faire du volume et d'amortir la baisse des prix", explique Laurent Proust. "Mais il est important d'appréhender les stocks avec une certaine maîtrise car les autoradios dévaluent dans le temps et l'immobilisation de trésorerie peut vite coûter cher", rappellent les responsables de vente. Souvent encouragés à constituer des "réserves" par les fabricants, les distributeurs se sont organisés en conséquence. Chez Norauto, par exemple, les magasins sont soulagés par une politique d'entrepôt qui gère les flux à plus grande échelle et donc limite les risques d'accumuler des stocks d'invendus.

Former les rangs !

Face aux grandes surfaces déclinantes, les centres-autos avancent par ailleurs un argument de taille : le service. Celui de l'installation, notamment. En effet, ils bénéficient naturellement d'aires prévues à cet effet et de l'outillage approprié. Ne restait plus qu'à packager l'offre. "Ce qui nous permet de réaliser des ventes de kits avec les haut-parleurs", se satisfait-on chez les responsables de centres-autos. Dans ce contexte de marché en déflation, "il faut vendre de l'installation", résume clairement Christophe Reutenauer. "Malheureusement, le prix du montage est encore trop élevé et va continuer à augmenter du fait de la technicité croissante et du niveau de compétence requis", annonce-t-il ensuite.

Avec la technicité accrue des autoradios (qui embarquent de plus en plus de fonctions), d'une part, et celle des véhicules (dont le réseau de câblage se densifie avec l'ajout d'équipements de confort et de sécurité), d'autre part, les distributeurs demandent à être informés mais, surtout, à être formés. "Il nous faut des informations précises pour nous permettre de travailler sereinement, réclame Laurent Proust. Pour le moment, cela reste un point sur lequel les constructeurs ont encore des progrès à réaliser". Ces derniers en ont pris conscience et recensent de nombreuses demandes, comme le concède Olivier Morel, responsable chez Kenwood. Comme ses homologues, affirme travailler ardemment sur la question et les programmes concrets de formation commencent à se structurer. Non pas au sein de centres dédiés, comme chez les équipementiers, mais sous forme de réunions techniques. La plupart du temps, elles sont organisées selon un calendrier défini par les équipes commerciales. Et Sébastien Rosnet, responsable marketing de Pioneer, de souligner : "Les techniciens chargés de l'installation ont l'impression que c'est de plus en plus compliqué alors que, bien au contraire, les adaptateurs que nous leur fournissons simplifient les choses." Une affirmation que pourrait valider une statistique révélée par Christophe Reutenauer : "70 % des clients emportent leur achat pour effectuer eux-mêmes la pose." La récente progression des ventes sur Internet alimente d'autant plus le débat en ce sens.

Internet, "légitimité technologique"…

Tout produits électroniques confondus, la vente en ligne s'accapare 57 % des volumes en France (enquête La Tribune). Sur le segment des autoradios, les sites Internet ont su émerger et prendre 7 % de parts de marché, selon les estimations du cabinet GfK. Pour ces acteurs, l'activité ne pèse généralement pas plus de 2 % de leurs chiffres d'affaires (300 millions d'euros environ, en ce qui concerne RueduCommerce.com, 3e en France). Les responsables commerciaux des sites attachent pourtant une grande importance à leur représentativité sur le créneau, convaincus qu'il y a un fort intérêt économique pour leur canal.

Jouant sur l'aspect "légitimité technologique" pour séduire les consommateurs, Internet parvient à tirer les prix vers le haut quand la concurrence connaît les difficultés précédemment évoquées. Pour ce faire, il compte sur des prix "cassés", notamment sur les marques de premier plan. "Environ 10 à 15 % en dessous des points de vente physiques", constate-t-on chez RueduCommerce.com. Un moyen efficace de conserver le consommateur sur des marques A, tandis qu'en centres-autos, il a tendance à se rabattre sur des produits de qualité moindre. "Nous nous devons d'avoir toutes les gammes d'autoradios et tous les prix, précisent les responsables de sites, mais nous souhaitons évidemment vendre les produits à forte valeur ajoutée que le consommateur n'a pas les moyens d'acheter en centres-autos".

...et matérialisation

En chiffres : le panier moyen avoisine  les 109 euros sur Internet, contre 106 euros dans les centres-autos et moins de 100 euros dans les hypermarchés. "D'autant que nous n'avons pas de problématique de rayonnage si nous nous comparons aux magasins traditionnels", insiste Hervé Mouyal, responsable électronique embarquée pour Pixmania. Mais, là aussi, le poste installation entrave le bon développement de l'activité car ce modèle économique implique des connaissances, à la fois dans l'outil Internet et dans le montage de l'autoradio. Trop de facteurs qui réduisent, au final, le nombre de cibles potentielles. Ce n'est donc pas par hasard que "Pixmania surfe sur le développement du tuning en France", comme le confie le responsable.

Le service associé représente par conséquent la prochaine étape pour les sites de vente en ligne. RueduCommerce a déjà pris les devants en la matière, en signant des accords, certes jugés "anecdotiques", dans la région parisienne. Pixmania, de son côté, dit réfléchir à "une solution viable". Si les centres-autos, par la capillarité de leur réseau, semblaient tout désignés, par principe concurrentiel, ils seront "quasi-impossible à convaincre". Alors, les installateurs locaux, notamment les indépendants qui ont subi de plein fouet la croissance des centres-autos, pourraient avoir ici une carte à jouer. Pour eux, ce serait en effet les profits de la main-d'œuvre, sans les coûts de stockage…

Photo : Des linéaires comme celui-ci, les hypermarchés ne sont plus disposés à en installer et en entretenir. Une commodité dont se dispensent les  sites Internet qui peuvent, ainsi, investir dans des gammes plus étendues, afin de couvrir tous les marchés.

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