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Nathalie Willème : La passion chevillée au corps

Publié le 3 septembre 2004

Par Tanguy Merrien
7 min de lecture
C'est tout sauf le hasard qui a conduit Nathalie Willème à la tête du service après-vente d'une concession Peugeot de la région parisienne. Une force de caractère hors du commun lui a permis de s'imposer dans un milieu où ce sont bien souvent les hommes qui font la loi. De façon indiscutable,...
C'est tout sauf le hasard qui a conduit Nathalie Willème à la tête du service après-vente d'une concession Peugeot de la région parisienne. Une force de caractère hors du commun lui a permis de s'imposer dans un milieu où ce sont bien souvent les hommes qui font la loi. De façon indiscutable,...

...elle dirige dans la plus belle des harmonies une équipe de 25 "garçons". Mais tout ne fut pas simple.


Son bureau campe au beau milieu du service après-vente de la concession Peugeot Métin de Noisy-le-Grand (93) et, à la voir à l'œuvre, la jeune femme s'y sent comme un poisson dans son bocal. Dans son monde. On est loin des clichés, des exécrables rapports hommes-femmes, d'un machisme exacerbé dans un milieu exclusivement réservé aux hommes ! Non, sa fonction de responsable du service après-vente est tout simplement naturelle, voire indiscutable, au sein d'une équipe composée, de surcroît, de 25 hommes. Pourtant, ce ne fut pas si évident. Nathalie Willème a dû jouer des coudes, se forger un mental à toute épreuve, voire une carapace qui ne laisse rien percer, pour en arriver là.
Tout la prédisposait à faire carrière dans l'automobile. Sa maman dirigeait déjà un garage à Charleville-Mézières et c'est avec une certaine fierté qu'elle revendique "être née dans le cambouis". A son plus grand plaisir. Une fois par an, le rallye des Ardennes lui donnait l'occasion de côtoyer les Todt, Ragnotti, Jaussaud, et Mouton. A mille lieues des autres petites filles de son âge, elle idolâtrait les pilotes. "C'est surtout Christine Dacremont qui me fascinait. Je rêvais de devenir comme elle." La passion chevillée au corps, elle décide tout naturellement de passer un CAP mécanique. "Une décision qui n'a pas forcément fait l'unanimité dans mon entourage. Celui-ci ne comprenait pas pourquoi une jeune fille voulait se lancer dans une voie uniquement tracée pour les hommes. Seule ma mère a cru en moi", se souvient-elle. Deux ans plus tard, en 1980, Nathalie Willème entre au Garac, à Argenteuil (95). La première grande satisfaction de sa carrière professionnelle. "Jusque-là, jamais une fille n'avait fait partie de l'établissement professionnel. Armand Carillo, le directeur général, m'a fait confiance en m'y acceptant. J'en suis fière", concède-t-elle. Confiance, une valeur qui ne l'a quittera désormais plus. Ses trois ans passés au Garac furent "merveilleux". Seule femme au milieu de garçons, elle trouve sa place, se façonne une identité, se forge un caractère, se délimite un territoire. "J'avais conscience que rien ne serait acquis d'avance, qu'il fallait travailler, démontrer plus que les autres. Il n'y avait pas non plus de juste milieu, soit on vous aime, soit on vous déteste."

La course automobile, une véritable bouffée d'oxygène

A la sortie, tout va s'enchaîner. D'emblée, Nathalie Willème entre chez Alpine en tant que mécanicienne. Pour la jeune femme, le rêve se poursuit : "L'atelier était carrelé de blanc, les autos étaient superbes, il n'y avait que des Alpine, le paradis en somme." Elle va aussi rapidement déchanter. Son inexpérience, sa jeunesse lui valent quelques railleries et maladresses, notamment de la part de clients et d'hommes qu'elle a côtoyés lors de cette première expérience professionnelle. "Je reconnais avoir passé des moments difficiles. J'étais une femme et beaucoup ne comprenaient pas, à l'époque, ce que je faisais là. Pourtant, pour éviter toute équivoque, mes diplômes étaient bien en évidence accrochés à la façade de l'atelier. Je ne voulais pas en parler, j'ai encaissé, j'ai autogéré. J'ai connu des soirées difficiles en rentrant chez moi", se souvient-elle. Sa passion pour le métier la préservera. Notamment le sport automobile, qui sera pour elle une véritable bouffée d'oxygène. En vraie mordue, Nathalie Willème s'engagera au championnat de France Rallye R 5 GT Turbo en catégorie Promotion et disputera 8 courses sur 12 en une seule saison. Une vraie révélation. La jeune femme et son mari passeront toutes leurs vacances sur les circuits en y investissant aussi leurs deniers personnels. Après trois ans (de 1984 à 1987) à rouler à tombeau ouvert, elle devra renoncer à la course automobile car la jeune femme, toujours en quête d'évolution et jamais à court d'ambition, ouvre avec son mari un garage à Champigny-sur-Marne (77).

La passion pour le métier était trop forte

L'affaire connaîtra le succès, mais une succession d'événements malheureux vont pousser le couple à y renoncer en 1996. Un premier revers pour Nathalie Willème : "Des cambriolages successifs et un accident grave m'ont dégoûtée de l'automobile. Je me suis retirée et me suis lancée dans la décoration intérieure. Mais…" Mais la passion pour l'automobile est une fois de plus trop forte. Et la chance va à nouveau lui sourire. La rencontre en 1999 avec le groupe Métin sera pour Nathalie Willème une première grande satisfaction. "Pour la première fois, je ne ressentais aucune différence entre hommes et femmes. Les opportunités s'offraient à moi, j'ai senti un respect de la part de mes dirigeants, à commencer par Jacques Métin. Tout le monde est situé au même niveau et tout le monde à une chance d'évoluer. J'ai attendu vingt ans pour connaître cela dans le métier que j'aime", s'enthousiasme-t-elle. Elle retrouve alors cette confiance placée en elle, qu'elle est prête à accorder en retour à des dirigeants qui croient en ses capacités. Deux ans





  • Quel autre métier auriez-vous voulu exercer ? Décoration intérieure ou clown
  • Votre voiture ? 407 Hdi 136 ch
  • La voiture la plus masculine ? 607
  • La voiture la plus féminine ? 307 CC
  • L'automobile, milieu macho : cliché ou réalité ? Cliché
  • Jupe ou pantalon ? Pantalon
  • après son arrivée au sein du groupe, Nathalie se voit confier la responsabilité du service après-vente de la concession de Noisy-le-Grand.
    Entre-temps, les mentalités ont évolué. Si certains se questionnent encore sur l'utilité d'une femme à ce poste, ils lui accordent cependant une chance. Le temps de prendre ses marques. Il y eut bien un carrossier qui lui fit remarquer une fois dans son bureau : "Jamais je ne travaillerais sous la responsabilité d'une femme !" C'est pourtant elle qui est restée. Aujourd'hui, elle chapeaute une équipe de 25 hommes et de 2 femmes. A l'image d'un chef de tribu, elle est respectée par son équipe et compte sur chacun pour mettre le collectif en avant. Ni trop dirigiste, ni trop affective, elle consulte ses hommes et compte sur leur soutien dans ses prises de décisions. Mais c'est bien elle la chef : "La confiance n'exclut pas le contrôle", répète-t-elle à l'envi. A sa plus grande fierté, le succès est arrivé. Récemment, après les bons résultats obtenus par l'équipe (1re équipe après-vente du groupe Métin selon une enquête sur la satisfaction clientèle), un de ses collaborateurs lui a confié : "Si nous en sommes là aujourd'hui, c'est grâce à vous !" La relation avec les clients est elle aussi basée sur la confiance, et son expérience et les travers du passé lui permettent aujourd'hui de savoir comment mettre les clients dans sa poche au cas où certains seraient encore rétifs à l'idée de voir une femme se charger de leur véhicule.
    Aujourd'hui, le management et les relations entre les hommes sont sans doute ce qu'elle préfère : "Ce côté fort qui existe dans la vie de tous les jours entre les hommes est passionnant. Le plus dur est de maintenir une équipe au plus haut niveau, bien rodée, à la mécanique bien huilée."
    Ce caractère d'acier trempé, prêt à tout donner pour son équipe, se verrait bien aller plus loin, en dirigeant, pourquoi pas, un site du groupe. La tâche ne l'effraie pas, son ambition et son amour pour la profession le lui autorisent. "Ce n'est pas le métier qui est le plus difficile, mais les gens qui le composent", conclut-elle, sans oublier un difficile départ dans un milieu automobile qui lui sied à ravir. 


    Tanguy Merrien

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