Marc Bruschet, Mobilians : "L'objectif des normes d'émissions de CO2 en Europe est irréalisable"
![Marc Bruschet, président des concessionnaires de Mobilians et normes CAFE](https://journalauto.com/wp-content/uploads/2025/02/Marc-Bruschet_Mobilians-Marche.jpg)
Une mauvaise année en chasse une autre. Depuis cinq ans, le marché automobile des véhicules neufs ne parvient pas à dépasser le plafond de 1,7 million d'unités. Et 2025 ne devrait pas changer cette logique selon Marc Bruschet, président des concessionnaires VP au sein de Mobilians.
"Le volume des commandes est au plus bas. Il atteint, en ce début d'année, 1 689 000 véhicules cumulés au cour de 2024. Pour la deuxième année consécutive, il est inférieur à celui de 2020 où, souvenez-vous, le commerce automobile subissait les confinements liés à la pandémie de Covid-19", annonce-t-il. "Nous vivons clairement une crise de la demande."
Ainsi, le marché 2025 ne peut être envisagé au-dessus du niveau de 1,7 million. Face à cette faiblesse de la demande, les constructeurs automobiles doivent faire face au durcissement des normes d'émissions de CO2 dites CAFE depuis le 1er janvier 2025. "Si les constructeurs veulent arriver à ce mix de vente compris entre 22 % et 25 % de véhicules électriques cette année, ils vont devoir surjouer sur les marchés importants que sont la France et l'Allemagne", poursuit Marc Bruschet. "Or, clairement, nous sommes dans une impasse au niveau des normes pour les véhicules particuliers. Et pour le véhicule utilitaire, nous sommes déjà dans le mur."
Sur le segment des véhicules utilitaires, le mix de motorisations électriques atteint péniblement les 6 %, alors que l'objectif nécessite d'atteindre un niveau de 15 % à 17 %. "Le véhicule utilitaire est le symptôme criant qu'il n'existe pas de marché électrique sur ce segment. Alors que le marché global est en croissance, le mix en 100 % électrique descend. C'est la preuve évidente que le marché n'existe pas. Nous ne pourrons nous en sortir qu'à condition de casser la volonté politique, de changer ou de décaler le calendrier", estime le président des concessionnaires de Mobilians.
Un risque certain pour les réseaux de distribution
Mais le risque ne porte pas uniquement sur les constructeurs. Par ricochet, les réseaux de distribution en feront également les frais.
Pour Marc Bruschet, les positions des constructeurs se répartissent selon trois stratégies. La première, punitive, nécessite pour les groupes de distribution d'atteindre 80 % de leur objectif, en ventes de véhicules électriques. Une limite qui conditionne toutes les rémunérations. "Le risque pour les réseaux est de ne pas toucher de marges arrière, s'ils n'atteignent pas cette part. Or, notre modèle économique n'est pas tenable sans ce type de rémunération", reconnaît-il.
La deuxième politique, coercitive, consiste à diviser par deux le niveau de marges arrière en cas de non-atteinte des objectifs. Enfin, la troisième, plus vertueuse, ne transforme pas la part du mix BEV comme une clé d'accès aux primes. Mais comme la plupart des groupes sont multimarques, autant dire que la gestion de la rémunération sera complexe.
"Nous devons faire face à la mise en place d'une mécanique de baisse de la rentabilité des réseaux de distribution. Dans quelques semaines, nous allons présenter les comptes 2024, qui sont mauvais. Ce sera même sans doute la pire année depuis 1973 !", déplore Marc Bruschet.
De fait, les trésoreries restent tendues, à cause de la hausse des prix catalogue, de la hausse des BFR, aggravée par celle des frais financiers.
Un contexte économique et de marché qui fragilise la distribution automobile. Seule porte de sortie : que l'offre s'ajuste à la demande avec des véhicules électriques, au moins en termes de prix. "Ce sera sans doute très douloureux pour les constructeurs, mais c'est inéluctable", assure-t-il.
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