Les Succ’ de l’avenir
...(que l'on appelle désormais filiales) n'avaient aucune raison d'être si ce n'est de perdre de l'argent. Nous pensions qu'un entrepreneur valait mieux qu'un cadre, parce que le premier risque son capital et son affaire quand le second, un brin de carrière tout au plus. C'est toujours vrai, mais il nous a été donné de constater plusieurs choses. D'abord, qu'il n'y a pas que des entrepreneurs chez les concessionnaires. Ensuite, qu'il y a des directeurs (et des directrices) de succursale qui ont l'esprit d'entreprise… mais pas de capitaux pour créer leur propre entreprise, ni de vraies possibilités d'emprunter auprès d'un système bancaire qui se méfie du commerce automobile. Enfin, que les concessions appartenant aux grands groupes sont parfois aussi bureaucratisées que les Succ'. Il y a donc, peut-être, un avenir pour les succ'. Mais lequel ?
Des Succ' ou des entreprises indépendantes ?
Les constructeurs ont continué, tout au long de l'histoire de l'automobile, à se doter de succursales pour des raisons multiples. C'était parfois nécessaire, parce qu'on ne trouvait pas de concessionnaires pour couvrir certains territoires. Aujourd'hui, on se résout parfois à adopter la même solution quand les concessions sont au bord de la faillite et qu'il faut bien les racheter pour continuer à exister. Nous venons de citer la seule raison qui mérite quelque indulgence. Mais rien de plus, en tout cas aujourd'hui, et ceci parce que les succursales telles qu'elles existent sont une survivance d'un passé florissant, où l'on pouvait se permettre des fantaisies onéreuses. Deux considérations doivent être faites. Premièrement, les constructeurs ont mieux à faire de leurs "talents" (humains et financiers) que de les investir dans des succursales : le recours à des partenaires extérieurs est préférable. Deuxièmement, et précisément parce qu'il s'agit de méga "usines à gaz" monomarques, les Succ' dans leur définition actuelle ne sont pas (et seront de moins en moins) adaptées à un marché hyper concurrentiel. Face à des groupes de distribution qui enrichissent leur portefeuille de marques et se préparent (sans doute) à introduire des doses croissantes de multimarquisme dans leurs concessions, les grandes structures monomarques seront de plus en plus vulnérables.
Des Succ' indépendantes !
Si les constructeurs veulent avoir des succursales rentables, pérennes et qui assurent, ce qui ne gâte rien, une formation commerciale hors pair aux collaborateurs qui y prêtent leur œuvre, il leur faut miser sur les personnes et le marché. On en reparlera sans doute dans vingt ans, au mieux, mais allons-y quand même. Miser sur les personnes, c'est d'abord opérer une sélection sur la base de l'esprit d'entreprise des (jeunes) impétrants, qui devraient présenter un projet bien à eux, précisant librement le type d'entreprise qu'ils proposent et ce à quoi ils s'engagent si on leur en donne les moyens, financiers tout d'abord. C'est ensuite les laisser organiser leurs affaires comme ils l'entendent, en limitant les critères qualitatifs à presque rien. C'est enfin brider les éventuels appétits bureaucratiques des structures centrales, en définissant des interventions a minima : par exception (irrégularités flagrantes), plus un audit surprise de temps en temps. Miser sur le marché, c'est surtout ne pas l'insulter (le marché), et c'est aussi une autre façon de miser sur les personnes. On n'échappera donc pas au multimarquisme, et il faut que ceci soit bien clair. Qu'on ne s'offusque pas trop : on a déjà vu un constructeur (allemand, croyons-nous) figurer parmi les actionnaires d'un groupe (PGA, nous semble-t-il) qui commercialise aussi des marques concurrentes (notamment françaises, à ce qu'il paraît). Reste à choisir quel multimarquisme, quand et comment. Et cela ne peut être que du ressort du responsable de la Succ' en question. Comme il est évident qu'on souffre d'éblouissements à la sortie d'un tunnel (ou du Moyen Age), et qu'il faut du temps pour s'en remettre, nous n'irons pas plus loin pour cette fois.
Ernest Ferrari
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