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Distribution

“La part de marché ne signifie plus grand-chose”­­

Publié le 14 novembre 2013

Par La Rédaction
7 min de lecture
Acteur historique de la distribution automobile à Montpellier et premier représentant de la marque Hyundai en France, le groupe a posé de solides jalons pour assurer sa pérennité. Lui aussi adepte du “Pour vivre heureux, vivons cachés”, l’opérateur n’en reste pas moins attentif aux opportunités.
Stéphane Cerdan, dirigeant du groupe Cerdan.

Journal de l’Automobile. Le groupe a connu une période charnière en 2006 suite au rachat de la plaque italienne de Montpellier. Pouvez-vous revenir sur ce développement ?

Stéphane Cerdan. Nous étions à un tournant. A cette une période, l’équation était simple : soit nous nous développions, avec de nouvelles marques, en dehors ou dans notre zone de chalandise, soit nous stagnions. Tous les paramètres étaient au vert ; nous avions de très fortes rentabilités. Et l’opportunité s’est présentée de reprendre cette plaque au groupe Goulet-Rougeot, qui représentait 1 500 VN à l’époque. L’acquisition s’est faite en six mois.

JA. Aujourd’hui, dans quelle position se situe le groupe ?

SC. J’ai refusé certaines opportunités à une période où nous étions dans une phase forte d’investissements, avec la construction de nouveaux bâtiments. Nous sommes propriétaires de tous nos établissements. Faute de visibilité, notre objectif premier est de consolider nos bases pour assurer la pérennité de l’entreprise. Dans un marché compliqué, il faut savoir se montrer raisonnable et, surtout, ne pas faire n’importe quoi. Mais nous ne nous interdisons pas de nouveaux développements à terme, notamment sur une nouvelle zone de chalandise. Nous restons attentifs, nous scrutons le marché, parce qu’il va y avoir des offres dans les prochains mois, et il y en a déjà pas mal actuellement. Nous sommes un groupe familial et n’avons pas la prétention d’avoir la représentation d’un gros groupe de distribution. Si nous devons nous développer, cela passera peut-être par des alliances, ou alors des gros capitaux d’investissement. Je n’écarte rien. J’aime toujours autant le métier même s’il a changé.

JA. Est-il plus facile et profitable d’être un groupe multimarque dans le contexte actuel ?

SC. J’ai toujours pensé que le multimarquisme était bénéfique pour afficher une bonne représentation sur sa zone de chalandise. Ensuite, sur un plan économique, nous sommes moins tributaires du cycle de vie d’une marque. Je préfère investir avec une visibilité de plusieurs constructeurs, ce qui permet d’avoir en permanence de la nouveauté d’un point de vente à un autre, de communiquer sur ces nouveaux produits et de répondre aux besoins de notre clientèle. C’est bénéfique pour la pérennité du groupe et représente un gage de sécurité par rapport à nos partenaires financiers, il ne faut pas s’en cacher. Sur un marché qui n’a jamais été aussi bas depuis quinze ans, certains de mes confrères monomarques rencontrent aujourd’hui des difficultés financières.

JA. Les réponses, les outils apportés par les constructeurs sont-ils suffisants et adaptés à la situation ?

SC. Les quatre secteurs d’activité d’une affaire automobile sont impactés. Si les constructeurs étaient restés aussi rigides et fermes sur l’approche des standards et des volumes, ils auraient tué le réseau. Ils commencent à prendre conscience que si, demain, il n’y avait plus de réseaux de distribution, il n’y aurait plus de clients. A un moment donné, il faut que nous sortions des rentabilités. Ils ont redescendu leurs standards et leurs exigences de manière large, certains plus que d’autres, avec des systèmes de vente beaucoup plus simples, moins contraignants et plus réalistes.

JA. Vous avez concentré vos affaires sur deux pôles, un peu à l’image des Villages automobiles. Est-ce un schéma indispensable aujourd’hui dans la distribution ?

SC. L’achat d’un véhicule est moins dicté par la passion, il faut être factuel et répondre rapidement aux besoins des clients. Aussi, le regroupement des affaires permet à un client de trouver son bonheur en deux heures de temps. De notre côté, en étant référencés sur un site géographique, nous pouvons optimiser les synergies, réduire notre communication, nos coûts de transport, d’assurance… En réunissant les marques sous un même toit, les économies d’échelle deviennent même quotidiennes.

JA. Quels bénéfices avez-vous tiré de la concentration de vos affaires ?

SC. Depuis l’ouverture de Garosud fin 2006, nous progressons d’année en année, tant sur les ventes que sur l’après-vente. C’est bénéfique sur le plan de la qualité perçue, car nous allons au-devant des attentes des constructeurs et nous faisons de la conquête, car nous couvrons parfaitement les axes principaux de Montpellier.

JA. Beaucoup de dirigeants parlent d’un retour aux basiques et aux fondamentaux. Quels sont-ils, selon vous ?

SC. Le véritable patron, c’est le client, lui seul peut décider de l’avenir des distributeurs et des constructeurs. Il a besoin de transparence et de reconnaissance, et cela passe par une qualité de service irréprochable. Nous revenons à un commerce de proximité qui se définit par plusieurs valeurs : la qualité, le respect, le suivi. Certes, cette recherche de qualité représente un coût et impacte de fait nos rentabilités sur un marché peu porteur, mais cela paiera demain.

JA. Comment jugez-vous vos résultats depuis le début de l’année ?

SC. Sur la période 2012/2013, nous suivons malheureusement les tendances du marché. Nous conservons nos parts de marché, mais notre volume est en régression, de l’ordre de - 10 %, avec des variations selon les marques. Nous sommes en perte de vitesse sur le marché VN, et cela se traduira par une baisse du chiffre d’affaires. En revanche, notre profitabilité est bonne car nos ventes sont meilleures et le mix plus élevé. Enfin, depuis janvier, nous sommes en croissance de 15 % sur le VO, avec un rythme de 912 unités à particuliers sur l’exercice 2013.

JA. Sur le plan local, comment jugez-vous vos parts de marché ?

SC. Nous suivons la pénétration de nos marques sur le plan national. Mais quand vous voyez que la part des ventes à particuliers est descendue sous la barre des 50 %, le reste étant constitué des loueurs, des ventes blanches…, l’indice de part de marché ne signifie plus grand-chose aujourd’hui. Je peux très bien, sur le papier, afficher 0,1 % de part de marché et monter à 5 %, en consolidant avec les véhicules “0 km”, “première immatriculation” ou “0 km deuxième immatriculation”. C’est très artificiel. Au final, on compare nos parts et nos performances sur un périmètre local par rapport à un marché national qui est déjà “pipé”. Nous sommes dans un schéma industriel avec des usines qui produisent des véhicules, avec des constructeurs qui doivent conserver leurs parts de marché au niveau national. Ils veulent des immatriculations, par conséquent nous appuyons sur le bouton à la fin du mois. Autrement, ces véhicules passent aussi dans les réseaux parallèles ou en vente blanche, il ne faut pas se leurrer.

Propos recueillis par Tanguy Merrien et Benoît Landré

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L’avis de Stéphane Cerdan sur…

Hyundai
Mes parents ont fait acte de candidature en 1992 quand ils ont su que Sonauto allait importer la marque Hyundai en France. Un mois après, ils ont été convoqués et le premier contrat a été signé. La marque était inconnue et confrontée à un déficit d’image et de notoriété énorme. Pourtant, cela a fonctionné assez rapidement, grâce à une stratégie axée sur le service et l’après-vente. Vingt et un ans plus tard, nous avons un parc de plus de 10 000 voitures Hyundai. Après Sonauto et le groupe Frey, nous attaquons la troisième phase avec de grosses ambitions et de gros moyens. Nous pouvons désormais parler de marque généraliste au sujet de Hyundai, avec une montée en gamme dans le juste prix.

Skoda
Nous avons tenté ce deuxième pari en 1995 avec la marque Skoda. Nous avions toutefois intégré dans notre choix stratégique que la marque avait été rachetée par le groupe Volkswagen en 1990. Quand nous voyons son évolution et ses résultats, nous pouvons parler de success-story.

Suzuki
Nous avons ajouté ce panneau en 1995. A l’époque, la marque représentait dans l’Hexagone entre 4 000 et 5 000 unités. Nous sommes montés jusqu’à 30 000 voitures durant la période 1997/1998. Aujourd’hui, elle pâtit d’un déficit de nouveautés, même si le S-Cross est un produit très sympa à travailler. A ce jour, 98 % de nos ventes de Suzuki sont réalisées auprès des particuliers.

Fiat
Je reste optimiste pour les marques du groupe Fiat, ce dernier ayant toujours réussi à rebondir. Sur le plan technologique comme sur celui du design, il a toujours été à la pointe. Fiat va se relancer, avec notamment les déclinaisons de la Fiat 500. Et il y a un plan produits assez conséquent qui va sortir chez Alfa Romeo dans les prochaines années, même s’il se fait un peu attendre (voir aussi p. 24).

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