Marché 2010 : connaît pas la crise ?
Petit résumé des épisodes précédents : après avoir longtemps stagné aux alentours des 9 000 VN annuels (depuis l’instauration de l’immatriculation en 92), la “VSP” trouve un nouveau souffle à partir de 2003. Pendant les cinq années qui suivent, les ventes de mini-voitures décollent, passant de 9 547 unités en 2003 à 14 609 en 2008. Un hasard ? Sans doute pas, même si les raisons de cette sérieuse embellie (+ 53 %) ne sont pas réellement celles que l’on imagine. Plus que les retraits de permis, qui préfèrent louer (ce qui, certes, fait vendre quelques centaines de “minis” aux professionnels de la location), c’est avant tout les difficultés croissantes d’obtention du “carton rose” qui ont fait le lit de la VSP. Pour autant, il ne faut pas croire cette niche de marché imperméable au contexte économique. Compte tenu des petites séries, les prix pratiqués en font un achat coûteux, qui ne s’adresse pas à tout le monde, du moins en neuf. De plus, une partie des clients attitrés de la VSP présentent un profil qui les rend parfois difficiles à financer (personnes âgées, revenus modestes…). Et nul n’ignore la frilosité actuelle d’une bonne part des organismes prêteurs…
Un glissement du mix
Bref, d’évidence, le marché de la mini-voiture a depuis deux ans, crise aidant, la vie moins belle qu’elle l’a eue pendant la première moitié de la décennie. Un constat qui est, en outre, partagé par l’ensemble des professionnels, confronté à la précarité croissante d’une part de la clientèle. Des faits corroborés par l’ensemble des constructeurs, qui soulignent le glissement de leur mix des ventes vers le milieu de leurs gammes. En effet, pendant des années, chacun se plaisait à souligner la très nette polarisation des ventes autour des seuls haut de gamme, qui représentaient jusqu’à 95 % des commandes. Rien ne semblait trop beau pour les clients VSP, désireux de se tourner vers un véhicule “tout confort”. Quant aux bas de gamme, affichés sous la barre psychologique des 10 000 euros, ils étaient tout bonnement inexistants en termes de volume !
Fini le “tout haut de gamme” Aujourd’hui, chacun s’accorde à dire que le cœur de marché a glissé d’environ 2 000 euros vers le bas, de 13 000 / 14 000 euros à 11 000 / 12 000 euros. A titre d’exemple, Microcar aura réalisé 11 % de ses ventes globales avec son bas de gamme MGo S… Autant de signes qui incitent certains à reviser leur positionnement prix. A l’instar de Bellier, avec une Jade Urban 1 000 euros moins chère que l’Alto et mieux équipée ou Ligier et Microcar qui proposent le moteur “DCI”, plus silencieux désormais, à prix moyen dans leurs gammes Ixo et MGo. Ou JDM, qui maintient vaille que vaille son ancienne Abaca à côté d’une Aloes plus cossue… Pour autant, le volume global du marché est resté à un niveau élevé. Avec 13 488 immatriculations, la baisse n’atteint que 2,1 %, et le cru 2010 figure tout de même parmi les meilleures années depuis l’immatriculation, juste derrière 2008… et 2009 ! Dans le détail, les fortunes auront été pour le moins diverses. Rappelons tout d’abord sur le front économique deux évènements marquants parmi les constructeurs, avec la reprise pratiquement coup sur coup de Bellier et JDM. Les difficultés récentes des deux firmes n’étaient un secret pour personne. Bellier souffrait d’un modèle mal né, la Jade, en partie sous-traité en Chine et mal mis au point à son lancement. Les ventes entamaient une baisse franche, quand l’entreprise vendéenne a été rachetée par la holding Neuvessel en septembre. De la sorte, Bellier a sauvé son année avec une force de vente renforcée et une auto en voie d’évolution rapide dès le dernier trimestre : 304 véhicules sur l’année, soit - 8,7 %. Pour JDM, le problème était lié à la vente de l’entreprise par son fondateur, Jacques Forest. Après de nombreux contacts infructueux, il aura fallu attendre octobre pour voir BGI, déjà propriétaire d’Heuliez reprendre l’affaire, avant de déménager dernièrement la production sur le site de ce dernier, à Cerizay. JDM traversait depuis trois ans une passe difficile, liée, là aussi, à un produit lancé trop tôt (l’Aloes), puis d’un sous-investissement chronique au niveau industriel. De fait, après un record en 2008 (1 140 immatriculations), la marque a connu deux baisses successives de 20 %, pour clore 2010 avec seulement 725 véhicules, son plus bas niveau depuis 2002.
Chatenet : le grand vainqueur de 2010 !
A contrario, parmi les petits constructeurs, on note l’impressionnant parcours de Chatenet. Ce dernier connaît un succès sans précédent depuis le printemps 2009, date du lancement de sa CH26, qui plaît beaucoup. Dès octobre 2009, la marque limousine a doublé JDM, son rival historique. 2010 a confirmé cette belle réussite : avec 1 095 véhicules immatriculés, Chatenet a largement crevé le plafond de ses réussites précédentes, et détient à présent 8 % des ventes en France. A une moindre échelle, l’italien Casalini semble parvenu à faire un retour durable dans notre pays. Après avoir vendu des VSP chez nous dans les années 70 et 80 (sous la marque Lambretta Willam), le constructeur de Piacenza s’était replié sur son marché intérieur, avant de se relancer fin 2008. En totalisant 285 pièces l’an passé, Casalini s’approche des volumes d’un Bellier et signe une jolie progression de 48,4 %, bien aidée par une gamme assez large, comprenant trois modèles, dont un camion d’aspect moderne (Kerry) et un pick-up sans équivalent ailleurs. 2010 aura aussi vu le retour d’un autre italien, Grecav. La marque s’était faite connaître chez nous entre 2000 et 2006, en commercialisant l’Eke, une élégante mini dont la principale originalité était sa coque, intégralement réalisée en aluminium, à l’instar d’une Audi A8 ou A2 ! Vendue à un millier d’exemplaires, elle a pourtant vu ses ventes baisser rapidement, essentiellement par la faute d’une politique commerciale incertaine et d’un format trop petit, à l’époque ou ses concurrentes françaises commençaient à grandir, sur l’exemple de l’Aixam 500.4 ou de la Chatenet Barooder, les premiers modèles “grands gabarits” du marché. En février dernier, la marque a fait son retour, avec une évolution agrandie et restylée de son précédent modèle, la Sonique. Toujours en aluminium, elle est diffusée en France par VSP France, un importateur basé près de Limoges, auprès du réseau Distinxion (professionnels du VO automobile) mais aussi des concessionnaires traditionnels de la “sans permis”. Avec 103 immatriculations en 2010, la petite Grecav doit encore trouver son rythme de croisière, sur un marché qui reste le plus concurrentiel d’Europe.
Aixam : pas d’essoufflement
Du côté des grands constructeurs, la situation est aussi contrastée. Une chose est sûre : Aixam reste indiscutablement la marque numéro 1, pesant à elle seule 36,6 % du marché. Dans l’absolu, un tel score reste inférieur au zénith absolu de la marque, qui a dépassé les 41 % en 2004 et 2005, suite notamment au lancement de la série “A700”, qui avait rencontré un franc succès. Pour autant, le savoyard a progressé en termes de parts de marché, après une année 2009 faiblarde sur ce plan (35,8 %). Comme toujours, la marque a joué jusqu’au bout la carte du secret absolu, se contentant d’un très léger restylage de sa grande Crossline en mai dernier, qui faisait dire à certains qu’on ne verrait pas de vraie nouveauté cette année chez Aixam. Erreur : à l’occasion du Mondial d’octobre, la gamme “Impulsion” a été dévoilée ! Sans révolutionner les codes du marché, les nouvelles City et Crossline semblent avoir reçu un accueil favorable de la part du réseau. Pour autant, ce lancement n’a eu qu’un impact limité sur les ventes calendaires d’Aixam, malgré un mois de novembre exceptionnel (637 véhicules). Une preuve supplémentaire que l’implantation de la marque est d’une solidité toute particulière : même si le secret était bien gardé, les ventes sont restées remarquablement constantes toute l’année. Un mot au sujet de Mega : dédiée depuis 2003 aux utilitaires “quadricycles”, elle entre petit à petit dans les mœurs. Avec 419 véhicules, le deuxième nom d’Aixam a légèrement amélioré ses résultats de 2009 (411 pièces) et s’impose plus que jamais comme la première marque de camions sans permis. Dans le cas de DrivePlanet, l’année a été globalement moins florissante. Même si l’union de Ligier et Microcar constitue toujours le groupe numéro 1 du quadricycle (40,4 % du marché contre 39,7 pour Aixam-Mega), les ventes des deux marques se sont tassées sensiblement. A cela, rien d’étonnant : Ligier a renouvelé sa gamme en milieu d’année, en lançant son Ixo en juin. De fait, le premier semestre a logiquement été assez faible, avec une gamme X-Too en fin de vie, dont il fallait écouler les derniers exemplaires.
Ligier : une année de transition
Dans l’absolu, les 2 711 Ligier immatriculées représentent une baisse de 16 %, mais il faudra attendre cette année pour juger pleinement du potentiel commercial de l’Ixo, dont le démarrage a été un peu plus lent que prévu. Cela dit, Ligier a clos son année à un niveau de vente qui reste plutôt élevé, bien au-dessus de celui qui prévalait au lancement de la X-Too fin 2004. L’auvergnat en plein renouvellement, son allié Microcar a créé la surprise, en le doublant sur le fil, avec 2 739 véhicules ! Le vendéen est donc revenu à la deuxième place du marché, un évènement qui ne s’était plus produit depuis 2005. Un résultat inattendu, qui masque malgré tout des ventes en baisse de 7,7 %. Restylée à la rentrée dernière, la MGo est repartie à la hausse en octobre et novembre, mais a connu un coup de frein passager sur décembre (seulement 165 véhicules).
2011 s’annonce féroce…
Avec tous ces éléments en main, il reste bien difficile de dire de quoi 2011 sera fait. En effet, pratiquement d’un mois sur l’autre, le marché de la VSP aura fait le yo-yo l’an passé, prouvant une fois de plus une certaine sensibilité de la clientèle à un contexte économique toujours incertain. En tout cas, la bataille promet d’être passionnante, entre les deux “grands” du secteur (Aixam-Mega et DrivePlanet), qui ont renouvelé leurs gammes (ce dernier lançant en outre la Dué “low price” dont nous vous parlerons sous peu), et les “petits” qui abordent presque tous l’année avec un dynamisme inattendu, tant sur le plan produit (Chatenet) qu’économique (Bellier et JDM). Que le(s) meilleur(s) gagne(nt)…
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