Une ontologie Premium
Face à la crise
Bien que la crise mondiale soit désormais une trop fidèle toile de fond, quelques signaux laissent parfois augurer de jours meilleurs. Sans grandes certitudes, certes… Cependant, pour la première fois de l'année, Mercedes-Benz Cars a affiché en octobre une progression de ses ventes par rapport à la période de référence 2008 : + 4,1 % à 97 700 unités. Mercedes-Benz a vu ses ventes augmenter de 7,2 % (88 400 véhicules) quand smart déplorait un fort recul de 17,9 % (9 300 Fortwo). D'un point de vue géographique, ce frémissement a été porté par l'Amérique du Nord, notamment les USA (+ 9,4 %), et surtout l'Asie (+ 34 % dont un spectaculaire + 83,6 % sur le périmètre Chine&Hong Kong). "Nous estimons que cette tendance positive se confirmera dans les mois à venir et nous pensons que nos ventes du dernier trimestre seront supérieures à celles du dernier trimestre 2008", a pronostiqué Joachim Schmidt, responsable des ventes et du marketing de Mercedes-Benz Cars. Toutefois, depuis le début de l'année, le groupe n'échappe pas à la règle récessive et affiche un retrait de ses immatriculations de 14 % au cumul des 10 mois. Retrait de 14 % pour Mercedes-Benz à 826 000 unités et de 14,2 % pour smart à 97 300 véhicules. Le recul s'avère naturellement sévère aux Etats-Unis (- 21,6 %), en Europe de l'Ouest (- 15,6 %) où les programmes d'aides gouvernementaux favorisent surtout les petits modèles. La principale satisfaction vient de la zone Asie-Pacifique avec une progression de 3,2 %, malgré de mauvaises performances sur un marché japonais en berne (- 27,7 %). Les ventes progressent fortement en Chine (+ 47,9 % au cumul des 10 mois, à 53 300 unités, avec des prévisions sur l'exercice au-delà de + 50 %), pays qui est devenu le premier marché de la Classe S (1 100 livraisons sur le seul mois d'octobre). Pour la marque smart, le destin a fait -momentanément - volte-face aux Etats-Unis. Initialement lancée en fanfare via le groupe Penske Automotive, la marque subit directement la crise et le retour à la normale du prix du gallon. Malgré des efforts déployés sur le front du financement et des modalités de réservation, David Schembri, président de smart USA, reconnaît avoir fait face à un très grand nombre d'annulations de commandes. D'une manière générale, si la direction de Daimler affirme assister à un léger redressement des marchés, elle n'en reste pas moins prudente, annonçant encore deux années difficiles. "Deux années difficiles où il va falloir tenir, mais aussi créer les conditions technologiques de l'automobile de demain. Ce seront aussi les conditions d'une croissance à venir", nous confiaient récemment à Francfort plusieurs dirigeants, avant d'ajouter : "En effet, la crise économique à l'échelle mondiale est d'envergure et cela se télescope avec la nécessité de réinventer l'automobile sur un mode durable. Une bonne gestion financière et l'innovation feront la différence". Toujours dans une optique de prudence, le groupe vient d'annoncer qu'il n'excluait pas d'avoir encore recours au chômage partiel une grande partie de l'année 2010 (cette mesure avait déjà été validée pour les sites produisant des camions). En vigueur depuis l'automne 2008, le chômage partiel touche actuellement 27 000 salariés du groupe qui en compte 273 000, dont 168 000 en Allemagne. "Nous pouvons nous mettre au chômage partiel pendant 24 mois sans problème", a même indiqué Bodo Uebber dans les colonnes du Financial Times Deutschland. Le board du groupe estime disposer des bonnes cartes pour maintenir l'emploi et traverser la zone de turbulences menant à la reprise : "Nous avions initié un plan de restructuration il y a déjà plus de trois ans et cela nous aide aujourd'hui, rendant les choses moins abruptes". En outre, si l'épisode Chrysler a pu plomber les comptes, le groupe s'est débarrassé du fardeau. En 2009, un programme d'économies portant sur 4 milliards d'euros a été déployé et le board pense qu'il existe encore un potentiel de réduction des coûts, "notamment par le biais de l'optimisation des process et de la distribution". En revanche, les budgets R&D et développement produits n'ont pas été revus à la baisse.
Nouvelle géométrie pour le portefeuille produits ?
Profondément ancré dans le haut de gamme, le groupe confirme cette orientation - les lancements pour l'heure réussis des Classe E et S en témoignent - et vient même d'officialiser son incursion sur la niche des super-cars. Un projet en gestation depuis quelques années comme nous l'indiquait à Francfort Volker Mornhiveg, le président d'AMG : "Depuis 2000, Mercedes et AMG travaillent dans une même société et depuis 2005, AMG est devenue une filiale à 100 % de Mercedes. Avec un positionnement clair dans le portefeuille : AMG est la marque haute performance du groupe. Dès 2006, les directions se sont réunies pour mener une analyse stratégique et envisager la configuration d'AMG en 2010. Il a été décidé de développer un premier produit pour 2010 et dès décembre 2006, nous avons soumis un concept au directoire qui a ensuite validé la proposition", avant d'ajouter : "Avec ce modèle, l'objectif est clairement d'entrer sur le segment des véhicules super sport, car Mercedes n'y était pas présent. Or Mercedes et AMG ont toute légitimité pour y figurer. Nous avons fait un travail de benchmark avec Ferrari, Aston Martin, la Porsche 911 Turbo et l'Audi R8 en version V10". Cherchant le juste équilibre entre exclusivité et rentabilité, ce qui implique une production annuelle de 5 000 unités, AMG sera déployée aux Etats-Unis, en Allemagne, au Japon et sur tous les pays émergents naturellement. Par ailleurs, la marque Maybach semble moins solidement accrochée sur les cimaises du grand luxe. Deux solutions sont actuellement à l'étude : soit l'arrêt pur et simple de la marque, soit un nouveau départ avec des motorisations électriques, solution déjà programmée pour AMG en petite série à l'horizon 2013. Bref, si le groupe maintient son ADN Premium, il doit aussi réfléchir à l'élargissement de sa gamme de petites et moyennes voitures. Pour le label étoilé, Reinhard Lyhs, président de Mercedes-Benz France, nous confirme les dires de Dieter Zetsche, président-directeur général de Daimler AG, en réaffirmant que l'entrée de gamme de la marque restera la Classe A, dans sa nature actuelle. Toutefois, dans le périmètre couvert par les Classe A et B, quatre modèles seront disponibles en 2012. Pour les petites voitures, smart reste la réponse du groupe et son adéquation avec les futurs enjeux de mobilité urbaine sera encore renforcée par une motorisation électrique. Si le modèle rencontre enfin le succès, plusieurs questions restent en suspens : en tant que telle, la marque est-elle viable ? La carrosserie unique n'est-elle pas rédhibitoire, surtout face à une concurrence étoffée ? La stratégie de pricing est-elle adaptée à l'ouverture de nouveaux marchés ? Si rien ne filtre, Reinhard Lyhs refusant de "commenter les rumeurs", des réponses sont actuellement à l'étude. Et le débat est intense comme en attestent les positions des distributeurs que vous retrouverez dans notre dossier. Rumeurs, le mot est lâché… Si rien n'est officiel, des discussions sont en cours entre Daimler et l'Alliance Renault-Nissan au sujet des petites voitures, des nouvelles énergies et des coûts de distribution. Par ailleurs, sur le front du haut de gamme, Daimler et BMW étudient plusieurs pistes pour élargir leur collaboration.
Nouvelles énergies : une feuille de route très dense
Si la direction de Daimler parie naturellement sur l'amélioration des moteurs thermiques conventionnels, le downsizing et l'extension du label BlueEfficiency, elle mise aussi sur le développement de nouvelles solutions. L'hybridation est arrivée sur la Classe S, en attendant la E et la M, et une version plug-in est d'ores et déjà programmée pour 2012. Au chapitre du véhicule électrique, la Smart fait donc office de fer de lance et les pilotes seront sur les routes dès l'an prochain. Par ailleurs, tout en continuant ses partenariats avec Saft et Tesla, Daimler a créé une société de développement et de production de batteries avec Evonik (Daimler détiendra 90 % du capital et Evonik 10 %). La production ne sera pas seulement destinée au groupe, mais pourra aussi être vendue à d'autres marques. Enfin, le groupe poursuit ses recherches sur la pile à combustible et annonce un test en Allemagne avec des Classe B dès début 2010. Et son directeur de la recherche vient d'annoncer que Daimler compte commercialiser d'ici 2015 une voiture à pile à combustible propulsée à l'hydrogène. Avec Toyota, Renault/Nissan, Ford, General Motors, Honda, Hyundai et Kia, Daimler a d'ailleurs récemment signé un accord pour encourager l'entrée sur le marché des véhicules à pile à combustible, et donc le développement d'une infrastructure pour distribuer de l'hydrogène, d'abord en Allemagne puis aux Etats-Unis, au Japon et en Corée du Sud. Autant de technologies qui doivent garantir la future croissance du groupe. Une croissance qui passe prioritairement par l'Asie, notamment la Chine, le Brésil, les Etats-Unis et la Russie dès que les conditions de marché seront revenues à un niveau normal et à plus long terme, l'Inde.
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