Thierry Gennetay, directeur marketing de Chevrolet
Journal de l'Automobile. Avec 13 333 livraisons sur les neuf premiers mois de l'année, vous avez doublé vos ventes par rapport à l'année passée : quelle est la principale raison de ce succès ?
Thierry Gennetay. Plusieurs raisons expliquent cette progression. Une offre produit renouvelé, mais s'il ne faut en mettre en avant qu'une seule, c'est le renforcement du réseau. Notre réseau est désormais plus établi et plus structuré, notamment grâce à GM et Opel, il convient de le souligner.
JA. A ce propos, juste une parenthèse : l'abracadabrant épisode GM-Opel ne semble pas avoir eu d'effets négatifs sur votre activité, n'est-ce pas ?
TG. Tout d'abord, d'un point de vue opérationnel, ces événements n'ont pas modifié notre manière de travailler et nous avons gardé toute notre autonomie en termes de liquidités. Par ailleurs, du point de vue du client, on parle de GM et cela ne correspond pas à une marque pour lui. Donc les difficultés des derniers mois n'ont pas été préjudiciables pour Chevrolet et ses distributeurs français.
JA. Vous avez d'ores et déjà battu votre record de ventes datant de 1999, sous identité Daewoo (12 115 unités), et vous revoyez forcément vos objectifs à la hausse. Quel est votre résultat-cible aujourd'hui ?
TG. Nous avons atteint et même dépassé nos objectifs initiaux. Le cap des 15 000 unités est dépassé, mais nous ne donnons pas de chiffres plus précis. D'ici la fin de l'année, nous allons intensifier nos actions sur Matiz, Aveo et Cruze, tout en essayant de surfer sur la fin de la prime à la casse dans sa configuration actuelle.
JA. Avec cette progression spectaculaire, quel est le poids de Chevrolet France en Europe ?
TG. Dans la zone Europe au sens large où nous avons dépassé le demi-million de véhicules vendus, la Russie demeure le premier marché de la marque, malgré la crise sévère qui y sévit. En Europe occidentale, l'Italie est un fort moteur, avec près de 60 000 ventes, dont plus de 70 % en GPL. D'ailleurs, nous transformons nos véhicules en Italie. L'Allemagne figure devant la France, avec 30 000 ventes, mais l'écart est somme toute assez réduit. La France se trouve au même niveau que le Royaume-Uni et l'Espagne.
JA. Du point de vue de l'animation commerciale, notamment les prix d'accroche, vous pouvez difficilement aller plus loin, n'est-ce pas ?
TG. En termes de promotions, nous pouvons difficilement faire mieux. Mais Chevrolet est une marque jeune et il est nécessaire que nous profitions de certains événements du cycle de vie de nos produits, au-delà même de la promotion commerciale en tant que telle. Il est important de mettre en perspective la problématique qui s'offre à nous. Nous avons un problème de notoriété, mais aussi un décalage sur les notions de familiarité et d'identité. En effet, dans l'esprit des gens, Chevrolet, c'est une voiture américaine, grande, qui pollue, qui consomme donc beaucoup et qui de surcroît est chère ! Pour un homme de marketing, c'est un véritable challenge ! Donc, il y avait une volonté de réaliser un coup événementiel avec un modèle à 4 990 euros. En somme, cela dépasse la campagne de fin de vie de la Matiz et la dimension financière : l'idée était bel et bien de créer un événement. Il a fallu se battre auprès de la maison mère, mais les premiers résultats montrent que c'est un succès. Ça fait un buzz énorme ! Et des volumes non négligeables.
JA. A ce tarif, quelle marge peut-il rester au final pour les distributeurs ?
TG. La marge reste tout à fait correcte, car nous avons bien entendu décidé d'accompagner les concessionnaires. Nous avons pris à notre charge les efforts supplémentaires à fournir pour parvenir à ce prix de 4 990 euros. D'une manière générale, le réseau adhère vraiment à notre stratégie marketing et à notre politique commerciale. Pour une marque comme la nôtre, évoluant dans un contexte très majoritairement multimarque, il est toujours difficile de parler de rentabilité des concessionnaires, mais on sait que nous contribuons désormais à leur rentabilité deux fois plus qu'avant.
JA. Sous un angle plus général, comment rétablir la notion de juste prix et enrayer la destruction de valeur sur les entrées de gamme des petits véhicules ?
TG. Il est vrai que sur les mini et les petites voitures, la différence entre le prix promotionnel et le tarif catalogue est très significative. En ce qui nous concerne, il était important de placer une icône comme Chevrolet sur le terrain du pouvoir d'achat. Et il y a plusieurs entrées par rapport au pouvoir d'achat : aujourd'hui, c'est le prix, d'autant que les clients sont très réceptifs à ce message, mais demain, cela peut être tout autre chose, comme un excellent rapport prix-équipements ou une Camaro à 30 000 euros. Et par rapport au décalage que j'évoquais à l'instant entre la perception de la marque et ce qu'elle est réellement dans les showrooms, il s'agit d'un territoire de communication qui est stratégique pour nous. D'autant que nous sommes les seuls à l'utiliser dans le secteur. Nous allons continuer à intensifier et à diversifier nos efforts dans ce sens.
JA. Quelle est la part du GPL dans vos ventes en France ?
TG. A nos yeux, le GPL est un très bon modèle, largement soutenu par l'Etat via un bonus de 2 000 euros. Sur l'Aveo, la version GPLi représente par exemple la moitié des ventes. Et c'est un modèle très générateur de marge.
JA. La Cruze participe-t-elle activement à votre dynamisme commercial ?
TG. Tout à fait, en quatre mois, nous avions déjà atteint notre objectif de ventes initial. A fin septembre, nous affichions 680 ventes pour plus de 1 000 commandes. C'est donc un succès et surtout, avec ce modèle, notre taux de conquête est considérable : 70 % des clients viennent d'autres marques, 10 % sont des primo-acheteurs et seulement 20 % sont des clients Chevrolet. Ce sont principalement des clients issus du segment D, avec des reprises de voitures familiales à la clé.
JA. Quel est le prix moyen d'une Cruze vendue en France ?
TG. Nous réalisons 40 % de nos ventes à 21 000 euros, avec le 150 ch, et 35 % avec la version à 19 400 euros. Le Diesel représente donc 75 % des ventes et nous avons été étonnés par le poids de l'essence dans le mix, plus élevé que prévu.
JA. Revenons un instant au réseau : quels sont vos objectifs de développement ?
TG. Pour parfaire notre taux de couverture, il nous manque encore 6 ou 7 %, mais ce n'est pas très significatif ni très urgent. Nous sommes satisfaits de notre réseau actuel et nous sommes désormais davantage orientés vers la dimension de la qualité. On doit optimiser la performance de nos partenaires. C'est la priorité, bien plus que le nombre.
JA. De gros groupes, Chabrier, Fiolet, Knoch, Lempereur, PGA, Priod, Sipa etc., vous ont rejoint, était-ce une démarche délibérée ?
TG. Cela ne renvoie pas spécifiquement à une stratégie de développement. Nous sommes ravis de les compter parmi nos partenaires, bien entendu, et nous avons besoin d'eux, mais nous parions aussi sur des concessionnaires de taille beaucoup plus modeste. Des partenaires comme ceux de La Rochelle ou de Roanne en sont le meilleur exemple. En fait, sous l'angle du développement réseau, nous ne sommes pas dogmatiques. Nous fonctionnons en mode projet, avec une prime à la volonté et au dynamisme et notre directeur commercial croit beaucoup aux petites affaires qui ont envie de grandir avec nous. Or nous sommes dans une perspective de croissance, avec notamment de nombreux lancements programmés d'ici trois ans. Grands groupes ou petites affaires, la volonté d'entreprendre et de se développer mutuellement est ce qui nous importe.
JA. Vos ventes à société restent marginales, mais comment abordez-vous ce créneau néanmoins important ?
TG. Nos ventes sont effectivement marginales sur ce canal que nous abordons principalement avec l'offre GPL et l'Aveo. Notre stratégie reste clairement axée sur les particuliers.
JA. Au chapitre du financement, quelles sont vos priorités ?
TG. Nous travaillons beaucoup avec GMAC, notre partenaire privilégié, et nous axons nos offres sur des mensualités plutôt que des taux car c'est tout simplement beaucoup plus approprié pour notre clientèle.
JA. Quel positionnement réservez-vous à la Spark qui sera prochainement lancée dans l'Hexagone ?
TG. Nous y travaillons. Le défi est stimulant car ce segment est en pleine évolution, avec une concurrence fournie. Cela permet de proposer des voitures qui ne sont plus aussi étriquées que par le passé et le champ des possibles devient beaucoup plus vaste. Nous en reparlerons en décembre, mais nous comptons notamment nous différencier par le biais des prestations.
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