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Constructeurs

Steve Faulkner, président de Ssangyong France et de Daihatsu France

Publié le 23 avril 2010

Par David Paques
10 min de lecture
"Il faut capitaliser sur nos atouts"Si Ssangyong et Daihatsu diffèrent totalement en termes capitalistique ou commercial, les deux marques sont distribuées...
...en France par le groupe Frey. Tentant de faire oublier les difficultés passagères des deux constructeurs, Steve Faulkner, le président français des deux marques, met en exergue les possibilités qui s'ouvrent à leurs réseaux et leur trouve même des points de convergence.

Ssangyong

Journal de l'Automobile. Pouvez-vous nous éclairer sur la situation actuelle du constructeur ?
Steve Faulkner. Ssangyong a été mis sous administration judiciaire en février 2009, puis en est sortie en septembre dernier, au terme d'un plan de redressement drastique. Baisse des effectifs, réduction des coûts et modernisation de l'outil industriel, via la mise en place de la ligne de production du futur C200, nous permettent de fonctionner aujourd'hui comme n'importe quelle entreprise. Néanmoins, à moyen terme, il reste souhaitable que le constructeur s'adosse à un nouvel investisseur ou un constructeur. Et, en la matière, si aucun calendrier n'est arrêté, ni aucune alternative favorisée, nous nous orientons vers une solution coréo-coréenne. (N.D.L.R. : Samsung Electronics et Hyundai se sont un temps portés candidats).

JA. Côté vente, la marque enchaîne des années compliquées. Quelles ont été exactement vos ventes l'an dernier et quelles sont vos prévisions pour 2010 ?
SF. En 2009, nous avons immatriculé 548 véhicules neufs. En 2010, nous prévoyons 1 000 immatriculations, notamment grâce à l'arrivée du C200 en fin d'année. Aujourd'hui, nous voyons un frémissement sur les ventes de SUV et, parallèlement, nous observons que les petits véhicules s'essoufflent. Pour notre part, les commandes clients de Ssangyong sont en hausse de 10 % à la fin du premier trimestre 2010, par rapport à fin mars 2009. La flèche va dans le bon sens et c'est plutôt encourageant.

JA. Vous nous disiez justement l'an dernier qu'après avoir perdu de l'argent en 2009, l'objectif serait d'être au point mort en 2010. Est-ce que ce sera le cas ?
SF. Ssangyong France ne sera pas au point mort en 2010 car nous continuons de perdre de l'argent. En revanche, nos pertes financières se réduisent fortement et j'ai bon espoir qu'avec l'arrivée du C200 en fin d'année, nous terminions 2010 proches de l'équilibre.

JA. Comment percevez-vous cela et comment le réseau réagit-il ?
SF. Soutenir notre réseau reste notre politique. Nous avons mis en place une politique commerciale qui garantit des marges restant intéressantes pour nos distributeurs, à savoir environ 2 500 euros en moyenne. Et cela à notre détriment puisque les nôtres en sont d'autant étriquées. Nous restons convaincus que quand cela repartira, il nous faudra nous appuyer sur un réseau fort.

JA. Comment s'est matérialisé votre soutien ?
SF. Il y a trois choses. D'abord, nous offrons une remise importante. Entre le prix public et le prix concessionnaire, il y a une vingtaine de points, avant toute remise. Ensuite, nous avons mis en place un système de financement des stocks qui offre 180 jours de portage gratuits aux distributeurs. Le troisième point, c'est que nous encourageons nos distributeurs à exposer les véhicules dans diverses manifestations, pour aller au plus près du client. Dans ces cas-là, nous prenons en charge une partie des frais (location de surface, logistique…).

JA. Quelle est aujourd'hui la rentabilité moyenne du réseau ?
SF. Il est toujours compliqué d'évoquer la question car 100 % de nos distributeurs sont multimarques. Ce que nous pouvons dire, en revanche, c'est que la baisse des ventes ressentie l'an dernier a pénalisé notre réseau. Le chiffre d'affaires moyen par contrat, qui a atteint 250 000 euros environ l'an dernier, hors pièces de rechange, a subi une baisse d'environ 20 %.

JA. Côté produits, tout le monde attendait le C200 en début d'année. Quand doit-il précisément arriver en concession ?
SF. Il est vrai que le C200 a été un peu retardé à cause des problèmes financiers du constructeur. Mais il arrive. Le constructeur a d'ailleurs arrêté son nom. Le C200 reprendra, en effet, l'appellation Korando, du nom du modèle disparu il y a près de 4 ans. Nous partons effectuer des essais dynamiques en Corée prochainement. Le véhicule entrera en production en juillet pour le marché coréen, puis au mois d'août pour l'export. Nous commercialiserons donc le modèle en France au mois d'octobre, avec l'ambition d'en écouler 300 sur la fin d'année. En année pleine, le potentiel du véhicule est situé entre 1 000 et 1 200 unités. Il représentera alors 60 % de nos ventes.

JA. Le positionnement tarifaire est-il défini ?
SF. Nous sommes actuellement en train d'y travailler. Mais notre ambition est d'être environ 10 % moins cher que nos concurrents directs que sont les Nissan Qashqai, Ford Kuga ou Hyundai ix35. Nous proposerons notre modèle entrée de gamme un peu en dessous des 25 000 euros en 2 roues motrices.

JA. Votre gamme 4X4 sera-t-elle quelque peu élaguée ?
SF. Non. Ssangyong reste une marque de 4X4. Même si, en ce qui concerne le Korando, 70 % du mix se portera sur les versions 2 roues motrices. Le Rexton continue, en outre, à très bien se vendre. Nous allons en écouler entre 250 et 300 cette année. L'arrivée de son successeur est même programmée pour 2013. Le Kyron va, lui aussi, continuer et être remplacé en 2012. Nous pensons en immatriculer 200 cette année. Dans le courant 2013, nous allons même ajouter un modèle à cette offre en commercialisant un petit crossover de 4 m de long.

JA. Quid de vos envies de généraliste et de la 1re berline Ssangyong que l'on nous annonçait pour l'an prochain ?
SF. Le projet de cette berline a été gelé et nous n'avons pas de nouveau calendrier en ce qui la concerne. En revanche, il est prévu que nous commercialisions un MPV sur le segment B en 2014, sur la même plate-forme que le futur Korando. En marge de cela, nous conservons nos ambitions pour le Rodius, qui est une proposition unique sur le marché. Là encore, nous pensons en écouler 200 cette année.

JA. Quels sont les projets et les chantiers sur lesquels le réseau travaillera cette année ?
SF. Il y a deux axes essentiels. D'abord, bien préparer l'arrivée du C200 car c'est un véhicule crucial pour la marque et pour notre réseau. Ensuite, le 2ème rendez-vous de l'année concerne l'après-vente. Nous venons de mutualiser la gestion de l'activité après-vente avec Hyundai et Daihatsu. Ce qui nous permet de mettre en place des opérations commerciales que nous ne pouvions pas faire auparavant. Une fois pour l'été, une autre pour l'hiver, nous allons commercialiser des forfaits après-vente. C'est totalement nouveau pour nous. Et cela est notamment rendu possible par le fait que nous partageons un nombre important de distributeurs avec ces deux constructeurs.

Daihatsu

JA. Au niveau européen, le constructeur avait annoncé un objectif de 100 000 unités à l'horizon 2010, dont 10 000 sur le seul marché français. Estimez-vous que la marque a le potentiel pour y parvenir ?
SF. En 2009, Daihatsu a immatriculé 75 000 véhicules en Europe. Pour ce qui est de la France, nous avons réalisé 1 909 immatriculations. Je ne pense pas que nous soyons en mesure d'écouler 10 000 VN en France. Mais, à moyen terme, je suis convaincu que nous pouvons viser un volume situé entre 2 000 et 4 000 VN par an, même si pour l'heure, 2 000 n'est pas réaliste. En 2010, nous prévoyons de réaliser 1 600 immatriculations. La baisse de volume étant liée à l'arrêt de la Trevis, qui n'est aujourd'hui plus fabriquée.

JA. Vous aviez annoncé un objectif de 2 750 immatriculations en 2009. Vous en avez réalisé 1 909. Pourquoi ?
SF. Cette baisse est globalement due à la chute des ventes du Terios. Nous en avions prévu 600 mais nous en avons écoulé que 150.

JA. Vous avez une gamme avec des produits petits, sympathiques
et bien positionnés, mais les résultats ne sont pas là. Comment l'expliquez-vous ?
SF. Notre problème principal, c'est que tous nos véhicules sont fabriqués au Japon. Certes, c'est pour nous un véritable gage de qualité. Mais aujourd'hui, cela pose un problème parce que, comme tous les constructeurs japonais, nous sommes fortement impactés par le haut niveau du Yen par rapport à l'Euro. Cela nous empêche de placer les véhicules exactement où nous voudrions le faire en terme tarifaire. Ce qui fait que l'an dernier, par exemple, cela ne nous a pas permis de profiter des effets du bonus malus ou de la prime à la casse.

JA. Comment vos distributeurs vivent la situation ?
SF. Notre stratégie est de garder une position tarifaire convenable en attendant des jours meilleurs. Cela implique une forte baisse de nos marges. Il est clair que nous privilégions le réseau à nos dépens, car nous ne pouvons pas savoir où va le Yen. Aujourd'hui, Daihatsu France perd de l'argent. Pour l'heure néanmoins, les pertes sont tout à fait supportables. Quant au réseau, il a donc encore les moyens de travailler. Et j'ai bon espoir que les choses évoluent favorablement. Daihatsu Motors va d'ailleurs commencer à produire hors du Japon. Dès 2012, nous aurons une unité de production en Indonésie qui assemblera des tout nouveaux produits. Ce qui va nous permettre de produire à plus bas prix et donc d'afficher, en Europe, des tarifs qui ne sont pas pollués par le Yen.

JA. Il y a deux ans, les concessionnaires mettaient en relief un vrai déficit en termes de notoriété. Qu'en est-il ?
SF. Clairement, nous souffrons toujours d'un déficit d'image. Pourtant, nous avons des qualités à faire valoir. La fidélité de nos clients par exemple, fortement conditionnée par la fiabilité de nos véhicules. Notre gamme, constituée de petites voitures et donc en phase avec le marché. Puis une vraie identité en terme de design. Nos véhicules sont stylistiquement décalés. Il faut capitaliser sur nos atouts.

JA. Vos concessionnaires réclamaient justement un vrai plan marketing pour tirer profit de ces caractéristiques. Avez-vous des projets en la matière ?
SF. Aujourd'hui, notre communication est avant tout locale. Nous n'avons pas les moyens d'investir dans de vastes campagnes nationales. Une telle démarche ne serait, de toute façon, pas adaptée puisque nous ne couvrons pas entièrement le territoire. Néanmoins, comme chez Ssangyong, notre communication va se diviser en deux. D'abord, le soutien au réseau, qui est notre stratégie historique. Puis, nous allons nous essayer à une communication nationale décalée, sortant des voies historiques du 4X3 et de la pub télé. Les deux marques s'y prêtent bien. Nous sommes actuellement en train d'y travailler avec notre agence. Cela devrait donc se concrétiser rapidement.

JA. De quelle manière ?
SF. Nous avons trois types de clientèle. Celle des grandes villes, où Cuore, Materia et Sirion sont très adaptés. Ensuite, il y a la clientèle basée dans des villes moyennes de province, appréciant des véhicules différents et connaissant bien leur concessionnaire. Puis il y a ceux qui ont besoin de 4X4, comme en Haute-Savoie, où nous sommes plutôt bien placés avec le Terios. Nous travaillons les trois axes et n'en délaissons aucun.

JA. Vos distributeurs ne souffrent-ils justement pas de la concurrence au sein des showrooms multimarques ? Du fait de ce déficit d'image notamment ?
SF. Aujourd'hui, nous avons une vingtaine d'opérateurs monomarques. Notamment dans des petites villes de province. Souvent, ça peut être très intéressant pour nous car le distributeur se dévoue à la marque et les résultats sont forcément satisfaisants.
Je pense que le multimarquisme est autant un atout qu'un désavantage. Cela marche dans les deux sens. Si on a Daihatsu dans un showroom Toyota, nous allons bénéficier du trafic généré par la marque principale. C'est donc une chance. Mais il faut reconnaître que parfois, le distributeur privilégie cette marque principale et ne travaille pas véritablement la nôtre. Dans ce cas, c'est un peu plus problématique. Mais au fond, je pense que le multimarquisme nous offre quand même certaines possibilités. De la même manière, notre marque constitue une opportunité pour les distributeurs. Daihatsu apporte un complément de rentabilité au groupe multimarque.

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