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Constructeurs

Réflexions sur le “cas” Citroën

Publié le 20 février 2004

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
Les C3 et C2, en s'inspirant sans la caricaturer de la 2 CV, ont retrouvé et remis à l'honneur un style Citroën qui s'était perdu en chemin. On ne peut malheureusement pas en dire autant de la C5... Qui aurait misé sur Citroën, au tapis vert des hasards de l'automobile, il y a quelques...
Les C3 et C2, en s'inspirant sans la caricaturer de la 2 CV, ont retrouvé et remis à l'honneur un style Citroën qui s'était perdu en chemin. On ne peut malheureusement pas en dire autant de la C5... Qui aurait misé sur Citroën, au tapis vert des hasards de l'automobile, il y a quelques...

...années ? Pratiquement personne sauf, sans doute, ceux qui travaillaient directement au renouveau de la marque. On a d'ailleurs pu se demander, avec quelque raison, s'ils ont "fait exprès" de gagner ou si la victoire leur a souri de guerre lasse, un peu malgré eux. La C3 et la C2 feraient plutôt penser à une stratégie produit bien construite, mais la C5 ne fait penser à rien. Les deux premiers modèles, en effet, ne pourraient supporter d'autre logo que les Chevrons ; le troisième s'accommoderait bien de tout ce qui est insipide, neutre ou fadasse, par exemple le logo d'un constructeur germano-américain spécialisé dans les grandes berlines "no style". Quoi qu'il en soit, Citroën a finalement retrouvé, après une éclipse pour cause de déshérence qui a duré des décennies, sa place et sans doute une image sur le marché européen. Et maintenant ? Tout est enfin possible, mais rien n'est encore gagné. Ce qui n'ôte rien au mérite de qui a su retrouver le droit chemin.

D'abord, le design

Cette fois, reconnaissons-le, l'héritage a été recueilli et exploité avec beaucoup de talent. Ce qui caractérisait avant tout une Citroën dans les années de son apogée, et bien qu'on ait parlé des suspensions hydropneumatiques comme si tous les consommateurs étaient insensibles au mal de mer, c'était bien l'originalité de son design : la mémoire collective de l'automobile (et celle de ses utilisateurs) en est imprégnée. Les C3 et C2 ont retrouvé et remis à l'honneur un style Citroën qui s'était perdu chemin (mal)faisant. Après avoir soufflé le froid, PSA a donc soufflé le chaud, avec bonheur : le piège consistant à reproduire, en les exaspérant jusqu'à la caricature, des éléments de style spécifiques d'un modèle précédent (vous avez dit "New Beetle" ?) a été évité. Les deux modèles chevronnés C3 et C2 ont plusieurs traits qui font penser aux 2CV et Diane, mais ils ne reproduisent (et ne caricaturent) ni l'une ni l'autre. Comme chez les humains, on voit bien que les jeunes sont jeunes et que les vieux sont vieux. Les racines retrouvées ont par conséquent aboli la banalité qui affligeait la marque, sans nostalgie "rétro". Applaudissons une fois pour toutes ce beau résultat, et tournons-nous vers l'avenir, puisqu'il n'y a que cela qui compte.

Enracinés, mais… vers l'avenir

Citroën se trouve à présent dans une situation singulière et paradoxale : son image de marque est susceptible de se renforcer en se recentrant sur des qualités traditionnelles, alors même que l'image de la plupart des autres marques subit les premiers assauts de la nouvelle distribution automobile (Volkswagen, dont nous avons parlé récemment, en sait peut-être quelque chose). C'est, à n'en pas douter, le moment d'en profiter. Mais attention : il serait imprudent d'oublier que la vérité du commerce automobile d'aujourd'hui est, pour l'essentiel, concentrée dans le binôme produit/prix. Quand un modèle est réussi, et pourvu que son prix après négociation soit appétissant, il a du succès, quelle que soit sa marque. Il ne faut donc pas se tromper de priorité : il est certes important de (re)construire l'image de marque que l'on a perdue, mais celle-ci ne doit pas devenir un carcan qui empêche de créer des modèles attendus par le marché. Le risque principal est ici représenté par cette vue de l'esprit métaphysique qu'est le "family feeling", selon lequel tous les modèles d'une même marque doivent avoir des éléments communs qui permettent de les attribuer sans hésiter à icelle. C'est en suivant cette voie que l'on perd des parts de marché, des volumes de ventes et des bénéfices. Il est par ailleurs amusant de constater que la tradition Citroën était fort éloignée de ce concept si théorique. Une DS ne ressemblait pas plus à une 2CV que celle-ci ne ressemblait à une Ami 6. Pourtant, il ne venait à l'esprit de personne d'attribuer l'un quelconque de ces modèles à une marque concurrente. Il y avait un style Citroën ; pas une uniformité artificiellement créée. Et si le prochain haut de gamme rappelait intelligemment une DS ?

Ernest Ferrari

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