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Constructeurs

Pour sortir Seat de l’ornière

Publié le 8 septembre 2006

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
En tentant de transformer Seat, marque populaire espagnole, en une marque sportive, le groupe Volkswagen a fait fausse route. Il faut se servir de son ADN hispano-germanique pour lui redonner une personnalité crédible, populaire mais moderne. Avouons-le sans vergogne : nous...
En tentant de transformer Seat, marque populaire espagnole, en une marque sportive, le groupe Volkswagen a fait fausse route. Il faut se servir de son ADN hispano-germanique pour lui redonner une personnalité crédible, populaire mais moderne. Avouons-le sans vergogne : nous...

...avons un faible pour Seat. Un faible "historique", qui remonte à notre carrière Fiat (1981-1993), au beau milieu de laquelle nous sommes entrés en contact avec quelques dirigeants de la marque espagnole. Seat quittait alors le giron de Fiat, et passait accord avec "los Alemanos", lisez : VAG. Il restait à négocier quelques accords commerciaux concernant la Seat 147 (Fiat 127) et les pièces de rechange, négociations auxquelles nous eûmes l'heur de participer, aux côtés du directeur commercial de Fiat Auto. Les dirigeants de Seat nous accueillirent avec sympathie, bien que la rupture ne fût pas vraiment de leur fait, et nous présentèrent la première Ibiza, avant que la presse ne l'ait vue. Depuis lors, nous avons toujours un sens de fraternité latine pour l'Espagne (il y a quelque chose entre nous depuis Sertorius, sans doute), auquel s'est ajoutée une profonde estime pour la marque. Mais y a-t-il, au-delà de nos sentiments personnels, un avenir pour Seat, ou faut-il considérer qu'à l'instar d'autres marques marginales, elle est condamnée à disparaître ?

L'ornière

Nous ne savons pas ce que pense le Vorstand de VAG en ce qui concerne Seat. Des rumeurs de mise en vente de la marque ont circulé mais, outre le fait que la mode des acquisitions de marques est passée, on admettra qu'il y a mieux à faire que de brader un actif du bilan. Il n'y a pas de malédiction Seat : la stagnation des ventes naît d'une erreur stratégique incompréhensible et d'une présomption impardonnable. L'erreur stratégique a consisté en la définition d'un positionnement irréalisable parce qu'irréaliste. Seat, marque populaire espagnole (aucun dénigrement dans le choix des termes : Renault et Fiat sont des marques populaires… comme Volkswagen), allait se transformer en une marque sportive, rivale d'Alfa Romeo, sans doute par miracle, parce qu'il n'y avait aucune raison pour que cela se produisit : il n'y a pas de marché, en Europe, pour deux Alfa Romeo, et il n'est même pas certain qu'il y en ait pour une seule, le terrain traditionnel de la marque ayant été occupé par d'autres depuis longtemps. De surcroît, il ne suffit pas de s'habiller comme son voisin pour aller s'installer chez lui. Quant à la présomption, elle est partie d'un véritable avantage : le fait de doter les modèles Seat d'une mécanique allemande est, en soi, un élément positif. Un avantage n'est cependant pas une panacée et il faut savoir le vendre sans heurter les susceptibilités des consommateurs, ni celles des collaborateurs de la marque. Seat est dans une ornière, c'est de là qu'il faut qu'elle sorte.

Comment redémarrer ?

Nous n'avons de leçons à donner à personne mais le bon sens appartenant à tous, c'est sur lui que nous allons fonder notre raisonnement. Repositionner la marque, c'est tout d'abord retrouver ses racines. C'est ensuite les adapter à la réalité actuelle : Seat n'est plus la vieille Seat. C'est enfin définir un plan produit différent de l'actuel. Le reste, comme l'intendance pour le Général, suivra. Il faudra cependant vivre pendant la transition d'une gamme à l'autre, c'est-à-dire pendant au moins cinq ans si l'on suppose que les modèles actuellement "dans les cartons" du constructeur peuvent être modifiés sans retarder les programmes. Seat doit donc redevenir une marque populaire moderne. Il lui faut pour cela trouver un segment de clientèle non saturé, voire émergent (comme cela s'est produit pour Logan). Il lui faut aussi retrouver une personnalité spécifique, crédible et sans complexes. La chance de Seat réside, de ce point de vue, dans le fait qu'elle peut se présenter comme la seule marque hispano-germanique du marché. Attention : il ne s'agit pas d'une incantation mais d'un programme. Les deux pays concernés (l'Espagne et l'Allemagne) ont suffisamment de complémentarités positives pour acquérir un avantage compétitif durable, mais il y a toute une argumentation à construire autour d'une gamme de modèles à inventer. Pour y parvenir, il sera nécessaire d'abandonner la stricte séparation des stéréotypes nationaux habituels et caractériser la marque en alliant, par exemple la "movida" à la "Zuverlässigkeit". Sans exagérer.


Ernest Ferrari, Consultant


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