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Constructeurs

Les noces de rubis de Honda France

Publié le 4 juin 2004

Par Tanguy Merrien
14 min de lecture
En difficulté ces dernières années avec des ventes passées en dessous des 6 000 immatriculations, Honda, qui célèbre ses 40 ans de présence en France, voit aujourd'hui l'avenir plus sereinement grâce à la diésélisation de sa gamme et la nomination d'un nouveau directeur général. Les résultats...
En difficulté ces dernières années avec des ventes passées en dessous des 6 000 immatriculations, Honda, qui célèbre ses 40 ans de présence en France, voit aujourd'hui l'avenir plus sereinement grâce à la diésélisation de sa gamme et la nomination d'un nouveau directeur général. Les résultats...

...du début d'année lui permettent de croire en un beau redressement et en un avenir plus radieux.





ZOOM

Honda France en quelques dates

  • 1964 : Honda France est officiellement créée
  • 1966 : Lancement en France de la S 800
  • 1980 : Honda France s'installe à Marne-La-Vallée. La même année, les ventes atteignent les 9 598 unités.
  • 1987 : Lancement de la Legend en version berline et coupé.
  • 1997 : Lancement du premier SUV Honda, le CR-V.
  • 1999 : Honda France devient Honda Motor South Europe. Parallèlement, la S 2000 apparaît
  • 2001 : Commercialisation de la Jazz 1.2 l et 1.4 l
  • 2004 : Honda équipe l'Accord de son premier moteur Diesel 100 % maison, le 2.2 l i-CTDi.

  • On associe bien souvent la quarantaine avec la maturité. Si tel est le cas, alors Honda France ne peut que se réjouir de passer ce cap parfois si difficile en célébrant ses 40 années de présence dans l'Hexagone. Quatre décennies qui n'ont pas toujours été forcément souriantes, notamment ces derniers temps, quand les ventes ont vu leur courbe fléchir irrémédiablement pour descendre en dessous de la barre des 6 000 immatriculations.
    Malgré cette inquiétante diminution, Honda France peut espérer voir l'avenir un peu plus sereinement et célébrer dans un doux optimisme les noces de rubis entre le constructeur et la France.
    Fondée en 1948 par Soichiro Honda, la marque attendra seize ans avant d'investir la France. A l'époque, le constructeur s'était fait connaître en tant que fabricant de moteurs montés sur des bicyclettes. Mais il se lance en 1964 dans l'automobile avec la première S 600 présentée au Salon de Paris la même année et en profite pour installer ses premiers bureaux à Boulogne-Billancourt, où travailleront 9 personnes, après avoir fait de même trois ans auparavant en Allemagne et au Benelux. L'année 1964 restera quoi qu'il arrive une année marquante pour le constructeur puisqu'il réalise ses premiers tours de pistes en Formule 1 tandis que la moto devient déjà son domaine réservé quand il remporte le championnat du monde 125 cm3. Dès lors, le championnat du monde, quelle que soit la catégorie (125 cm3, 250 cm3, 500 cm3 ou Moto GP aujourd'hui) restera la plus belle vitrine du motoriste japonais qui récoltera aussi bien les titres de championnat du monde Constructeurs que Pilotes.
    L'apprentissage dans le domaine du quatre roues fut pourtant un peu plus long à se dessiner.
    Cependant, en 1966, la France a le privilège d'assister au lancement de la mythique S 800 dont l'Hexagone sera pratiquement le seul pays d'exportation. Dès le début des années 70, Honda passe le cap des 1 000 VN en France avec une gamme essentiellement composée de N 600 et de N 300. Mais c'est en 1973 que Honda va véritablement connaître son essor au sein de nos frontières. En effet, le constructeur lance sa première Civic, véhicule emblématique de Honda, puisque la petite japonaise connaîtra par la suite six autres générations. La commercialisation de la première Civic 1 200 3 portes ajoutée au Coupé Accord en 1976 va permettre à Honda France de doubler ses ventes en atteignant ainsi les 2 000 immatriculations.
    La croissance du constructeur japonais en France va se voir quelque peu contrariée en 1980 lorsque Valéry Giscard D'Estaing instaure la politique des quotas appliquée à l'encontre des constructeurs japonais (3 % des ventes pour la France jusqu'en 1992). Cependant, Honda France frôle les 10 000 voitures au début de cette décennie (9 598 immatriculations) et en profite pour installer son siège à Marne-la-Vallée, en Seine-et-Marne.





    ZOOM

    Honda, Formule 1 et Grand Prix Moto
    Si 1964 est l'année où Honda France est officiellement créée, elle marquera également le début du motoriste nippon sur les circuits et paddocks du monde entier comme écurie à part entière de Formule 1. Pendant des années, le constructeur s'aguerrira aux côtés des meilleurs que sont les Lotus, Brabham et Ferrari. Mais ce sera dans les années 80 qu'il obtiendra ses lettres de noblesse en sport automobile. Et de quelle façon ! Honda rejoint d'abord l'écurie Williams et ses pilotes Nigel Mansell et Nelson Piquet en 1985, puis Mc Laren dirigée par Ron Dennis en 1988 qui fera cohabiter Alain Prost et Ayrton Senna. Le motoriste nippon remportera grâce à ces deux écuries et ces quatre pilotes d'exception pas moins de six titres consécutifs de champion du monde des constructeurs de 1986 à 1991. L'année 1988 restera en particulier dans les annales puisque l'écurie remportera 15 des 16 Grands Prix du calendrier. L'année suivante, le constructeur annonce son retrait de la compétition avant de faire son retour en 1998 en tant que motoriste de l'écurie BAR. Aujourd'hui, l'écurie BAR-Honda, dont les baquets sont occupés par Jenson Button et Takuma Sato, est revenue au premier plan. En moto, le palmarès Honda est encore plus impressionnant. Au total, 37 titres de champion du monde des Constructeurs dans les trois catégories 125, 250 et 500 cm3, aujourd'hui appelée MotoGP. Les plus grands pilotes de l'histoire ont un jour mené une moto Honda à la victoire : Mike Hailwood, Jim Redman, Freddy Spencer, Eddie Lawson, Wayne Gardner, Loris Capirossi, Valentino Rossi et le roi Mike Doohan, cinq fois champion du monde Pilotes entre 1994 et 1998.

    Le sport automobile, vecteur d'intégration pour Honda

    La période charnière entre la fin des années 80 et le début des années 90 va permettre à Honda de s'ancrer définitivement sur le marché national. D'un peu plus de 10 000 immatriculations en 1989, Honda progresse l'année suivante de + 29,8 % pour atteindre les 14 000 immatriculations. Si la marque a su profiter du marché, il n'empêche que le sport automobile, notamment la F1 et Alain Prost (lire encadré), lui a permis de se faire un nom sur un marché hexagonal encore réticent aux marques japonaises. Ces succès récoltés en F1 permettent aux ingénieurs de Honda de montrer leur savoir-faire technologique, notamment avec la NSX, véhicule à caractère sportif avec son moteur central doté d'un V6 de 3 l atmosphérique qui délivre 274 ch !
    La décennie des années 90 sera la meilleure qu'aura connue Honda France jusqu'à présent puisque les ventes ne descendront guère en dessous des 11 000 immatriculations pour approcher régulièrement les 15 000 VN. En 1999, l'année du lancement du S 2000, la nouvelle organisation européenne du constructeur choisit Marne-la-Vallée comme siège social pour la France, l'Italie et l'Espagne : Honda South Europe. Cette période marque aussi le début des difficultés pour le constructeur en France, même si paradoxalement la gamme Honda s'est étoffée avec l'arrivée de nouveaux modèles comme le CR-V (1997) le HR-V, l'Accord ou encore la Jazz (2000)… D'une longue période d'ascension débutée en 1964, la courbe va alors invariablement s'inverser jusqu'à aujourd'hui.

    Sans Diesel, point de salut

    Au moment d'entrer dans le 21e siècle, le problème de Honda porte un nom : le Diesel. Si effectivement la Concerto (Diesel Peugeot) et les anciennes Accord (Diesel Rover) avaient eu l'occasion d'initier le constructeur aux rites du Diesel aux cours des années 90, le phénomène était resté sans suite. En France, la part de ces motorisations n'a cessé de prendre de l'importance : de 49 % en 2000, elle est rapidement passée à 63,2 % en 2002 pour atteindre aujourd'hui 67 % (données PolK France, JA n°860) ! Il devient impensable pour un constructeur nourri d'ambitions hexagonales de ne pas posséder de motorisations Diesel.
    Honda passe ainsi à l'offensive en lançant en mai 2002 (JA n° 798) la Civic équipée d'une motorisation Diesel développée par Isuzu. La seconde salve vient récemment d'être tirée au début de cette année avec la nouvelle Accord qui se dote pour la première fois dans l'histoire du constructeur d'un moteur Diesel 100 % Honda : le I-CDTi.
    Une première réussie (JA n° 850) puisque l'Accord Diesel a dans son ensemble été bien accueillie par la critique. Mais surtout par le public, ce qui reste le plus important : sur les trois premiers mois de l'année 2004, Honda enregistre une hausse de ses ventes de 18 % par rapport à la même période l'an passé avec 1 848 unités dont 42 % proviennent des ventes de la nouvelle Accord. En Europe, le résultat est tout aussi probant : le constructeur est en croissance de 16,7 % avec 33 000 immatriculations sur le 1er trimestre 2004. Effet Diesel ? Sûrement. Comme semble l'indiquer le nouveau General Manager, Thierry Hubert : "La diésélisation de notre gamme sera le pivot de notre stratégie en 2004, une année cruciale pour Honda sur le marché français." Une première étape pour Honda France qui permettra au constructeur de viser dès cette année la barre des 7 000 VN avant de revenir au seuil des "années dorées" des 14 000 immatriculations dans l'Hexagone en 2007. La renaissance est-elle en marche ?


    Tanguy Merrien





    ZOOM

    L'activité Honda
    Avec 17,02 millions de produits vendus en 2003, soit une augmentation de 11 % par rapport à 2002, Honda est le premier motoriste au monde dans le domaine de la moto, les produits d'équipements et l'automobile. Honda a abandonné le moteur 2 temps pour le moteur 4 temps, quelle que soit la branche d'activité. La moto reste la principale activité avec 9,11 millions de moteurs vendus, devant les produits d'équipements (jardin, marine, industrie), 5 millions, et enfin l'automobile avec 2,91 millions. Le motoriste nippon espère augmenter ses ventes mondiales en 2004 en atteignant 19 millions d'unités (3,2 millions pour l'automobile, 10,4 millions pour la moto et 5,4 millions pour les produits d'équipements). L'Europe ne pèse pas bien lourd dans ce total avec 1,67 million de produits vendus (+ 11,4 %) dont 217 349 unités pour l'automobile. Un secteur dans lequel le constructeur prévoit d'augmenter les ventes à 220 000 unités pour 2004.
    Honda Europe, dont le siège se trouve à Slough, en Grande-Bretagne, dispose de cinq unités de fabrication : à Swindon en Angleterre et en Turquie pour l'automobile, en Belgique pour la fonderie, à Atessa en Italie et à Montesa en Espagne pour la moto ainsi qu'à Orléans pour la fabrication de produits d'équipements.

    En ce qui concerne la distribution en France, les différents domaines sont ainsi répartis :

  • Automobile : 72 concessionnaires pour 83 points de vente
  • Moto : 230 concessionnaires
  • Jardin : 219 concessionnaires pour 324 points de vente
  • Industrie : 90 concessionnaires pour 102 points de vente
  • Marine : 122 concessionnaires pour 133 points de vente.





  • Questions à

    Thierry Hubert, General manager de la division automobile de Honda Motor Europe South pour la France

    Récemment arrivé à la tête de Honda France, Thierry Hubert envisage l'avenir de la marque avec optimisme, espérant franchir la barre des 7 000 VN cette année avant de doubler ce chiffre d'ici trois ans.


    Le Journal de l'Automobile : Vous venez de prendre la direction de Honda France qui a terminé l'année 2003 avec 5 547 unités. Quels sont vos premiers objectifs ?
    Thierry Hubert : D'ores et déjà, nous nous sommes fixé la barre des 7 000 immatriculations pour la fin de l'année 2004, ce qui constituerait une première étape avant de doubler ce chiffre pour l'année 2007. Pour cela, le principal pilier de notre stratégie sera la diésélisation de notre gamme. Celle-ci a débuté avec l'Accord Diesel et un moteur 100 % Honda. Ensuite viendra le tour des autres véhicules comme le CR-V ou la Civic. Celle-ci existe déjà en moteur Diesel, mais d'origine Isuzu, et sera amenée à être remplacée. La croissance en France comme en Europe passe par cette diésélisation.


    JA : Il semblerait, au regard des résultats du premier trimestre, que les ventes progressent par rapport à la même période l'an passé. Avec une avancée de 18 %, elles atteignent 1 848 unités contre 1 566 en 2003. Est-ce l'effet Accord Diesel ?
    TH : En effet, la sortie de l'Accord Diesel a été bien reçue par l'ensemble de la critique et cela s'est senti sur nos résultats de début d'année puisque ce véhicule représente 42 % du mix. Nous espérons surfer sur ce succès pour en faire profiter l'ensemble de notre gamme, notamment la Jazz positionnée sur le segment B.


    JA : Quelle est la politique produits à court et moyen terme ?
    TH : Nous allons présenter au Mondial de Paris, en septembre prochain, un nouveau monospace du segment C qui aura un caractère résolument sportif. Par ailleurs, nous profiterons du Mondial pour présenter l'ensemble de notre gamme en version Diesel, dont le CR-V. De façon générale, l'année 2004 devrait nous servir pour préparer l'année 2005 dont l'actualité s'annonce brûlante pour Honda, avec plusieurs événements à venir.


    JA : Quel est le rôle de Honda France par rapport à Honda Motor Europe South ?
    TH : Avant mon arrivée au mois d'avril dernier, Honda France a été géré de façon transitoire par les Japonais au sein de l'entité de Honda Motor Europe South où figurent également l'Espagne et l'Italie, l'ensemble étant dirigé par Shigeo Hirose. Ce dernier souhaite que la relation constructeur-distributeur soit plus forte et que les deux ensembles travaillent de paire. Mon rôle est d'aller dans cette voie afin de favoriser le dialogue entre le réseau et le constructeur.


    JA : Justement, avec 75 investisseurs et 83 sites, le réseau vous semble-t-il suffisamment étoffé dans l'Hexagone ?
    TH : Non et nous souhaitons recruter pour couvrir certains open points. Notamment dans certaines grandes métropoles comme Lyon où nous ne sommes plus présents depuis un an, mais également sur Paris Est, au niveau de la petite et de la grande couronne. D'ici fin 2005, nous devrions avoir terminé notre recrutement et notre couverture territoriale sera aboutie avec une centaine de points de vente et environ 85 investisseurs.


    JA : Quelle est la rentabilité du réseau ? Est-il facile pour un distributeur Honda d'être rentable lorsque l'on sait que vous souhaitez des distributeurs monomarques grâce à la clause De Minimis ?
    TH : La rentabilité moyenne de notre réseau est de 1,6 %. Le monomarquisme n'empêche pas nos distributeurs d'obtenir une rentabilité positive. L'arrivée de nouveaux produits, l'exploitation de territoires bien définis permettront à nos distributeurs de conserver cette rentabilité. Par ailleurs, nous ne sommes pas exigeants dans les mises aux normes des points de vente et ne demandons pas à nos distributeurs d'engager des investissements hors normes qui grèveraient leur rentabilité.


    JA : Envisagez-vous l'avenir de Honda en France avec optimisme ?
    TH : Il reste beaucoup de travail à accomplir, mais je vois l'avenir sereinement. Honda considère aujourd'hui l'Europe comme une priorité de développement et c'est rassurant. Quand un constructeur comme Honda s'investit comme il vient de le faire dans le Diesel, ce n'est pas par hasard. Le meilleur reste à venir.


    Propos recueillis par Tanguy Merrien






    Questions à

    Bruno Chemin : directeur commercial Honda Moto France

    JA Comment le marché de la moto se compose-t-il en France ?
    Bruno Chemin L'année 2003 s'est terminée à 170 000 unités, ce qui reste une des meilleures années dans ce domaine d'activité si on se base sur 1999, l'année référence, qui s'est soldée à 180 000 unités. Jusqu'à 1996, le marché ne dépassait guère les 100 000 unités, quand on a instauré le permis moto 125 cm3 qui a fait décoller le secteur. Quant au parc roulant, il est plus difficile à évaluer que celui de la voiture, mais on l'estime entre 4 et 5 millions d'unités.


    JA Quelle est la place de Honda sur ce marché ?
    BC Avec une part de marché à 17,7 % en 2003, nous sommes numéro 2 dans l'Hexagone derrière Yamaha (20,5 %), mais devant les autres principaux concurrents que sont Suzuki (16,6 %), Kawasaki (8,2 %) et BMW (4,3 %). En revanche, Honda reste numéro 1 dans le monde et en Europe. Pour revenir à la France, Honda est aujourd'hui leader sur le segment des 125 cm3, qui domine la globalité du marché (60 % contre 40 % pour les grosses cylindrées). A fin avril 2004, nous confortons d'ailleurs notre position sur ce segment puisque Honda est en progression de 18 % par rapport à la même période en 2003, avec 30 000 immatriculations. Les autres cylindrées totalisent quant à elles 45 000 immatriculations sur la même période.


    JA Comment la distribution moto s'organise-t-elle et peut-on espérer un rapprochement avec le réseau automobile ?
    BC Notre réseau, composé de 230 concessionnaires pour autant de points de vente, couvre presque 100 % du territoire. Dix d'entre eux sont ce que nous appelons des distributeurs "hybrides", c'est-à-dire qu'ils sont également concessionnaires auto, notamment à Paris, à Perpignan ou à Château-Thierry.

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