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Constructeurs

Labels VO : à l'heure des comptes

Publié le 5 juillet 2023

Par Gredy Raffin
10 min de lecture
L’année 2022 demeurera sans doute une période historique pour les labels VO des constructeurs automobiles. Dans un contexte de marché contraint, les ventes ont plongé, mais la rentabilité a atteint des sommets. Mais qu’en sera-t-il demain ?
VO
L'augmentation des prix de vente des voitures d'occasion a élevé le niveau de profitabilité de l'activité en 2022. ©JA

Les biens de consommation ont pris du plomb dans l’aile. Tout du moins, telle est la tendance que laisse entrevoir l’une des dernières études en date de Kantar.

 

Comme chaque année, le cabinet s’est penché sur le chariot des consommateurs à travers le monde. Après trois bilans en croissance d’en­viron 2,6 % de moyenne, le nombre d’articles achetés est resté stable pour la première fois (+ 0,1 %).

 

Pourtant, en 2022, les dépenses des ménages ont bien augmenté de 4,8 %, selon les estimations de Kantar. L’effet de l’in­flation, sans aucun doute possible. Une dynamique qui a provoqué cer­tains changements dans les réflexes d’achat.

 

Le hard‑discount (+ 10,2 %, soit la plus forte croissance) et les marques de distributeurs (41,4 % de pénétration en Europe occiden­tale) ont le vent en poupe au mo­ment de faire les courses. Des élé­ments de contexte qu’il faut avoir en tête lorsque l’on pousse la porte d’une concession pour discuter de la situation du marché de l’occasion.

 

Face aux tensions du quotidien, les Français paraissent appliquer de nouveaux arbitrages. Sans parler de désertion, il y a un ralentissement de l’activité en points de vente. Le baro­mètre établi par Carvivo et Le Journal de l’Automobile en atteste.

 

En mars et en avril 2023, le nombre moyen de leads VO traités par concession a sensiblement reculé (‑ 17,3 % et ‑ 12,8 % respectivement). Et cela dure depuis novembre dernier.

 

Baisse des ventes sous label

 

Les statistiques consolidées par les constructeurs montrent que les ca­dences ont ralenti l’an passé. Les la­bels Spoticar chez Stellantis, Renew chez Renault et Das WeltAuto chez Volkswagen en sont les témoins tout indiqués.

 

Le premier a dépassé les 300 000 transactions à particulier l’an passé, en conjuguant toutes les marques. Un volume toujours impressionnant qui s’est cepen­dant contracté de 17 % sur un an, d’après la direction.

 

En culminant à 230 400 remises à la route, celui de Renault a cédé 4,2 % dans le même temps. Tandis que sous le label Das WeltAuto, 82 500 VO ont trouvé preneur (hors Cupra), soit 28 % de moins qu’en 2021.

 

Pour mémoire, la seule marque Volkswagen totali­sait 87 000 unités en 2021, c’est dire la fonte subie. À l’inverse, le label Hyundai Promise est parvenu à croître de 20 % pour boucler avec 13 743 ventes. Plus que jamais pour­tant, le commerce de voitures d’occa­sion a été rentable en 2022. Cela vaut aussi bien pour les indépendants que les concessionnaires opérant sous le label d’un constructeur.

 

 

Dans des réseaux, des cadres rapportent une contribution hors norme à la profitabilité de leur groupe. Ce que confirme Thomas Gerard, chef du département société, VU et VO de Toyota France. "Nous avons gagné 7 points pour arriver à une contribution moyenne de 30 % à la profitabilité des concessions", partage‑t‑il l’un des indicateurs de son tableau de bord.

 

Un joli trésor amassé qu’il va falloir préserver. Tel sera le principal enjeu de cet exercice 2023. Il pourrait être mis à mal par la conjoncture. "Il y a une inquiétude chez ceux qui ont encore des stocks de 2022. Ces véhi­cules ont été achetés au prix fort et s’ils ne sortent pas rapidement, ils vont coû­ter cher aux distributeurs ", constate Alain Martinat, fondateur du cabinet Capcar Consulting.

 

Les divers indica­teurs ne sont pas pour rassurer les in­vestisseurs. La rotation tend, en effet, à ralentir, alors que les frais financiers ne cessent d’augmenter depuis que la Banque centrale européenne a changé de braquet pour tenter de contenir le phénomène inflationniste.

 

Salve d'initiatives

 

D’une crise de l’offre, la France bas­cule vers une crise de la demande. Ce n’est pas faute d’avoir pris des initiatives chez les constructeurs pour soutenir les partenaires sur le terrain. Divers programmes qui ont pour dénominateur commun de for­cer le gain d’attractivité aux yeux des consommateurs.

 

Pas plus tard qu’en février dernier, par exemple, Volvo a procédé à une modernisation de son label Volvo Se­lekt Occasions. Il en a résulté que la couverture contractuelle s’est étendue aux voitures d’occasion allant jusqu’à dix ans ou 150 000 km.

 

En plus, le site Internet Volvo Selekt a été redes­siné pour notamment présenter dé­sormais sur chaque annonce le calcul des loyers financiers. Dans le cas des locations, les loyers tiennent compte des engagements de reprise des concessionnaires, ce qui permet de gagner en compétitivité. Autre mai­son, autre idée.

 

 

Chez Toyota, où la garantie appliquée aux voitures d’oc­casion figure parmi les meilleures du marché (les VO hors captifs sont couverts plus longtemps que les propres VN du constructeur nippon), les dispositions ont été étendues aux clients taxis, VTC et VSL. "Comme 85 % de notre production, le label couvre 3 ans de garantie pour un kilométrage illimité, nous n’étions pas tout à fait adaptés aux taxis lors du lancement. Nous avons donc réagi en 2022", explique‑t‑on au siège de la filiale tricolore.

 

Près d'un acheteur sur deux considère les concessionnaires

 

Toujours est‑il que cela n’encourage pas à passer à l’acte. Une étude conduite par YouGov pour Le Journal de l’Automobile, au début du mois de mai 2023, auprès de 2 008 personnes, a montré que la moitié des Français (50,7 %) ne projettent pas d’acheter une voiture d’occasion à court terme.

 

Ils ne sont que 39,9 % des sondés à y songer, dont 15,7 % à l’horizon de plus d’un an et 8,7 % reculent l’échéance à 12 mois au mieux. Il va falloir batailler pour convaincre. Il y a matière à se réjouir toutefois.

 

L’an passé, ce même sondage avait révélé que 60,3 % des consommateurs français fermaient la porte à une acquisition de voiture d’occasion. Et là déjà, la part des acheteurs déclarés qui repoussaient leur projet à plus d’un an s’élevait à 14 % (pour 30,1 % de personnes disposées à s’offrir un VO).

 

La considération accordée aux concessionnaires constitue l’autre motif de satisfaction. Dans ce même sondage, en effet, il ressort une forme de confiance accordée aux distributeurs sous panneau de marque.

 

 

Tout du moins, telle est la conclusion que l’on peut tirer du fait que 49,8 % des interrogés disent vouloir consulter un concessionnaire lors du prochain achat (contre 44,6 % l’an passé). Un canal qui devance celui des garages indépendants (24,3 %), des enseignes spécialisées (24,1 %) ou celui des particuliers (23,9 %).

 

Les concessionnaires doivent aussi garder en tête que 68,6 % des consommateurs disposeront de moins de 15 000 euros de budget.

 

Si beaucoup prennent le pari de proposer des formules locatives pour atténuer les effets inflationnistes, 45,7 % des acheteurs entament leur parcours d’achat avec l’idée de régler comptant et 24,3 % souhaitent financer leur VO en partie grâce à la reprise de leur ancienne voiture. La LOA (10,4 % des intentions) et la LLD VO (9,9 %) ne viennent qu’ensuite.

 

Mais au travers de leur label, les constructeurs travaillent à accentuer la communication pour démocratiser la pratique. De toute manière, leur futur modèle économique du VO repose en grande partie sur la gestion des cycles et seuls les contrats de financement peuvent verrouiller le processus.

 

 


 

Des VR en baisse

"Nous avons observé dès décembre 2022 que les valeurs résiduelles s’inscrivaient à nouveau en baisse. Mais depuis le mois de janvier, le phénomène s’est amplifié." Par ces mots, Yoann Taitz, responsable des va­leurs résiduelles et des études d’Autovista France et Benelux, donne une indication des mouvements en cours. Il explique que toutes les énergies disponibles sur le mar­ché des voitures d’occasion sont concer­nées et tout particulièrement les modèles électriques. Surtout depuis que Tesla fait fluctuer les prix au gré de ses envies. Ré­sultat, depuis le début de l’année 2023, la valeur résiduelle à 12 mois des voitures électriques a chuté de 2 points chez les généralistes et de 5 points chez les pre­miums. D’une manière générale, les VR restent hautes cependant. "Les construc­teurs peinent à prendre la mesure de cette réalité", estime Yoann Taitz. Il poursuit en exposant que la VR à 12 mois des modèles diesel a baissé de deux points en pourcen­tage au cours des quatre premiers mois de 2023. Les VO à moteur essence font plus de résistance. Comme à l’automne dernier, l’inconnue concerne les PHEV. La première véritable vague des retours de location doit déferler à l’été. Ce qui pourrait influencer à la baisse les valeurs résiduelles. Sauf si les constructeurs et les loueurs jouent les pro­longations. Cela pourrait soulager les parcs et préserver l’équilibre.

 


Pas d'alerte sur les stocks

Les stocks sont‑ils aussi élevés que certains concessionnaires le prétendent ? Pour des patrons de centrale d’achat habitués à travailler avec les réseaux de marque, il ne fait aucun doute que ceux‑ci sont arrivés à saturation. Au point de ne plus passer commande. Pour Emmanuel Labi, directeur général d’Autobiz, la vérité est tout autre. Sur ses radars, il n’y a pas tant de VO que cela. "Il faut prendre du recul, tempère‑t‑il, sur les réseaux labellisés, les réserves n’ont rien d’anormal." En avril 2023, le nombre de VO en concessions est 4 % inférieur à celui de l’an passé et 18 % en dessous du niveau de 2021. Selon lui toujours, les labels Spoticar, Renew, BMW Premium Selection et Toyota Occasions sont dans les clous. Les volumes sont un peu plus élevés dans les concessions du groupe Volkswagen, chez Ford et Mercedes‑Benz, "sans toutefois dépasser ceux de 2021", assure‑t‑il. Les outils d’Autobiz sont formels, la rotation ralentit. Les stocks ont vieilli de 3 à 4 jours pour monter à 65 jours en moyenne en France. "Mais la part des VO de plus de 90 jours ou de plus de 120 jours n’a pas augmenté significativement", défend Emmanuel Labi.

 


Spoticar lance la vente directe

Avec Spoticar Direct, l’entité VO de Stellantis propose, depuis le 1er juin dernier, aux clients et prospects d’accé­der à encore plus de véhicules d’occasion sur son site spoticar.fr. Des véhicules en provenance de l’usine de re­conditionnement de Hordain (59), propriété exclusive du constructeur. L’idée étant de soumettre une offre com­plémentaire à celle des 1 200 points de vente sur le terrain. Au lancement, 500 VO sont en ligne et renouvelés régu­lièrement. La particularité de Spoticar Direct ? Les clients auront la possibilité de commander sur Internet et d’être livrés au lieu de leur choix. Le paiement et la livraison se feront dans un point de vente choisi par le client. Le tout sans frais supplémentaires. "Innover, c’est proposer dès aujourd’hui avec Spoticar Direct un parcours phygital qui rend accessible une offre VO encore plus large partout en France, en s’appuyant sur notre réseau Spoticar, ex­plique Serge Habrant, directeur de Spoticar France. Inno­ver nous permet aussi de continuer de renforcer encore le leadership de Spoticar." Un centre d’appels a été mis en place pour accompagner chacun dans sa démarche. À noter que ce parcours d’achat ne prévoit aucun essai du VO. En revanche, "le client bénéficiera de 10 jours après l’achat pour changer d’avis et se faire rembourser si le vé­hicule ne lui convient pas", rassure Spoticar.

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