Eolab : Renault tient son manifeste
Faire une voiture qui ne consomme que 2 litres aux 100 km n’a rien d’impossible. D’ailleurs, Renault l’avait déjà fait en 1987 avec le concept Vesta 2, qui s’était limité à 1,94 litre entre Bordeaux et Paris. Le défi est tout autre aujourd’hui. En effet, il faut parvenir à atteindre ce résultat sur un véhicule commercialisable. Voilà donc quel a été le leitmotiv durant la réflexion et la conception de l’Eolab qui préfigure ce futur véhicule qui doit être séduisant, offrir des prestations conformes aux attentes des clients et, enfin, vendu à un prix réaliste.
“Light is right”
Voilà donc la Clio du futur, puisque l’Eolab présente ce que pourrait être un véhicule du segment B consommant moins de 2 litres aux 100 km. Pour arriver à cette consommation, les ingénieurs de Renault et leurs partenaires équipementiers ont travaillé sur l’allégement (- 400 kg), l’aérodynamique (- 30 % de SCx) et un nouveau groupe motopropulseur hybride plug-in baptisé “ZE Hybrid”. Colin Chapman, emblématique patron de Lotus, disait toujours “light is right”. Et cela peut être considéré comme le point central de cette Eolab. “On peut toujours alléger en y mettant le prix, mais ce serait contraire à la philosophie de Renault. Notre stratégie consiste à alléger pour tout le monde, ce qui nous impose de ne retenir que des solutions économiques, accessibles pour nos clients”, explique Laurent Taupin, le chef du projet. Résultat, ce démonstrateur a tout de même perdu 400 kg, soit 1/3 de la masse d’une Clio 4. La caisse utilisant différents matériaux pèse 130 kg de moins, le châssis et la chaîne de traction affichent - 160 kg et, enfin, l’habillage et les équipements ont permis de perdre 110 kg. De nombreux équipementiers ont apporté leur contribution, comme Michelin, Continental, Faurecia, Saint-Gobain et Posco (voir Focus ci-dessous). Aucun élément de la voiture n’a échappé à la chasse aux kilos, comme en témoignent les symboliques 300 g gagnés sur le volant. La traverse du tableau de bord a quant à elle perdu 6 kg, le capot fixe est synonyme de 2,5 kg en moins, alors qu’à l’arrière, la transformation du dossier de la banquette en une pièce de structure, a économisé 20 kg. L’Eolab ZE Hybrid pèse ainsi 955 kg. Laurent Taupin insiste sur le cercle vertueux de l’allégement. C’est la clé. Pour lui, “les économies réalisées par le redimensionnement des organes mécaniques ont permis de financer les matériaux et les technologies plus chers, tout en restant à iso coût global”.
L’heure de l’hybride rechargeable a sonné
L’aéro a également été particulièrement soignée avec, notamment, une réduction de 30 % du SCx. Le design global, en forme de goutte d’eau, y participe, mais il faut aussi voir les bienfaits d’une aéro active. Déjà plus basse de 5 cm par rapport à une Clio, l’Eolab cache une suspension pilotée qui, à partir de 70 km/h, abaisse encore la voiture de 25 mm. De plus, des volets sur le bouclier arrière permettent de réduire l’aspiration, c’est-à-dire l’effet ventouse. La disparition des rétroviseurs, remplacés par des petites caméras, joue aussi un rôle dans l’amélioration générale de l’aérodynamique. De quoi tirer le meilleur de la mécanique hybride plug-in proposée. Enfin, pourrait-on dire, tant Renault a mis du temps à proposer quelque chose de concret dans le domaine ! Pour retrouver cette motorisation dans la rue, il faudra toutefois attendre 2018. Le Français a donc choisi de marier un 3 cylindres essence de 75 ch et un moteur électrique animé grâce à une batterie lithium-ion de 6,7 kWh (développée avec le CEA), qui permet de faire une soixantaine de kilomètres en 100 % électrique. Un ensemble totalisant seulement 150 kg car dimensionné par rapport au poids global de la voiture. Les Renault ZE, 100 % électrique, comme la Zoé n’ont pas forcément été d’un grand secours aux ingénieurs car seule l’électronique de puissance a été reprise. A cet ensemble s’ajoute une boîte “maison” avec 3 rapports, les deux premiers étant couplés au moteur électrique et le troisième au moteur thermique, sans embrayage, ce qui permet d’offrir 9 modes de conduite. Trois ans de recherche ont été nécessaires pour mettre en musique ce nouvel ensemble. Renault a déjà déposé 40 brevets sur ce système hybride et ce n’est pas fini puisque la boîte, encore en développement, en ajoutera encore quelques-uns. Ainsi armée, l’Eolab ZE Hybrid arrive à une consommation moyenne de 1 litre, mais demeure performante avec un 0 à 100 km/h en 9 secondes. A titre de comparaison, une Clio 4 TCe 120 réalise le même chrono, mais avec une consommation moyenne de 5,2 litres. Les ingénieurs de Renault ont également chiffré un Eolab simplement équipé du moteur TCe 90 thermique avec consommation de 3,6 litres.
50 à 60 % des technologies de l’Eolab en série dès 2018
Aussi efficace soit-il, ce démonstrateur devait aussi faire la preuve que la centaine de briques technologiques qui le constituent sont transposables relativement rapidement dans les véhicules de série. Il y a naturellement une question de coût des matériaux, mais aussi et surtout de compatibilité avec l’outil industriel de Renault, les plates-formes actuelles et celles en gestation. Dès le début, cet aspect de production a été pris en compte. Ainsi, à partir de 2015, certains éléments feront déjà leur apparition sur des véhicules de série. Cela va notamment débuter avec l’Espace et des pièces en aluminium ou encore l’utilisation de nouveaux matériaux dans la structure. En 2016, 20 à 30 % de ces briques technologiques seront industrialisées. Puis cela ira crescendo jusqu’en 2022, où 90 % devraient l’être, avec une étape importante (50 à 60 %) en 2018. En effet, ce sera l’année où la motorisation hybride plug-in sera au catalogue, et où apparaîtront aussi le vitrage plus fin de Saint-Gobain et le plancher en composites de Faurecia. Autant de choses qui s’appliqueront de la Twingo au Master.
Eolab représente donc le nouveau Renault, sa nouvelle philosophie ayant notamment demandé le dépôt d’une centaine de brevets. Le Français ne fait pas table rase du passé pour autant, mais s’est remis en cause afin de répondre aux défis futurs.
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FOCUS - Michelin
Tall & Narrow. Haut et étroit. Voilà deux des caractéristiques des pneus proposés par Michelin. Ces gommes plus étroites ont une moindre surface de contact avec le sol, et offrent donc moins de résistance au roulement. La structure, le mélange de gomme, mais aussi la bande de roulement sont nouveaux et cet ensemble permet de réduire la masse de 15 %, soit d’environ 1 kg. Ainsi, ce nouveau pneu Tall & Narrow en 145/70R17 pèse 6,2 kg alors qu’un 185/65R15 actuel affiche 7,3 kg. Ces pneus permettent une économie de 0,2 litre aux 100 km et 5 g de CO2. Ces nouvelles enveloppes seront sur le marché en 2016.
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FOCUS - Faurecia
Faurecia est un large contributeur au projet Eolab puisqu’il intervient sur l’échappement, les sièges et le plancher en composite. Ainsi, ce plancher permet d’économiser 16,5 kg, soit 33 %. Cela reste un plancher “concept” pour l’heure, mais le potentiel est là et une commercialisation en 2018 est envisagée. Quant aux sièges, les ingénieurs de l’équipementier ont travaillé sur les matériaux, l’architecture et le design. Résultat, un gain de 4 kg par élément. Quant à l’échappement, grâce à une ligne courte et des éléments en fibre de verre, il est plus léger de 3 kg. Faurecia a ainsi fait perdre 30 kg à l’Eolab.
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FOCUS - Saint-Gobain
Le spécialiste du vitrage contribue largement à la cure d’amaigrissement de l’Eolab. En effet, l’ensemble du vitrage a perdu 13,2 kg, à 18,8 kg au lieu de 32. Ainsi, le pare-brise, en passant de 4 à 3 mm d’épaisseur, permet d’économiser 5,5 kg (de 16 à 10,5 kg). Sur le vitrage latéral, l’écart est encore plus important, passant de 16 à 8,3 kg, soit 7,7 kg de moins. De nouveaux vitrages qui seront bientôt une réalité car de telles fabrications demandent une adaptation du process, mais pas de grandes révolutions. Certes, ce type de vitrage est un peu plus cher pour l’heure, mais avec le volume de fabrication, le coût redeviendra proche de l’actuel. Saint-Gobain voit déjà plus loin puisque le poids total du vitrage, avec des polymères, pourrait baisser à 14 kg. Saint-Gobain travaille également sur des vitrages en polycarbonate utilisés pour les pièces fixes. Ainsi, une lunette arrière en polycarbonate est 40 % plus légère qu’une minérale.
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FOCUS - Continental
L’équipementier allemand apporte son savoir-faire dans le domaine du freinage. En effet, le système proposé par Continental permet de réduire le poids, à iso performance, de 14,5 kg. Tous les éléments sont concernés. Ainsi, sous le capot, le MKC1 permet de gagner de l’espace et jusqu’à 4 kg. Ce MKC1 est une sorte de centrale “tout en un” qui combine l’actionnement, le système d’assistance, mais cache aussi l’ABS et l’ESP. Les étriers avant sont également plus légers car ils nécessitent 10 % de matière en moins. Même chose à l’arrière où le système, faisant appel à des tambours, est plus compact et plus léger (- 8,5 kg) tout en offrant des fonctions supplémentaires comme le frein à main électrique. Le MKC1 sera produit à partir de 2016 et le système arrière sera sur la route en 2017.
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FOCUS - Posco
Quatrième fournisseur mondial d’acier, Posco propose notamment des éléments en magnésium, comme le toit de l’Eolab qui ne pèse que 4,5 kg. Rappelons que le magnésium est 60 fois plus léger que l’acier traditionnel et 20 fois plus que l’aluminium. Mais pour une économie de poids plus réaliste et industrialisable, Posco propose également de nouveaux types d’aciers à Très très haute limite élastique (TTHLE) ou de l’aluminium pour faire baisser le poids de la caisse sans nuire, naturellement, à la sécurité de la structure. L’aluminium sera aussi largement utilisé dans des pièces de suspensions, par exemple. Ainsi, le berceau d’une Clio 4 pesant jusqu’ici 14 kg passera sous la barre des 10 kg grâce à une économie de 5,3 kg. Les bras de suspension perdront, eux, 1,8 kg, le porte-fusée 5 kg et les bras de l’essieu arrière 9 kg.
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