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Constructeurs

Entretien avec Thierry Lespiaucq, Directeur général de Volkswagen et Christian Vince, Responsable de l’agence V (DDB France).

Publié le 8 septembre 2006

Par Tanguy Merrien
9 min de lecture
"VW a gardé un discours franc, proche des gens, sans jamais se prendre au sérieux" L'agence V (DDB France) est à l'origine d'un nombre incalculable de campagnes pour Volkswagen. Sharan et la musique "I like to move it", Golf IV et le slogan...
"VW a gardé un discours franc, proche des gens, sans jamais se prendre au sérieux" L'agence V (DDB France) est à l'origine d'un nombre incalculable de campagnes pour Volkswagen. Sharan et la musique "I like to move it", Golf IV et le slogan...

..."Si les jeunes possèdent cette voiture, c'est qu'ils l'ont sûrement volé"... Le lien qui unit l'agence et le constructeur s'est solidifié avec le temps, et cette collaboration durable prouve qu'il est pourtant facile de ne pas se tromper ! Thierry Lespiaucq et Christian Vince nous livrent leurs avis sur l'évolution de la pub au sein de la marque.


Journal de l'Automobile. Comment développez-vous une campagne de publicité ?
C.V. A partir du modèle et du cahier des charges donnés par la marque, nous établissons plusieurs axes de recherches. Emotionnel ou purement marketing, un produit reste toujours un objet de réflexion pour l'agence chargée de sa campagne de publicité. Nos agences européennes travaillent sur le lancement publicitaire d'un modèle environ un an avant sa sortie publique. Auparavant, chaque pays faisait son propre film, mais pour des raisons évidentes d'économies d'échelles, nous choisissons dorénavant les projets dans une banque de communication mise à notre disposition. Nous retenons les plus pertinents ou les mieux adaptés aux différents marchés.
T.L. Pour la France par exemple, nous ne choisirons pas nécessairement une pub qui vient de l'agence française, nous pouvons choisir une pub allemande si nous estimons qu'elle correspond mieux à nos attentes. 


JA. Surfez-vous sur les tendances du moment ou gardez-vous toujours le même ton dans vos pubs ? 
T.L. VW a toujours conservé un ton particulier dans ses pubs, et ce depuis les années 50 aux Etats-Unis avec le lancement de la Coccinelle. Lancer une telle voiture était un pari osé puisque ce véhicule ne correspondait absolument pas aux standards américains de l'époque (voitures énormes, consommation importante...). La voiture était originale, les pubs le furent également. C'est Bill Bernbach, considéré comme l'un des maîtres dans l'art publicitaire, qui a créé les premières pubs pour VW aux Etats-Unis. Il est allé à contre-courant de ce qui se pratiquait en termes de communication. Il a mis en place un ton décalé et complice.
C.V. Les pubs américaines des années 50, que l'on appelait de la réclame souvenez-vous, montraient essentiellement les chromes rutilants des Chevrolet et autres gros modèles, avec des poses lascives de jolies filles... Les pubs de la Coccinelle mettaient en valeur la fiabilité de la voiture (Voir affiche ci-contre)... Dans tous les pays et jusqu'à aujourd'hui, nous avons toujours gardé cet esprit. La marque a gardé un discours franc, proche des gens, sans jamais se prendre au sérieux et sans jamais choquer.


JA. Mais n'êtes-vous pas tenté de vous aventurer sur le terrain de la provocation quelquefois ?
T.L. Vous faites allusion à la campagne de VW Utilitaires qui a d'ailleurs remporté le prix Effie 2005 ? Voir un plombier agenouillé devant un lavabo sous le regard intéressé d'un client gay, avec le slogan "Le danger ne viendra pas de la route", n'a pas été jugé choquant. En tout cas, nous n'avons pas eu de retour à ce sujet. Nous ne sommes jamais méchants dans nos pubs, nous n'attaquons jamais personne ou une catégorie de personne en particulier. Le but est simplement de faire sourire, sans se moquer. Celles qui peuvent choquer véritablement sont conservées soigneusement dans nos cartons et ne seront pas diffusées.


JA. Quelle est la pub qui a le mieux fonctionné commercialement ?
C.V. La campagne pour la Golf Wembley. Avant la sortie de la Golf 5, il fallait écouler le modèle 4. Nous avons donc ciblé les jeunes conducteurs en pointant du doigt le prix très abordable du modèle et les qualités du produit. Nous avons imaginé cette pub dans laquelle on pouvait voir un jeune conducteur démonter, aux abords d'une route, le pneu de sa Golf. Un autre conducteur arrive et entreprend de démonter également une autre roue du véhicule. Lorsque le jeune homme lui demande pourquoi il fait cela, il répond qu'il fait comme lui, il vole un pneu ! La signature était là suivante : Golf Wembley, on ne va jamais croire qu'elle est à vous !


JA. Vous souvenez-vous d'une pub qui n'ait pas bien marché ?
C.V. Il n'existe pas de flop concernant une publicité, mais seulement un message mal perçu par le public. Ce qui ne fonctionne pas, c'est ce que les gens ne comprennent pas. Il y a quelques années, nous avions créé une pub pour la Polo dans laquelle nous voulions mettre en avant la sécurité du véhicule. Nous avons mis en scène des anges gardiens qui se retrouvaient sans travail du fait de la fiabilité de la Polo. Il n'y avait donc pas d'accidents. La campagne n'a pas bien fonctionné, trop décalée sans doute, les gens n'ont pas compris. Elle n'est pas restée longtemps à l'affiche.
T.L. Régulièrement, nous effectuons auprès des consommateurs des post-tests assez révélateurs sur les publicités. Certains n'apprécient pas trop la pub mais décodent le message et se déclarent prêts à acheter le véhicule. D'autres sont ravis par les images mais n'ont pas envie d'acquérir le modèle. Chaque client a une perception différente de ce qu'il voit.


JA. Selon vous, quels sont les pays les plus osés en matière de pubs ?
T.L. Deux pays se distinguent dans ce domaine : l'Angleterre et les Pays-Bas. Ce sont des marchés plus ouverts d'esprit, avec moins de tabous. Les pubs là-bas peuvent aller loin, notamment en Angleterre.


JA. Quelle est l'influence du Bureau de Vérification de
la Publicité dans votre travail ?
C.V. En France, le BVP contraint les agences à se modérer sans pour autant freiner leur créativité. Cet organe veut avoir un rôle moral et les agences se conforment à son avis, même si quelquefois, cela peut laisser perplexe. Je me souviens d'une publicité pour la Golf GT. Le véhicule roulait vraiment doucement sur une voie cavalière en pleine campagne, avant de s'arrêter. Certaines scènes ont dû être coupées car le bureau estimait que le véhicule allait encore trop vite !
T.L. Le BVP joue un rôle de régulateur et a obligé les créatifs à explorer des territoires inconnus. Mais il existe un carcan légal bien plus pesant que le BVP dont le rôle se limite aux spots télévisés. La publicité comparative par exemple, est extrêmement réglementée.


JA. Quel est le budget moyen pour une campagne ?
T.L. La valeur standard marché d'une campagne, incluant la TV, la radio, la presse... est de 3 ou 4 millions d'euros, en moyenne. Il est difficile de donner un coût précis, d'autant qu'on ne peut pas comparer une campagne sur Internet par exemple et celles qui paraissent dans la presse professionnelle ou en grand public.


JA. Quels sont les évolutions et l'impact de la pub sur le Net justement ?
T.L. Nous comparons les campagnes entre elles et nous observons les pics d'activité, autrement dit les taux de fréquentation du site. Les gens viennent spontanément sur le site au moment de la présentation d'un nouveau véhicule. Il est extrêmement difficile de mesurer l'impact provenant de la curiosité naturelle d'un visiteur concernant le produit avec celui qui vient véritablement acheter. Ce qui est sûr, c'est qu'Internet est à l'origine d'un tiers des ventes de nos véhicules : 30 % des visiteurs achètent le véhicule dans les 15 jours suivant leur visite sur le site, et encore 30 % au cours des 6 semaines suivantes. On vient de moins en moins par hasard sur le site, l'achat concret n'est jamais loin derrière.


JA. Quelles sont les prochaines campagnes ?
C.V. Une saga pour le Diesel, un film pour le Touran et la prochaine Polo. Le film pour le TDi montre une jeune femme de bonne famille se faisant sermonner par ses parents à l'annonce de son mariage avec un futur médecin ("Et pourquoi pas un avocat !"). Par les temps qui courent, ces derniers préféreraient qu'elle épouse un pompiste... comme sa sœur !  


 Propos recueillis par
 Muriel Blancheton





QUESTIONS A

Jean-Fabien Defaut, Responsable relations presse & relations publiques Seat, Groupe Volkswagen France s.a.


"Chez Seat,le budget moyen d'une campagne est de 2 ME"


Journal de l'Automobile. Est-ce une même agence de pub qui travaille pour toutes les marques du groupe ?
Jean-Fabien Defaut. Afin de respecter le positionnement marketing de chaque marque du Groupe Volkswagen France, il n'y a pas d'agence de publicité commune. Chacune s'appuie donc sur une agence différente avec une structure dédiée à l'intérieur de celle-ci. Un 'brief' du marketing produit détermine le spectre de la communication, en y incluant les points forts du véhicule, la cible clientèle, le positionnement... Ensuite, c'est la communication qui effectue le choix des médias appropriés pour enfin transmettre à l'agence un cahier des charges reprenant l'aspect produit et communication. Une fois ce cahier des charges arrêté, l'agence propose généralement trois créations.


JA. Diffuse-t-on des pubs identiques dans tous les pays ?
J-FD. Les publicités TV réalisées lors de lancements internationaux sont désormais paneuropéennes. Les cinq marchés les plus importants (Espagne, France, Allemagne, Italie et Angleterre) sont impliqués totalement dans la réalisation des briefs et dans le choix des campagnes. Il n'est cependant pas rare de développer deux campagnes de lancement de manière à satisfaire les demandes ou contraintes plus particulières de certains pays. On peut prendre l'exemple de notre marché français lors du développement d'une nouvelle création. Nous devons respecter l'avis du BVP et certaines pubs mettant trop en exergue la sportivité de nos produits peuvent ne pas obtenir son agrément. Le reste de la communication nationale (presse, affichage, radio etc.) est réalisé spécifiquement pour la France. Le budget moyen pour une campagne de lancement d'un nouveau produit de volume (presse, TV et Internet) est de deux millions d'euros.


JA. Quelles sont les pubs qui ont bien fonctionné et celles qui n'ont pas marché ?
J-FD. Les publicités "Laissez votre empreinte" lors du lancement de la Nouvelle Leon, et "Restez rebelle" avec John McEnroe lors de la deuxième campagne pour le monospace Altea, ont été, selon la marque, particulièrement appréciées. En revanche, la campagne "Dépassez vous" lors du lancement du monospace Altea, n'exprimait pas assez bien le positionnement du véhicule.


JA. Quelles seront les prochaines campagnes de Seat ?
J-FD. En septembre, pour la campagne "Les Défis Seat", la marque communiquera en presse, radio et affichage avec l'athlète Christine Arron. En octobre, la prochaine campagne TV sera celle de l'Altea XL, qui sera dévoilée au prochain Mondial de l'Automobile.

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