Entretien avec Hervé Forzani, directeur Ventes & Réseau France et Didier Gambart, chef du département Développement Réseau France.
...la marque passe en phase 2 de développement. Et cherchera à assumer sa croissance sans brader ses produits et sans rogner sur la qualité de ses services.
Journal de l'Automobile. A l'occasion du Salon de Genève, vous affirmiez que la couverture territoriale du réseau Toyota était désormais aboutie, pouvez-vous être plus précis ?
Hervé Forzani & Didier Gambart. Ce dossier, qui faisait partie de nos priorités, est en effet quasiment bouclé. A quelques rares exceptions près, le réseau Toyota a achevé sa restructuration sur les sites principaux. Depuis 2000, pas moins de 30 sites ont, en moyenne, été chaque année re-localisés, agrandis ou rénovés afin d'accompagner la marque dans sa croissance et d'adapter ses structures aux attentes des clients. Avec 240 sites à fin 2005, pour 113 partenaires, notre réseau est représentatif et couvre de manière qualitative le territoire national. Toutefois, nous entrons aujourd'hui dans une seconde phase de développement du réseau. D'ici 2010, nous comptons ouvrir avec nos partenaires 65 sites additionnels afin d'optimiser le maillage des zones de chalandise confiées à chacun d'entre eux. Il est ici question de sites satellites, qui représenteront environ 150 ou 200 VN par an, ce qui nous permettra de couvrir des villes situées à 50 ou 70 km du site principal.
JA. Avez-vous défini des priorités géographiques par rapport à cette seconde phase de développement ?
HF&DG. C'est une problématique nationale. Cependant, des efforts particuliers seront mis en oeuvre dans la région Est et dans la région parisienne où il sera capital que la marque renforce ses positions.
JA. A propos du réseau, quel commentaire vous inspire la rumeur de cession de Sivam ?
HF&DG. En l'état actuel des choses, nous ne pouvons que démentir cette rumeur ! Même si Sivam reste libre de ses décisions, bien entendu. Nous pensons que le cours des choses va plutôt contredire cette rumeur. Nous avons la volonté de nous développer avec Sivam, pas de vendre ! La preuve : nous négocions en ce moment avec eux le rachat d'une affaire !
JA. Quelle est la rentabilité générale du réseau et ce niveau vous satisfait-il ?
HF&DG. A fin 2005, la rentabilité du réseau s'est établie à 1,71 % avant impôt. Avec un chiffre d'affaires en progression de 10 %. Notre réseau reste le plus rentable parmi les marques généralistes et se situe juste derrière les marques spécialistes du marché premium. Nous sommes donc satisfaits. D'autant que nous nous attendions à une année 2005 un peu difficile avec la fin de vie de nos deux principaux modèles, Yaris et Rav-4. Mais nos "run-out" ont été tout bonnement exceptionnels. En outre, il convient de souligner que le réseau a poursuivi son effort d'investissement, à raison de plus de 40 millions d'euros en 2005, pour la rénovation, l'agrandissement ou l'ouverture de nouveaux sites.
JA. Vous avez lancé, il y a plusieurs mois, un vaste programme de changement de la signalétique du réseau à l'échelle européenne, où en est l'avancement de ce programme en France ?
HF&DG. Il suit son cours et à la fin de mois de mars, 65 sites s'étaient d'ores et déjà équipés avec la nouvelle signalétique.
JA. Dans la problématique de rentabilité, le financement joue aujourd'hui un rôle essentiel, quels sont les atouts de Toyota pour les offres de financement, de promotions et/ou de reprise ?
HF&DG. Toyota Financial Service nous accompagne depuis plus de huit ans dans le développement de notre marque. Outre son rôle pour le financement du réseau et le portage financier des stocks VN, VD, et VO, notre captive a développé pour les clients finaux une offre complète de produits de financement (crédit classique, LOA, crédit-ballon, location financière…) et plus particulièrement, la Combinaison Toyota, offre packagée qui comprend le financement, l'entretien, et le véhicule de remplacement. Concernant les offres promotionnelles, ces dernières sont naturellement conditionnées par l'environnement concurrentiel, même si nous prenons toujours soin de ne pas risquer de dévaloriser le produit. En somme, en phase de conquête, nous privilégions souvent des offres de reprise qui permettent à nos concessionnaires de gérer au mieux la reprise de modèles de marques concurrentes.
JA. Etes-vous inquiets, notamment pour vos modèles phares des segments A et B, à l'évocation d'une guerre des prix qui s'annonce très âpre sur le marché en 2006 ?
HF&DG. Nous sommes pleinement conscients que cette guerre des prix sera rude. D'autant que certains constructeurs semblent se dégager un peu du marché des loueurs pour se repositionner sur celui des particuliers. C'est-à-dire notre marché, puisqu'il représente 70 % de nos ventes. Mais nous ne sommes pas inquiets outre mesure. Nous nous adapterons à la conjoncture si besoin est, mais il convient d'insister sur le fait que nous ne braderons la valeur de la marque sous aucun prétexte. Nos remises sont d'ailleurs souvent moindres que celles de la concurrence. Et nous pouvons nous le permettre. Prenez l'exemple de la Yaris : le trend actuel porte sur 31 000 à 32 000 commandes, soit au-delà de notre objectif initial de 29 000 ventes.
JA. Revenons au réseau à proprement parler, quels sont les outils spécifiquement empreints de l'identité Toyota que vous fournissez à vos distributeurs ?
HF&DG. Depuis plusieurs années, nous initions notre réseau à la culture du Toyota Way, et notamment du Kaizen. Cette approche, propre à notre marque, vise à sensibiliser en permanence nos partenaires sur les gains de productivité qu'ils ont à accomplir. Nous sommes particulièrement actifs dans le domaine de l'après-vente où les équipes "Kaizen" ont mis en place, dans plus de 50 concessions, le TSM (Toyota Service Marketing, en référence au fameux Toyota Production System), ainsi que de nouvelles méthodes de gestion des stocks de pièces. Plus récemment, nous avons élargi cette approche "Kaizen" à l'activité VO, afin de faire la chasse aux temps morts, coûteux en immobilisation financière, et à l'Express Service. Ce chantier constitue l'aboutissement d'une politique de suivi personnalisé du client en après-vente, avec un service d'entretien rapide sur rendez-vous avec deux techniciens. Enfin, nous avons beaucoup investi depuis deux ans dans les bases de données gérant le suivi des clients et des prospects. Avec des outils web conviviaux et intégrés à l'univers Toyota, notre réseau est équipé de moyens efficaces pour être localement autonome dans sa politique de marketing et actif dans le domaine de la relation client. C'est d'ailleurs parce que le client est au centre de nos préoccupations que nous avons récemment modifié nos enquêtes de CSI (Customer Satisfaction Index).
JA. Quels objectifs poursuivez-vous avec cette nouvelle mouture des enquêtes CSI ?
HF&DG. Les objectifs sont multiples, mais disons que la fidélisation des nos clients constitue bien entendu à nos yeux un enjeu capital. D'autant qu'un client fidélisé coûte moins cher qu'un client à conquérir. Par ailleurs, il s'agit de mettre à niveau la qualité de nos services avec celle de nos véhicules. Nous voulons être les leaders dès 2007 en matière de satisfaction client.
JA. On imagine que vous avez identifié des points à améliorer avant de lancer cette opération, quelles sont les axes prioritaires en vente comme en après-vente ?
HF&DG. Pour la vente, trois principaux items peuvent être mis en avant : "découverte et essais de la gamme", ce qui implique une meilleure exploitation des véhicules de démonstration, "livraison VN", et "suivi du client après la livraison". C'est un axe d'autant plus important que nous recrutons de nombreux vendeurs, ce sera encore le cas cette année, et que nous devons les intégrer dès le départ dans cette nouvelle démarche. En ce qui concerne l'après-vente, la gestion des prises de rendez-vous, et les opérations de restitution des véhicules, au sens large, c'est-à-dire comprenant notamment le respect des délais et des devis, sont au premier rang de nos priorités.
JA. Quelles sont les nouvelles modalités de cette enquête CSI ?
HF&DG. En fait, l'ensemble du dispositif a été allégé et fluidifié, avec l'abandon des documents papier au profit du téléphone et de l'e-mail. Nous pouvons être ainsi plus réactifs. Par exemple, en cas de plainte d'un client, via un système de "hot alert", le concessionnaire peut intervenir très rapidement. D'un point de vue général, cette initiative s'inscrit dans le cadre de la modification de nos standards performances qualités. Comme de nombreux critères périphériques, les standards CSI sont désormais liés à la rémunération du concessionnaire. Cela représente environ 45 euros par voiture pour le concessionnaire.
JA. Comment cela a-t-il été accueilli par les membres du réseau ?
HF&DG. Bien. D'une part, tout le monde était d'accord sur le principe et d'autre part, le levier de la rémunération joue son rôle de pression et de motivation. En appliquant cette nouvelle méthode, les concessionnaires vérifient qu'ils obtiennent une meilleure capacité d'intervention sur les clients, en cas de problème notamment. En outre, pris à l'échelle d'un site, le CSI peut devenir un outil de management précieux qui va bien au-delà de la sanction.
JA. Il est toujours facile de décréter que l'on va devenir 1er en termes de satisfaction client, mais on sait que ce type de démarche nécessite un suivi sans faille pour être efficace dans la durée, qu'avez-vous mis en place dans ce domaine ?
HF&DG. Cette problématique est désormais intégrée dans nos formations et elle fait l'objet d'une convention annuelle dédiée. On y évoque les "best practices" du réseau et on fait aussi du bench-marking avec d'autres secteurs d'activités.
JA. Vous évoquiez tout à l'heure l'après-vente, quelle sera votre politique de développement pour votre réseau de réparateurs agréés ?
HF&DG. Nous restons fidèles à nos partenaires, même pour l'après-vente. Nous avons cessé toute forme de campagnes de recrutement externe. Même si nous acceptons, bien entendu, les indépendants performants qui correspondent à nos standards. La priorité reste néanmoins de nommer des réparateurs agréés qui appartiennent au réseau.
JA. Comptez-vous développer l'activité carrosserie qui est absente de plusieurs de vos sites, ce qui entraîne un schéma classique de sous-traitance, mais aussi parfois une sous-traitance plus fâcheuse vers des concurrents et in fine, une perte de business ?
HF&DG. C'est effectivement à l'ordre du jour. Nous voulons capter ce business. Un vaste programme est en cours de lancement et fonctionne déjà sur certains sites-pilotes.
JA. Pour conclure, confirmez-vous que le réseau Lexus est désormais presque "autonome" ?
HF&DG. Tout à fait. Un département Lexus a été créé et fonctionne de façon autonome. Avec ses propres moyens dédiés, notamment humains. En fait, au niveau de Toyota, nous assurons désormais pour Lexus des missions de back-office, comme la gestion des contrats par exemple, mais nous avons passé le flambeau à la nouvelle équipe pour les questions de développement et de marketing.
Propos recueillis par
Alexandre Guillet
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