Alain Visser, vice-président d'Opel
Journal de l'Automobile. Quelles sont vos ambitions pour le nouveau Meriva ?
Alain Visser. Nous n'avons communiqué aucun chiffre sur le sujet car la voiture sera introduite en milieu d'année puis déployée entre juin et septembre. Nous n'avons donc rien défini pour cette année. En revanche, nous espérons un volume de 100 000 unités en année pleine. C'est une voiture importante pour nous car elle remplace un véhicule qui a été phénoménal pour la marque puisque, même si le modèle actuel est relativement âgé, il demeure leader de son segment. Ce qui est incroyable, au regard des nombreux produits compétitifs essayant de prendre sa place, particulièrement sur le marché français. Il nous fallait donc faire autre chose qu'une simple évolution. Il nous fallait quelque chose de différent, pour apporter de nouveaux avantages aux consommateurs. C'est, par exemple, ce que nous avons fait avec les portes antagonistes.
JA. L'an dernier, ce sont plus les incertitudes liées à votre avenir que les produits Opel qui ont fait la Une des journaux. Cela vous pénalise-t-il aujourd'hui, alors que vous lancez des produits importants ?
AV. Je suis sidéré du traitement qui nous a été accordé dans certains articles de presse ces derniers mois. J'avais l'impression que si rien de mauvais ne se passait dans le monde, il suffisait de parler d'Opel. Aussi, pour beaucoup de journalistes, la marque revient de l'enfer. Malgré cela, certains continuent à chercher des problèmes. Nous avons déjà enregistré 100 000 commandes pour notre nouvelle Astra alors que notre objectif pour 2010 est de 180 000 ventes. Je ne comprends donc pas qu'on puisse imaginer que nos voitures ne se vendront pas. L'aide d'1,9 milliard d'euros accordée par General Motors tombe justement à point pour nous. Elle met un terme à seize mois de spéculations quant à l'arrivée de nos futurs modèles. De manière directe, notre plan produits à court terme est désormais sécurisé.
JA. Cette mauvaise presse n'a donc, selon vous, pas impacté la confiance de vos clients…
AV. Le fait est que, en Allemagne, notre pénétration a fait mieux que se maintenir et qu'à travers l'Europe, nos différents rapports montrent que l'image d'Opel s'est même améliorée en 2009. Ce qui démontre vraiment que le client voit d'abord le produit et pas la situation du constructeur. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'y a eu aucune incidence. Je dis simplement qu'il faut imaginer quelles auraient été nos performances si nous n'avions pas eu une telle mauvaise presse. La bonne chose, c'est que cela n'a pas affecté notre business aussi négativement que nous pouvions le penser.
JA. Comment avez-vous vécu justement 2009 en termes de pénétration ?
AV. En Europe, nous avons perdu 0,2 point de parts de marché et sommes passés de 6,6 % à 6,4 %. Mais sur notre marché domestique, nous avons gagné 0,5 point en progressant de 8,4 à 8,9 %. Je pense donc que c'est finalement une assez bonne performance.
JA. Avec votre nouvelle organisation, Opel semble plus "allemand" et plus autonome qu'elle ne l'a jamais été ?
AV. L'une des conséquences de la décision de GM de ne pas vendre à Magna est en effet que la marque ne doit pas s'effacer derrière la maison mère, mais au contraire faire valoir son identité. Il y a un engagement très clair de General Motors en la matière. Il faut accroître l'autonomie de la marque. Nous avons donc réellement besoin de retourner aux racines de la marque. Or, ces racines sont en Allemagne. Ce qui tombe plutôt bien puisque, être allemand semble être une bonne chose lorsque l'on fabrique des produits de haute technologie. Et c'est encore plus vrai quand on vend des voitures. Nous allons donc nous recentrer sur l'ingénierie allemande. D'ailleurs, notre nouvelle communication n'est pas anodine. La signature "Wir leben Autos", qui accompagne notre logo, reste écrite en allemand quel que soit le pays. Et, à ce sujet, nous n'avons reçu aucun commentaire négatif. Ni de nos distributeurs, ni de nos clients. Nous allons donc capitaliser sur nos racines allemandes.
JA. Au niveau des produits, comment cela va-t-il se traduire ?
AV. Nous avons cherché à établir ce qui compose l'ADN de la marque. Qu'est-ce qui fait qu'une Opel est une Opel ? Pourquoi le Meriva est-il un produit de notre marque, pourquoi est-il différent ? En termes de suspension, de conduite, de châssis, de design… Quels sont les traits qui nous différencient ? Chaque produit développé pour Opel, partout sur la planète, est finalisé à Rüsselsheim, de manière à être sûr qu'il corresponde à nos exigences. C'est un point sur lequel nous allons beaucoup insister dans le futur. Ce n'est pas à un ingénieur basé en Corée de nous apporter un véhicule tout fait. Tout passe par l'Allemagne. Tout doit être fait à Rüsselsheim.
JA. Sera-ce suffisant pour performer davantage ?
AV. Jusqu'à récemment, Opel était la marque originale de GM en Europe. Désormais, nous voulons être une marque globale, basée en Allemagne. Nous voulons exporter la marque dans d'autres régions. Et nous travaillons très dur à cela. J'ai, à me côtés, toute une équipe qui ne travaille qu'à cela.
JA. Sur quels marchés souhaitez-vous vous implanter ?
AV. Nous envisageons toutes les opportunités. Nous regardons tous les marchés sur lesquels Opel n'est pas commercialisée et où la marque n'est pas assez représentée. Nous analysons le potentiel de chaque marché, ce que nous pouvons envisager, mais aussi la meilleure manière de nous y implanter. C'est un long travail. Tout est possible et rien n'est arrêté. Une chose est certaine, le plan de Magna nous fermait l'accès à certains marchés. Aujourd'hui, avec notre organisation actuelle, nos possibilités sont illimitées.
JA. Le plan de GM est donc finalement meilleur que celui prévu à l'époque par Magna…
AV. C'est une conclusion un peu rapide. Ce que je peux dire, c'est que tout le monde est très content de la manière dont nous travaillons aujourd'hui. Les possibilités sont énormes et le potentiel d'expansion actuel est en effet plus important que celui que nous réservait le plan de Magna. Selon moi, la configuration actuelle de GM reste un modèle. Elle donne plus d'autonomie et de capacité en termes de développement, d'ingénierie et de croissance. C'est le scénario parfait. Surtout avec le support que la maison mère vient de nous apporter pour pérenniser notre situation. Pour autant, nous devons bien avoir à l'esprit qu'Opel ne peut pas survivre avec 1,2 ou 1,5 million de véhicules par an.
JA. Pouvez-vous développer cette stratégie tout en délaissant certains sites de production actuels pour des implantations hors d'Europe ?
AV. Deux choses. La première, c'est que notre expérience montre que le lieu de production importe peu pour le client. Qui se soucie vraiment de cette question quand il achète un véhicule ? Le lieu de fabrication n'est pas très pertinent par rapport aux racines de la marque et à son ADN. La 2e chose, c'est l'aspect financier. Avec les différentes devises et les taux de change, si vous produisez une voiture en Europe et que vous voulez la vendre au Mexique ou en Chine, il vous sera très difficile de gagner de l'argent.
JA. Les marchés européens peuvent-ils se passer des différentes primes à la casse mises en œuvre l'an dernier ?
AV. En 2009, sans le soutien de différents gouvernements, l'industrie automobile européenne aurait été bien plus mauvaise que ce qu'elle n'a été. Notamment en Allemagne et en Espagne. Nous encourageons donc vivement les différents gouvernements à poursuivre leur soutien. Nous les encourageons d'autant plus que pour 2010, tout le monde annonce des prévisions de marché en retrait de 1,5 million d'unités par rapport à 2009. Ce qui veut dire, qu'à parts de marché égales, tous les constructeurs perdront des volumes. Ce n'est pas bon pour l'industrie. A partir du moment où les primes à la casse permettent d'envoyer les voitures polluantes au rebut, d'offrir aux consommateurs des meilleures conditions d'achat, de soutenir la filière et de stimuler l'économie, nous ne pouvons qu'espérer que ces programmes se prolongent.
JA. Pour parler produit, certains annoncent un petit véhicule dans votre gamme. Est-ce exact ? Puis, Opel a-t-il les moyens de développer, seul, un tel projet et en faire une voiture profitable ?
AV. Je crois qu'il est illusoire de croire que tous les constructeurs concernés font un business rentable avec des petits véhicules. C'est pour cette raison qu'il y a autant de partenariats dans le domaine. Je pense qu'il est presque impossible de faire un business réellement rentable sur ce segment. A cause de la législation sur le CO2, notamment, ce marché est en train de croître de manière considérable et je crois que nous ne pouvons pas stopper cette tendance. Alors oui, nous devons être présents sur ce segment. Et notre plan le prévoit. Nous travaillons actuellement sur un petit modèle qui viendrait devant Corsa et Agila dans notre gamme. Je considère qu'une telle voiture ne doit pas nécessairement être peu chère, mais obligatoirement petite. Nous ne chercherons donc pas à nous positionner en tant que véhicule à bas prix, mais plutôt comme un petit modèle "fashion".
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