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Les vents porteurs de la garantie panne mécanique

Publié le 10 mai 2021

Par Catherine Leroy
11 min de lecture
La garantie automobile se joue des éléments sur un marché des ventes automobiles en berne. Portée par la LOA, la croissance des gammes électrifiées et l’appétence des distributeurs pour le commerce VO, la tendance augure des perspectives attractives.
Les garanties "Tout sauf" sont appelées à devenir le standard pour les véhicules âgés de 3 à 7 ans.

Par Ludovic Bellanger

 

Si le contexte actuel reste forcément singulier, marqué par la crise sanitaire, les confinements et les couvre‑feux, les conséquences se sont révélées plus mesurées en matière de garantie. "2020 a été une année particulière qui laissait craindre un impact sévère sur nos performances, explique Daniel Beliki, directeur du développement de Covéa Affinity. En réalité, nous constatons qu’il y a eu plus de peur que de mal. Les ventes de garanties ont mieux résisté."

 

Les variations enregistrées au cours de l’année se sont traduites par un pic d’activité inédit enregistré en plein été. "2020 s’est révélée pleine de surprises. De manière paradoxale au regard du marché automobile et des confinements, les performances de la garantie en volume et en valeur sont apparues quasi étales par rapport à 2019 ", confirme Gil Warembourg, directeur France de CarGarantie. Elles ont bénéficié de la vitalité du marché de l’occasion. La pénurie de stocks sur le VN favorisant le commerce de VO récents et donc de garanties.

 

La couverture panne mécanique reste liée à la vente de véhicules, avec un prisme particulier sur le VO, rappelle Cyril Petit, directeur général d’Icare. Le marché a affiché un repli "modéré", abonde le dirigeant, à l’image d’un segment du VO à particulier entré en résistance avec une baisse limitée à 4,5 %.

 

Dans les faits, la progression du taux de pénétration des extensions de garantie, tant sur le VN que sur le VO, a atténué le repli en volume du marché global. La chute des ventes durant la crise n’a eu qu’un "impact limité" sur le portefeuille total, selon Daniel Blanckart, responsable commercial France de Covéa Affinity. Car si l’offre de nouveaux moyens de mobilité, comme les trottinettes ou les bicyclettes, a connu une expansion sans précédent, son développement s’est fait au détriment des transports en commun. Dans une période où la proximité physique apparaît comme un facteur de risque, disposer d’un moyen de déplacement individuel séduit.

 

Malgré un environnement contraint, Opteven a ainsi affiché un nombre de souscriptions en croissance. La prise de parts de marché s’est faite à la fois du côté des distributeurs et des acheteurs. "Le segment BtoBtoC a fortement augmenté, constate Albert Etienne, directeur général d’Opteven, qui souligne la dynamique du marché. La garantie reste une source de fidélisation pour les distributeurs et de rémunération."

 

 

De l'influence des gammes électrifiées

 

 

À l’heure du bilan, les professionnels ont davantage fait appel à la garantie, au détriment de l’autoassurance, observe encore Daniel Beliki. La tendance s’explique par plusieurs phénomènes. Sur le plan conjoncturel, dans une période économique difficile, les distributeurs ne souhaitent pas prendre de risques. Dans le même temps, la typologie du parc assurable enregistre une transformation profonde.

 

L’absence de recul significatif sur les véhicules d’occasion électriques et hybrides justifie la mise en place d’une couverture. Elle vise à rassurer les distributeurs qui ne veulent pas s’exposer, comme le client final qui découvre les modèles électriques (hybrides rechargeables ou hybrides) à travers l’achat d’un VO. Le taux de pénétration des garanties sur ces modèles se révèle d’ailleurs supérieur aux versions thermiques. Il dépasse les 50 %. "Les professionnels ne savent pas comment ces technologies vont se comporter dans le temps, notamment après 5 ans", poursuit le dirigeant.

Pour autant, "techniquement, nous pensons qu’il y a moins de complexité sur un moteur électrique par rapport à une version thermique", analyse Daniel Blanckart.

 

Le taux de pénétration des garanties sur les modèles électriques qui s'élève à 50 %, se révèle supérieur aux versions thermiques.

 

 

En revanche, des zones d’ombre persistent sur la batterie de traction. Last but not least, ses différentes générations aux technologies évolutives constituent des paramètres supplémentaires à prendre en compte pour les garantisseurs. Dès lors, la vente des modèles électrifiés, alimentée par la nécessité pour les constructeurs de se conformer aux indicateurs CAFE, a conduit les enseignes à accélérer la mise à jour de leurs contrats et les constructeurs à les intégrer à leur label VO. Avec une centaine de nouveautés attendues cette année, les garantisseurs prévoient une vague de retours d’ici 36 mois.

 

"Le marché du VO électrique va se créer, affirme le représentant d’Opteven.Les distributeurs s’intéressent au sujet." Le groupe lyonnais a d’ores et déjà anticipé la demande à travers son nouveau programme e‑Move. Le dispositif prévoit une assistance en cas d’immobilisation suite à un défaut de la batterie de traction ou de bornes de recharge indisponibles.

 

Outre des services adaptés, les pièces spécifiques au VE sont intégrées au contenu du contrat, à l’image du câble de recharge ou même de la batterie. Une progression des modèles électrifiés dans le marché de l’occasion prise en compte également du côté de CarGarantie. "Toutes nos couvertures sont modulables en fonction des motorisations thermiques, hybrides et électriques", fait savoir Gil Warembourg. Sur ces dernières versions, la garantie revêt un enjeu majeur, glisse Cyril Petit. "Il est nécessaire d’adapter les gammes de produits. Cela permettra de rassurer et de maintenir les valeurs résiduelles (VR) des véhicules électriques en buy‑back qui restent encore incertaines."

 

 

La LOA, relais de croissance

 

 

Dans le même temps, l’extension de garantie bénéficie désormais du financement en LOA des modèles d’occasion (dont la chaîne de TVA n’a pas été rompue). La location avec option d’achat "draine et favorise la souscription de garanties", souligne Guillaume Cazenave, directeur marketing d’Opteven. Le service se trouve le plus souvent intégré aux offres packagées des constructeurs. Le loyer associe véhicule, financement et garantie, voire entretien et assistance. "La LOA a conquis le marché du VN. Son essor sur le VO concourt à augmenter le taux de pénétration de la garantie sur l’occasion", nous dit Cyril Petit.

 

À l’heure où la LOA s’impose comme le moyen de financement préféré des acheteurs (elle représente 70 % des transactions), un véhicule sous garantie permettra également de préserver sa valeur résiduelle. "Elle apporte la certitude que le véhicule sera entretenu selon les normes du constructeur, avec des pièces d’origine", poursuit Daniel Blanckart. L’enjeu est stratégique. Seul un quart des clients lève, en effet, l’option d’achat au terme d’un contrat de location. Dès lors, les distributeurs enregistrent un nombre conséquent de retours de VN récents qu’ils peuvent recommercialiser.

 

"Avec le développement des nouveaux modes de financement, les constructeurs se retrouvent à la tête de parcs de VO très importants. Ils représentent potentiellement un risque financier considérable", poursuivent les représentants de Covéa Affinity. Soutenir la valeur résiduelle devient un élément central à la viabilité du modèle économique. En ce sens, la garantie constitue un levier important, avance Daniel Beliki. "Le bon entretien passé et l’octroi d’une garantie de qualité aux véhicules remis en vente permettent de soutenir leur cote. Cela contribue à ne pas dévaluer le parc." Gil Warembourg temporise néanmoins l’effet de la LOA des VO sur le segment. "Objectivement, quel que soit le mode de financement retenu, le véhicule est garanti de la même manière. La LOA ne va pas bouleverser les taux de pénétration, ni le marché."

 

 

Des couvertures adaptées à chaque VO

 

 

Résultat, le taux de pénétration - variable d’une marque à l’autre - se situe entre 20 % et 40 % en matière d’extensions de garantie sur le VN. Sur le VO, les formules locatives devraient faire progresser mécaniquement leur souscription. L’orientation favorise des garanties toujours plus couvrantes.

 

La formule "tout sauf", née avec la garantie Or de Renault, a fait école. Excepté sur des VO anciens, la version moteurboîte-pont disparaît. "Le client est de plus en plus informé, vigilant et demandeur d’une couverture complète", observent encore les responsables de Covéa Affinity. L’adoption d’une garantie "tout sauf" est appelée à devenir le standard sur les modèles de 3 à 7 ans, estime d’ailleurs Cyril Petit.

 

Excepté sur des voitures d'occasion anciennes, la garantie, version moteur-boîte-pont disparaît.

 

 

L’objectif est aussi d’éviter toute formule qui pourrait se révéler déceptive à l’usage. Une tendance de fond qui compose dans le même temps avec l’appétence grandissante des distributeurs pour les VO plus âgés. Elle conduit les garantisseurs à adapter leurs CGV, en prenant en compte les GPS ou les technologies liées à l’AdBlue par exemple, du côté d’Opteven.

 

Les réflexions répondent au cycle de vie des véhicules qui s’allonge dans les réseaux de marque. À l’image du label Spoticar du côté de Peugeot‑Citroën ou du programme Prix Futés de Renault, les marques s’intéressent Le véhicule connecté pourrait faire évoluer la garantie vers le modèle de l’assurance dommage calculée au kilomètre, ou en "pay as you drive" aux modèles de plus de six ans.

 

Et pour cause : "Si le VO tire le VN, le VO ancien tire le VO récent !", fait savoir Daniel Beliki. Les distributeurs en quête d’espace d’expression commerciale s’emparent également du sujet. Ils déploient leur signature low cost afin de gérer la vente de VO écoulés auparavant auprès des marchands ou des enchéristes. Un choix amené à se développer, selon les dirigeants d’Opteven. Le VO constitue un axe d’investissement important des professionnels comme des constructeurs, remarque Guillaume Cazenave. "Nous accompagnons de nombreux groupes de distribution à travers la mise en place de labels en marque blanche. Les offres sont adaptées en matière de couverture mécanique, de tarif et de marge".

 

Car plus le véhicule est âgé et kilométré et plus le pourcentage représenté par le coût de la garantie sera important, souligne Daniel Blanckart. "Il ne faut pas survendre une garantie, prévient d’ailleurs Cyril Petit. Il faut proposer des produits qui correspondent bien aux besoins de l’acheteur, en précisant clairement les éléments couverts." Si la garantie tout sauf, appelée également "bumper‑to‑bumper", apparaît dans l’ère du temps, la version moteur‑boîte‑pont n’a pas dit son dernier mot !

 

Chaque acteur du marché doit adapter les couvertures proposées, insiste Gil Warembourg. "Nous encourageons les concessionnaires ou les négociants à appliquer des garanties qui soient les plus cohérentes avec l’âge du véhicule, en matière de durée, d’obligations légales, d’équipements ou de pièces prises en charge", explique le dirigeant. Les programmes de garantie panne mécanique ont été repensés en ce sens. Ils permettent, du côté de CarGarantie, de couvrir des modèles jusqu’à 15 ans d’âge ou 200 000 km ! Des réflexions qui retiennent l’attention des distributeurs. Et pour cause. "Nous constatons une réelle prise de conscience autour du commerce VO, souligne son dirigeant. Il devient une activité majeure pour les concessionnaires, au même titre que l’atelier."

 

L’enjeu devient crucial à l’heure où le véhicule électrique bouleverse l’équilibre économique du marché. "La garantie demeure un outil de fidélisation en après‑vente, rappelle Daniel Blanckart. Elle favorise l’entretien dans le réseau de marque."

 

 

Un levier de marges additionnelles

 

 

À l’avenir, le segment pourrait aussi bénéficier de la mobilisation des professionnels. Afin de compenser la baisse des volumes de vente enregistrée l’an dernier sur le VN et le VO et face aux incertitudes actuelles, les réseaux veilleront, en effet, à activer tous les leviers disponibles. La distribution de services additionnels, dont le panel ne cesse de s’élargir autour de l’entretien, de l’assurance décès, invalidité ou chômage, du satisfait ou remboursé, de la valeur à neuf garantie, du financement et forcément de la couverture panne mécanique, en fait naturellement partie.

 

A lire également : Les vertus des extensions de garantie décryptées

 

L’appétence des distributeurs bénéficie déjà des programmes de formation mis en place notamment par Opteven. L’objectif est d’aider les vendeurs à comprendre, expliquer et commercialiser les garanties, souligne Guillaume Cazenave. Accompagner les réseaux constitue aussi le leitmotiv de CarGarantie. Du réceptionnaire en atelier lors de la déclaration d’un sinistre, à la secrétaire commerciale pour son enregistrement, en passant par les vendeurs amenés à détailler la garantie au moment de la livraison du véhicule, l’approche revendique une philosophie fondée sur la transparence et la pédagogie. Le contexte actuel favorise une certaine dynamique. D’après le dirigeant d’Icare, la sortie de la crise sanitaire qui se profile pourrait déboucher sur une période économique tendue. "La sensibilité à la protection de ses actifs pour faire face à des frais imprévus, ainsi que l’attrait pour les solutions de garantie de la part des automobilistes vont augmenter."

 

 

Des perspectives qui conduisent Cyril Petit à conclure : "La garantie a de beaux jours devant elle. "À condition de disposer d’offres bien positionnées, remarque Albert Etienne. Les besoins favorisent les packages complets associant loyer-entretien-garantie, pressant le dirigeant d’Opteven. Déjà en croissance, le potentiel de développement de ces formules serait des plus prometteur.

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