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Les réseaux analysent les chiffres

Publié le 18 mars 2014

Par La Rédaction
8 min de lecture
Face à des chiffres 2013 qui illustrent encore un peu plus la tendance baissière de la rentabilité des centres, les réseaux nous ont exposé leur vision et leurs craintes face à des centres chaque année un peu plus nombreux.
Face à des chiffres 2013 qui illustrent encore un peu plus la tendance baissière de la rentabilité des centres, les réseaux nous ont exposé leur vision et leurs craintes face à des centres chaque année un peu plus nombreux.

Comme les chiffres du bilan de l’OTC l’ont montré, le marché du contrôle technique est en très légère progression, à 2,6 %. Une progression qui ne compense malheureusement pas les trop nombreuses ouvertures de centres, 119 au total. Globalement, les centres souffrent. Balayons de suite un fâcheux paradoxe. Tout le monde s’accorde à reconnaître qu’il ne faudrait plus nommer de nouveaux centres, et pourtant l’ensemble de la profession continue d’en ouvrir, certains plus que d’autres, et parfois même avec des discours très arrêtés sur le sujet…

Le marché s’est durci, de nombreux centres se créent sans même présenter le potentiel suffisant pour gagner leur vie, et les prix chutent, tentés que sont certains professionnels à récupérer facilement de la clientèle. Quand bien même un réseau refuserait d’acter une candidature, ils finissent tout de même par exercer, in fine, en indépendant. Mais ce qui est encore plus grave, c’est que ces centres, de toute façon voués à l’échec à plus ou moins long terme pour une partie d’entre eux, prennent des parts à des centres installés et rentables, et risquent de les mettre en péril.

Chez Dekra, le solde se montre positif de 25 centres en 2013, soit 15 % de la création de centres au plan national, “alors que nous enregistrons 25 % de parts de marché. Ce qui signifie que nous poursuivons une démarche de développement raisonné, afin de protéger nos adhérents en place”, affirme Nicolas Bouvier, président du réseau Dekra Automotive.

Ainsi, son réseau perd quelques points de parts de marché cette année, puisque dès lors que l’on réalise moins de créations de centres que ses parts de marché, cela finit par se voir sur la représentativité du réseau. Mais “c’est notre vision responsable du métier et c’est une politique de relations à long terme avec notre réseau, car le plus important, pour un franchisé, est d’être sûr que son franchiseur ne va pas autoriser l’ouverture d’un centre juste à côté ! Ainsi, chez Dekra, nous demandons systématiquement l’avis des franchisés en place sur une candidature. Nous ne passons jamais en force. C’est un fonctionnement unique, par cooptation”, poursuit Nicolas Bouvier. Mais ce mode de fonctionnement se révèle complexe à gérer car, dans un cas sur deux, les candidatures viennent d’un adhérent en place, qui souhaite se développer. Et en cas de refus, il faut prendre garde à ce qu’il ne se laisse pas séduire par les sirènes de la concurrence…

Créer pour bloquer la concurrence

Chez Sécuritest, on avance même le chiffre de 85 % de candidatures nouvelles émanant d’affiliés qui cherchent à verrouiller leur zone de chalandise. “Nos adhérents cherchent à saisir les opportunités qui se présentent sur leur zone, pour éviter qu’un concurrent ne s’y installe”, reconnaît Martine Houlière, présidente de Sécuritest. Le réseau a quasiment maintenu ses parts de marché à 17,71 % en 2013, contre 17,79 % en 2012. Et pour Martine Houlière, “ces résultats s’expliquent par le dynamisme des gérants de centres et une vraie utilisation des outils, puisqu’il n’y a pas eu de changement profond de législation cette année nous offrant un accroissement automatique d’activité”.

Du côté d’Autovision, on se satisfait de chiffres encourageants. “Nous sommes les seuls à avoir progressé en parts de marché, avec 16,47 % en 2013. A mon sens, c’est le critère essentiel pour définir la bonne santé d’un réseau, avec le nombre de contrôles par centre, qui prouvent que le développement a été harmonieux”, analyse Hervé de Labriffe, directeur général du réseau Autovision. Enfin, Bernard Desbouvry, directeur général de Secta Autosur, considère 2013 comme un bon millésime : “Le premier semestre a été difficile, avec un marché extrêmement plat. Nous commencions à nous inquiéter, car les véhicules issus de la prime à la casse de 2009 n’arrivaient pas. Puis le second semestre s’est montré plus dynamique, et nous avons finalement enregistré une croissance de 2 à 3 % en volume.”

L’administration pointée du doigt

Pour les opérateurs réseaux, qui sont pourtant ceux qui ouvrent les centres, c’est aux pouvoirs publics de réguler le marché. “Nous travaillons sur un marché réglementé, avec des contraintes, alors que nous n’avons pas la même protection que les pharmacies ou les bureaux de tabac, par exemple, s’étonne Martine Houlière. L’Etat ne fait rien pour enrayer l’augmentation du nombre de centres.” Du coup, il est exact que, depuis quelques années, des centres ont été placés en redressement, voire en liquidation judiciaire, par manque d’activité, ce qui n’arrivait pas auparavant. Bernard Desbouvry milite également pour une régularisation du marché : “Nous aimerions que le ministère prenne conscience que cette délégation de service public impose de maîtriser le nombre d’ouvertures des centres. Depuis trois à quatre ans, nous faisons face à des ouvertures débridées de centres, surtout par des indépendants. Ces créations font chuter les prix. Or, il est impossible de créer davantage de clients pour le contrôle technique, on ne fait que les déplacer d’un centre à l’autre.” La charge est lancée. Derrière cette demande désespérée d’intervention des pouvoirs publics, se cache en fait une attaque en règle des indépendants, qui représentent 80 ouvertures sur les 171 nouveaux centres de 2013. “Cela pose problème et entraîne des guerres de prix, sans parler de la question relative à la qualité des contrôles…”, poursuit Martine Houlière. Car un centre ne peut pas réaliser d’économies structurelles. S’il baisse ses prix, il faut qu’il augmente ses volumes. “Le nombre de contre-visites est en baisse, alors que le parc contrôlé continue de vieillir. J’en déduis un certain laxisme des centres qui ont besoin de capter ou fidéliser une clientèle par des visites complaisantes”, conclut Bernard Desbouvry. Seule voix dissonante, celle d’Autovision. Hervé de Labriffe compte sur la sélection naturelle : “les adhérents actuels ouvrent des centres pour occuper le terrain et suivre la mutation des villes en s’implantant sur de nouvelles zones commerciales. Nous allons vers l’émergence d’un acteur qui prendra la main sur une ville, un département ou une région, et la disparition des petits centres, ou des moins rentables. C’est une évolution logique, que nous encourageons, comme dans la distribution automobile. Il faut y voir plus d’opportunités que de dangers !”   Enfin, Dekra choisit de se battre contre les centres indélicats, qui pratiquent des contrôles de moins bonne qualité ou de complaisance. “Nous allons constituer des dossiers et dénoncer plus systématiquement les centres dont nous aurons pu établir les mauvaises pratiques”, prévient Nicolas Bouvier. Dernier exemple en date, le cas de deux centres dans le Calvados, qui exercent sans agrément depuis plusieurs années, sans que personne ne s’en émeuve… “Nous sommes face à un individu qui a perdu son agrément il y a huit ans, et qui continue pourtant à faire passer des visites, à imprimer des rapports… Nous avons dénoncé plusieurs fois cette invraisemblance au procureur de la République, mais il ne se passe rien. C’est inadmissible, on ne devrait même pas avoir à intervenir. Il est dans l’illégalité la plus totale !”

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VERBATIMS

Hervé de Labriffe
“Aujourd’hui, plus de 55 % du parc roulant a plus de 7 ans. Or, les statistiques démontrent que ces véhicules présentent presque trois fois plus de défauts lors des visites de contrôle technique. Nous pensons que l’intérêt d’une visite annuelle pour cette catégorie est donc avéré.”

Nicolas Bouvier
“L’arrivée d’Autovision au sein du CNPA est une bonne nouvelle, et j’espère que d’autres démarches suivront. Ce qui est important, c’est de fédérer un maximum de monde au sein d’un syndicat représentatif, pour peser le plus possible dans les négociations avec l’administration. Aujourd’hui, plusieurs syndicats atomisent une profession qui n’est, de surcroît, pas très nombreuse. A ce titre, je pense qu’il faut tous être au même endroit. Au CNPA, nous sommes très ouverts à d’autres opérateurs qui souhaiteraient nous rejoindre. Et je pense qu’avec les questions qui vont se poser dans l’année sur la représentativité des syndicats, c’est sans doute le moment d’unir nos forces…”

Martine Houlière
“Nous souhaiterions que le ministère impose un temps minimum de contrôle, autour de trente minutes, afin de s’assurer que la prestation est réalisée correctement. Par ailleurs, nous militons pour un passage par an des véhicules utilitaires au contrôle technique. Ces derniers roulent beaucoup, souvent en surcharge, avec des conducteurs multiples. Le VU est donc malmené. Il y a un réel intérêt pour la sécurité routière dans cette démarche.”

Bernard Desbouvry
“Il faut maintenir le contrôle technique des véhicules de collection. Parmi les véhicules de 30 ans d’âge, on compte par exemple la 205 GTI, qui roule à plus de 200 km/h. Le contrôle ne s’adresse pas qu’aux tacots de 1918 ! Et je souligne que les véhicules de collection représentent moins de 0,1 % du marché, soit des volumes très faibles. C’est pour nous une question de déontologie. Nous estimons que tout ce qui roule doit être contrôlé, et cela concerne donc aussi les caravanes et les deux-roues.”
 

Clotilde Chenevoy et Frédéric Richard

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