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Industrie

Plastic Omnium accélère sur l'hydrogène

Publié le 3 décembre 2019

Par Christophe Jaussaud
7 min de lecture
Incontournable dans les réservoirs à carburants, Plastic Omnium veut logiquement occuper la même place dans ceux destinés à l'hydrogène. Fort de plusieurs années de travaux sur le sujet, l'équipementier français vient d'ouvrir un centre de R&D dédié à cette technologie.
Plastic Omnium a investi 50 millions d'euros dans le centre de R&D Delta Tech de Bruxelles.

 

En juillet 2014, PSA faisait rouler dans les rues de Paris deux C3 Hybrid Air. Deux prototypes et une technologie qui cachait un réservoir haute pression développé par Plastic Omnium. Une première à l'époque pour l'équipementier français, notamment numéro 1 mondial des réservoirs à carburants avec plus de 22 millions d'unités en 2018. Durant ce projet, Plastic Omnium a travaillé avec la société belge d'Alex Seifert (qui deviendra Optimum CPV) qui maîtrisait la fabrication de réservoirs en matériaux composites. Un savoir-faire mais aussi un logiciel baptisé Composicad qui entreront finalement dans le giron de l'équipementier français en fin d'année 2017. Ce sera aussi le cas de Swiss Hydrogen, un spécialiste de l'intégration de piles à combustible et de la gestion de cette dernière. La branche News Energy de Plastic Omnium, dans la direction Clean Energy Systems, est ainsi née.

 

Finalement quoi de plus naturel, pour un spécialiste des réservoirs à carburant, de se lancer dans ceux qui peuvent contenir de l'hydrogène. Ceux pour le CNG font également partie des travaux. Aujourd'hui, cette volonté de développement prend une nouvelle dimension avec le centre Delta Tech que Plastic Omnium a ouvert en juillet 2019 au nord de Bruxelles après un investissement de 50 millions d'euros. Un bâtiment de plus de 10 000 m2 où 130 personnes vont travailler au développement de cette nouvelle activité.

 

Devenir un acteur mondial de l'hydrogène

 

Le français veut ainsi devenir un fournisseur global dans la propulsion électrique, combinant hydrogène et pile à combustible, capable d'accompagner ses clients (notamment 92 marques automobiles) dans le monde entier grâce à ses 24 centres de R&D. Car aujourd'hui, les fournisseurs de cette filière demeurent assez hétérogènes mais surtout régionaux voire nationaux. Certains constructeurs travaillent même seuls comme Toyota par exemple. Plastic Omnium a donc une belle carte à jouer avec ses réservoirs à hydrogène en plastique et fibre de carbone puis, plus tard, avec les piles. Quelques chiffres : en 2019, 82 des 86 millions de véhicules produits dans le monde auront un réservoir. Et 69 millions d'entres eux seront en plastique. A l'horizon 2030, la répartition entre thermiques, PHEV et BEV aura changé mais 85 millions des 107 millions véhicules produits auront toujours un réservoir, dont 78 millions en plastique. Mais chose nouvelle, la part des réservoirs hautes pressions, destiner à l'hydrogène ou au CNG, va passer à 6 %. Le marché de la propulsion hydrogène va donc changer de dimension dans les dix prochaines années.

 

Ainsi, le marché VP va grimper de 30 000 unités en 2020 à 1,1 million en 2030 sous l'impulsion du Japon (20 000 à 400 000 unités), de la Chine (1 000 à 200 000 unités) et la Corée du Sud (5 000 à 250 000 unités). L'inauguration cette année également d'un nouveau centre, baptisé Omega tech (50 millions d'investissement), à Wuhan, surnommée Hydrogen City en Chine, sera un atout indéniable pour le français. Ce centre chinois dispose d'ailleurs d'une ligne pilote d'enroulement filamentaire de carbone pour fabriquer des réservoirs pressurisés. Si le potentiel est là pour les VP, il l'est aussi pour des poids-lourds puisque les hypothèses tablent sur 58 000 unités en 2030 contre 500 aujourd'hui. Idem pour les bus qui devraient passer de 500 à 30 000 unités.

 

Premier contrat signé en Allemagne

 

Logiquement, il faut y voir un nouveau levier de croissance pour l'équipementier français qui veut surperformer de 5 % le marché mondial dans les années à venir. Malgré un volume mesuré, l'hydrogène apportera son écot car un réservoir haute pression coûte aujourd'hui environ 2 000 euros quand un réservoir traditionnel s'affiche entre 100 et 200 euros selon les modèles (thermiques ou PHEV). Mais à la différence d'un modèle thermique, qui n'a besoin que d'un réservoir, un fonctionnant avec de l'hydrogène sous pression en demande 2 ou 3 pour un VP et entre 5 et 9 pour un bus ou un PL. Comme pour les réservoirs conventionnels, Plastic Omnium sera capable de répondre aux demandes des constructeurs sur l'hydrogène. Ainsi, aujourd'hui, les constructeurs ne veulent pas, ou ne peuvent pas, développer une plateforme spécifique pour ce type de carburant (à l'exception de Toyota, Hyundai ou Honda) à l'heure où les investissements dans l'électrique à batteries sont énormes.

 

Le français avec ses centres de recherche peut ainsi imaginer de multiples solutions pour faciliter les développements des constructeurs. Ainsi, on peut imaginer des réservoirs pressurisés, plus fins et plus longs, qui pourraient venir prendre la place des cellules d'une batterie et ainsi permettre aux constructeurs d'utiliser la même plateforme. Mais avant d'en arriver là, les travaux actuels de Plastic commencent à payer comme en témoigne la signature d'un contrat avec un constructeur allemand de bus pour la fourniture de réservoirs à hydrogène 350 bars à partir de 2021. Ils seront fabriqués sur le site belge d'Herentals. Au-delà de ce premier contrat, l'équipementier, qui a présenté ses solutions ces dernières semaines, affirme avoir eu 25 contacts avec d'autres constructeurs. L'univers des VP est naturellement visé et Plastic Omnium peut avancer serein puisqu'il est le seul à avoir obtenu la certification R134 pour un réservoir avec 700 bars de pression. Plastic Omnium s'est par exemple positionné pour fournir le réservoir de la prochaine génération du Hyundai Nexo. Un travail avec Toyota, pour les réservoirs du futur, est même évoqué. Le constructeur japonais est d'ailleurs engagé, comme Plastic Omnium, dans le fonds britannique AP Ventures dédié à l'hydrogène. Le signe que pour relever les défis futurs, l'équipementier joue également la carte de l'Open Lab avec des start-ups, des instituts de recherche ou encore des universités.

 

Plactic Omnium n'oublie pas la dépollution des thermiques

 

La pile à combustible et l'hydrogène auront toute leur place dans le futur mix énergétique des véhicules car l'électrique à batterie ne peut pas répondre à toutes les situations et demandes. C'est aussi pour cela que Plastic Omnium continue de travailler sur la dépollution des mécaniques thermiques qui représenteront encore 44 % du marché en 2030. En plus de toujours perfectionner ses systèmes SCR pour les moteurs diesel, Plastic Omnium a développé un système d'injection d'eau dans les mécaniques essence qui va permettre de réduire les émissions de CO2 d'environ 15 %. La première application de série est annoncée pour fin 2022 sur un modèle allemand premium. Rappelons que BMW avait testé une solution proche, développée en interne avec l'aide de Bosch, sur sa M4 GTS mais seulement produite à 700 exemplaires.

 

Premier équipementier mondial sur les pare-chocs, sur les systèmes de dépollution et même sur l'assemblage de blocs avant, avec la prise de contrôle de HBPO en juillet 2018, Plastic Omnium veut que cette division New Enregy soit au diapason. Certes, l'hydrogène n'a aujourd'hui pas le même écho que les batteries mais pourtant, en termes d'usage pour les conducteurs, c'est sans doute la meilleure solution d'électromobilité. Plastic Omnium, mais aussi Faurecia en JV avec Michelin ou encore Air liquide, vont sans doute devenir des incontournables de l'écosystème hydrogène dans le monde mais paradoxalement la France est l'un des pays qui investit le moins dans les infrastructures nécessaires au développement de cette technologie. Dommage. A force de marquer les trains, il ne faudra pas se plaindre à la prochaine fermeture d'usine.

 

 

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