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Industrie

"Notre position sur tous les marchés mondiaux nous permet de proposer à des clients internationaux des solutions globales"

Publié le 9 octobre 2012

Par Hervé Daigueperce
10 min de lecture
Robert Hanser, président de l’aftermarket du groupe Bosch, Thierry Leblanc, directeur rechange traditionnelle France et Benelux - Robert Hanser revient sur la situation de la rechange dans le monde et l’adaptation de sa stratégie.
Robert Hanser, président de l’aftermarket du groupe Bosch.

Le Journal de l’Automobile. Les exposants évoquent des difficultés liées aux marchés qui s’effondrent en Europe : Comment analysez-vous la situation, et quels moyens mettez-vous en place pour soutenir vos distributeurs ? Les constructeurs financent les stocks de leurs distributeurs, iriez-vous jusque-là ?
Robert Hanser.
La situation est beaucoup plus grave dans la production de voitures neuves, mais l’aftermarket s’avère beaucoup plus stable. Il est plus facile, en effet, de prolonger sa voiture plus longtemps que d’en acheter une neuve, ce qui favorise l’aftermarket, quand la première monte souffre plus. Cependant, il est indéniable que le marché de la rechange faiblit en Europe, parce que les gens, dans certains pays, dépensent moins, roulent moins à cause des prix de l’essence, etc. Mais cela est sans aucune mesure avec la production de voitures neuves. Quand tout va mal en rechange, on parle de – 5 %, alors qu’on assiste à des – 30 %, en production ou en vente de camions ou de voitures. L’inverse est aussi vrai en Europe.

JA. Cela signifie-t-il que la rechange tient le coup et nécessite moins de soutien ?
RH.
Cette stabilité est un avantage pour nous et aussi pour nos clients. Les affaires ne sont pas aussi mauvaises mais la chaîne peut souffrir du fait que l’automobiliste ne payant pas le garagiste, celui-ci peine à s’acquitter de ses factures. Néanmoins, il n’y a aucune raison de financer un stock, car il n’y a pas de surstock comme on peut le voir en distribution automobile. Et les situations dramatiques dans la distribution indépendante sont très rares.

JA. Comment, alors, se porte la branche rechange de Bosch ?
RH.
En aftermarket, notre chiffre d’affaires est supérieur à celui de l’an dernier, qui était déjà exceptionnel. Si nous n’avons pas encore atteint les objectifs que nous nous étions fixés pour 2012, nous ne pouvons vraiment pas parler de crise ! Je rappelle que nous sommes sur un marché mondial. Sur le marché spécifiquement français, nous réalisons une belle croissance.

JA. Quelles sont les régions du monde qui fonctionnent bien, actuellement, pour vous ?
RH.
En tête, je citerais l’Inde, la Russie, et la Chine bien sûr, pour nommer les plus importants. Il y a six mois, j’aurais ajouté le Brésil, mais ce n’est plus le cas. Nous pouvons avoir de bons produits qui répondent aux attentes du marché, et des services adaptés, mais l’internationalité apporte beaucoup à la croissance du groupe. Notre position sur tous les marchés mondiaux nous permet de proposer à des clients internationaux des solutions globales. Par exemple, en ce moment, en France, vous entendez une campagne publicitaire de Carglass avec nos produits, celle-ci peut se faire au niveau européen parce que notre nom, notre marque parle directement aux clients de tous ces pays. Sur le salon, nous avons beaucoup de concurrents, qui sont très connus sur leur marché national, mais pas au niveau international, c’est un avantage très important pour nous. Des clients comme les flottes, veulent, aussi, des solutions techniques dans tous les pays, et identifiables.

JA. Pour rebondir sur l’esprit de ce partenariat, entendez-vous ajouter des services à ceux dispensés par les Bosch Car Service comme les pare-brise par exemple ?
RH.
Nous avons déjà expérimenté de tels accords. Et nous avons la volonté d’ajouter des services aux Bosch Car Service. Nous avons des partenaires comme Michelin, ZF et nous cherchons également des coopérations internationales, sur des interventions communes. Avec Michelin, par exemple, nous coopérons très bien en Chine. Nous pouvons ajouter des pièces dans le réseau de Michelin en Chine, et inversement. Nous avons également des opérations d’incentive en commun avec des partenaires. L’objectif étant, comme dans le cadre des formations communes, de faciliter la vie de l’atelier. Si l’on prend comme exemple la coopération avec ZF et Knorr Bremse pour les outils de diagnostic, nous offrons au mécanicien la possibilité d’avoir sur un seul outil, tout ce qui lui est nécessaire pour travailler du Diesel à la transmission, etc. C’est un vrai gain de temps et une simplification de son travail au quotidien.

JA. Vous avez cité ZF et Knorr Bremse, avez-vous d’autres équipementiers prêts à vous rejoindre ?
RH.
Nous avons à l’étude, en effet, d’autres partenariats avec des équipementiers de premier rang qui, évidemment, ne sont pas des concurrents mais au contraire exercent une activité très complémentaire à la nôtre. Et dont l’esprit et les valeurs tournées vers la qualité sont identiques. L’objectif étant de couvrir tous les besoins d’un atelier, formation, équipement d’atelier, diagnostic, etc. C’est-à-dire résoudre ses problématiques dans une démarche commune.

JA. Après les grands mouvements de fusion et d’acquisition, nous assistons à des mutations en termes de stratégie, notamment dans la vision de l’aftermarket. Comment s’articule la vôtre ?
RH.
Il faut noter deux tendances. D’une part, le parc vieillit en Europe et, d’autre part, même si cela est moins important dans cette région, nous assistons à une montée en puissance des véhicules économiques. Pour ces deux marchés, notre stratégie consiste à obtenir des auto-spécifications des pièces (dans la division rechange, N.D.L.R.). Il y a six ans, nous avons pu obtenir 95 % des pièces et systèmes que nos sites de fabrication première monte produisaient, et nous les avons mis immédiatement sur le marché de la rechange. Aujourd’hui, la situation a totalement changé, puisque nous fabriquons, déjà, nous-mêmes, à l’aftermarket, 30 % des pièces que nous commercialisons. Nous disposons de 21 usines dans le monde qui fabriquent uniquement pour l’aftermarket. C’est moins une nouvelle stratégie que la conséquence des nouvelles tendances que j’évoquais. Aujourd’hui, les voitures qui ont 15 ans, et qui ont été proprement entretenues, sont en parfait état. Il faut changer quelques pièces mais à cet âge-là, on ne cherche plus la spécification du neuf (qui pourrait rendre la pièce plus cher que le véhicule !), mais des solutions de rechange ou de deuxième spécification.

JA. Dans le même esprit, vous poursuivez votre démarche sur les pièces remanufacturées. Ce secteur n’est-ce pas devenu quelque peu confus ?
RH.
Nous nous sommes mis d’accord dans l’industrie au niveau européen, pour définir vraiment le remanufacturing. Nous avons, chez Bosch, établi, depuis longtemps, un processus industriel dans lequel nous réutilisons des matières comme le cuivre, les carcasses, des démarreurs, etc. que nous refabriquons selon le cahier des charges initial. Et nous changeons par du neuf toutes les pièces d’usure. C’est pourquoi, nous pouvons délivrer une garantie de deux ans, la pièce rendue étant d’une qualité similaire à la neuve, et dotée des mêmes spécifications. Les réparations qui s’appellent remanufacturing, pour nous, n’en sont pas car il n’y pas de refabrication réelle de la pièce.

JA. La question des pièces remanufacturées se heurte souvent à celle de la récupération des vieilles matières, comment êtes-vous organisés dans ce domaine ?
RH.
Nous avons lancé le “CormaNet” qui a remporté, ici, un prix de l’innovation dans le cadre du Green Directory, système qui s’appuie sur un software pour une récupération globale des vieilles matières. Nous avons, ainsi, de plus en plus de partenaires qui travaillent avec nous, dans le cadre de ce système qui, là encore, a pour objectif de simplifier la vie du distributeur et du réparateur. Nous savons que cela donne du travail en plus aux professionnels, c’est pourquoi le système doit être simple d’utilisation, et c’est à nous, après, de déterminer vers qui orienter telle ou telle pièce, ZF récupère les éléments de direction, nous les démarreurs et alternateurs, etc.

JA. Pensez-vous possible la création d’une filière spécifique et globale, afin de faciliter la récupération, qui pourrait aller jusqu’au paiement sur le site même du réparateur ?
RH.
Le processus que nous avons mis en place fonctionne très bien et se positionne aussi comme élément différenciateur sur le marché, en termes de qualité de service notamment. Nous l’avons étendu à nos partenaires, ZF ou Knorr Bremse, etc. qui ne sont pas des concurrents et avec lesquels nous pouvons très bien coopérer. Parce que nous avons des gammes de pièces différentes à récupérer. Cela est plus intéressant aussi pour l’atelier qui renvoie vers un seul interlocuteur plusieurs familles de produits.

JA. Est-ce que les bonnes relations que vous entretenez avec les constructeurs facilitent l’accès aux informations techniques, un sujet qui redevient, semble-t-il, d’actualité sur le salon ?
RH.
C’est toujours une question importante pour le Clepa et l’industrie en général, pas spécialement chez Bosch. Les fabricants ont, par rapport aux constructeurs, une autre interprétation des textes de lois. Nous avons vraiment besoin de l’accès aux données mais d’une façon complète. Il nous faut, en effet, la globalité des données pour que nous puissions travailler dessus pour les catalogues, les outils de diagnostics, etc. Nous ne sommes pas encore arrivés à ce résultat. Pour le moment les OEM ne nous donnent pas ces données. La Commission a interprété, lors d’une conférence au Clepa, le texte, en disant qu’il fallait livrer les données de cette façon, comme décrit, mais rien n’a été fait depuis. Je trouve cela incorrect à titre personnel, parce qu’il est très important que nous puissions avoir l’identification claire de la pièce qui va dans une voiture. Pour une pièce mécanique, “ça joue ou ça ne joue pas”, pour une pièce électronique, peut-être que cela joue, mais cela ne fonctionne pas forcément. On peut la monter et elle peut ne pas fonctionner : cela peut être fatal dans le cadre d’une pièce de sécurité. Cette industrie a besoin de l’accès à ces données pour clairement identifier que telle voiture va avec telle pièce. L’autorité de la concurrence en France s’est aussi clairement exprimée sur ce sujet.

JA. Internet est un média important aujourd’hui, quelle est votre politique à ce sujet, est-ce que cela vous pose des problèmes sur le terrain ?
RH.
Internet va changer considérablement notre secteur mais la vente de pièces sur le web n’est qu’une toute petite partie de ce qui peut être fait. Beaucoup de solutions que nous travaillons avec nos clients sur Internet, donnent des possibilités dans la communication, de facilitation des processus, d’échanges d’informations, etc. Et je pourrais parler de DriveLog (nouveau portail d’échanges entre réparateurs et automobilistes, “powered by Bosch” N.D.L.R.). Est-ce qu’Internet dérange dans le marché ? Certainement, c’est une nouvelle voie, mais il existe toujours des éléments dérangeants sur notre marché comme la contrefaçon. Ce n’est pas Internet qui a provoqué le problème en soi, mais peut-être qu’il est plus transparent, plus visible. Il faut l’utiliser comme un moyen, qui nous donne plus de possibilités dans l’avenir, et il faut reconnaître son impact considérable sur notre secteur : on peut se former sans se déplacer, voir en direct une démonstration technique, échanger via des web cam, etc. Il faut l’utiliser de manière intelligente.

JA. Pour finir, pourriez-vous nous dire où en est l’acquisition de SPX par Bosch ?
RH.
Nous avons obtenu l’accord des autorités de la concurrence au niveau européen et nous attendons avec impatience celui des autorités américaines. Pour la division Rechange Automobile du groupe Bosch, cela représenterait sa plus grosse acquisition depuis son origine.
 

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