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Distribution

“Nous n’avions pas vu venir la prise de pouvoir des SVV automobiles”

Publié le 14 novembre 2013

Par Benoît Landré
4 min de lecture
L’autorité de régulation des ventes volontaires livre son regard sur la croissance du secteur des enchères automobiles, l’arrivée de nouveaux acteurs extérieurs ou encore le déploiement des ventes en ligne.
Catherine Chadelat, conseiller d’Etat, a pris la présidence du Conseil des ventes volontaires en 2011.

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Selon les retours que vous avez, pensez-vous que les SVV spécialisées dans la vente de voitures vont conforter leur position en 2013 ?
CATHERINE CHADELAT.
Les remontées que nous avons sont isolées et nous ne pouvons pas parler d’une tendance générale à ce stade, c’est trop tôt. Dans nos précédents rapports, nous avions relevé cette concentration des opérateurs spécialisés dans l’automobile. Aussi, nous nous doutions que ces mouvements allaient renforcer considérablement leur position, mais pas au point de les voir passer devant Sotheby’s et Christie’s dès 2012. Nous n’avions pas vu venir cette prise de pouvoir.

JA. La vente de voitures ne revêt pas le même prestige que la vente d’objets d’art. Cette prise de pouvoir inquiète-t-elle le Conseil des ventes ?
CC.
Le Conseil des ventes assure une activité de régulation, nous observons les trois secteurs des marchés des enchères que sont les Arts et Objets de collection, les Chevaux, et les Véhicules d’occasion et Matériel industriel. Nous n’avons donc pas de jugement de valeur par rapport aux évolutions du classement. Je dirais même que nous ne pouvons que nous réjouir des bonnes performances de ce secteur d’activité, qui a en partie construit sa croissance sur la dématérialisation des ventes et le Net.

JA. Surtout, ce marché se développe sous l’impulsion d’acteurs extérieurs, qui ne sont pas des spécialistes des enchères. Ne craignez-vous pas que ce métier vous échappe ?
CC.
Il faut simplement savoir si l’on fait de la vente aux enchères ou si l’on fait autre chose. Nous ne voyons pas d’un mauvais œil l’arrivée de nouveaux investisseurs extérieurs dès lors que l’opérateur de vente habilité conserve son indépendance et la maîtrise de la vente*.

JA. Cette concentration pourrait-elle dénaturer le marché ?
CC.
Oui, c’est possible. Je peux comprendre que les sociétés de ventes aux enchères désirent un flux régulier de marchandises, à une période où il est difficile de trouver du matériel, mais il ne faudrait pas que l’investisseur dicte ses conditions et son pouvoir au commissaire-priseur, et que ce dernier perde sa marge de manœuvre. L’exclusivité ou la quasi-exclusivité aux conditions déterminées par une entreprise est le point à ne pas franchir. Mais cela est très subtil, d’autant plus qu’il s’agit d’un marché très spécifique.

JA. Le Conseil des ventes a-t-il le pouvoir de poser son veto ou d’empêcher une prise de participation d’un groupe de distribution automobile dans une SVV ?
CC.
Non, nous n’avons pas ce pouvoir. Sotheby’s est coté en Bourse, a des actionnaires, et cela ne pose pas un problème en soit.

JA. Certains acteurs jugent que la loi qui encadre ce marché n’est pas ou plus adaptée aux spécificités et aux mutations des enchères automobiles. Que répondez-vous ?
CC.
Je l’entends. Il s’agit d’un marché atypique, qui se concentre et répond à des process très industriels. Mais le marché des Chevaux a lui aussi ses spécificités. Nous ne pouvons pas faire évoluer la loi selon les caractéristiques de chaque secteur. Je peux comprendre que les sociétés automobiles souhaitent évoluer dans un cadre plus souple, mais il ne s’agirait plus alors de ventes aux enchères. Si un acteur se lance dans l’achat et la revente de véhicules, on ne parle plus de ventes aux enchères, mais de commerce. Rien ne les empêche, d’ailleurs, de sortir de ce cadre et de faire autre chose, comme des ventes de gré à gré ou des opérations de courtage. Il en va de même pour les ventes sur Internet, qui génèrent une confusion que nous ne trouvons pas dans les ventes réelles, et pour lesquelles beaucoup réclament une législation adaptée. Or, le Net est un canal, une technique, et la législation n’obéit pas à la technique.

JA. Devant la forte croissance des ventes électroniques dans le CA des SVV automobiles, certains se posent la question de la pérennité des ventes en salle. Que vous inspire cette mutation ?
CC.
Cette mutation est évidente et va dans le sens de l’histoire, car le Net est un outil extraordinaire, qui se prête parfaitement à ce type de biens standardisés. Je suis convaincue que les ventes dématérialisées ont un avenir formidable.

*Dans son recueil des obligations déontologiques, le Conseil des ventes volontaires rappelle que “l’opérateur de ventes volontaires ne peut recourir aux services d’un apporteur d’affaires que s’il conserve la maîtrise de l’organisation et de la réalisation de la vente”.
 

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