Messieurs les distributeurs, investissez les derniers !
Contrairement aux prédictions des pires Cassandre, le marché automobile français aura en 2014 sauvé les meubles. Sans pour autant progresser, il s’est contenté de se stabiliser à 1,795 million d’unités (VP) vendues (+ 0,3 %). Plutôt que de tomber dans le pessimisme ambiant, les nombreux observateurs du secteur automobile hexagonal préfèrent désormais voir, du moins à court terme, une poursuite de cette stabilisation, et tablent sur un marché autour des 1,8 million d’unités.
Parallèlement, alors que l’inquiétude sur la santé financière des réseaux de distribution était réelle, il fut agréable d’observer que les distributeurs français ont su, dans une grande majorité, préserver, voire améliorer, leur rentabilité. De 0,55 % en 2013, la rentabilité moyenne des réseaux français est aujourd’hui de 0,91 %. Mieux encore, comme nous le faisions constater récemment (JA n° 1222), aucun réseau n’affiche désormais une rentabilité négative contre quatre (groupe Fiat, Ford, Opel, Jaguar) un an plus tôt. Pour arriver à un tel résultat, les concessionnaires français ont su retravailler l’activité VN de leurs affaires tout en développant simultanément les autres secteurs d’activités comme le VO, Internet ou le financement. Mais l’équilibre reste fragile.
En effet, la concentration a encore opéré et la taille globale de la distribution automobile française s’est à nouveau réduite pour compter aujourd’hui 6 168 points de vente (7 066 en 2013) détenus par 2 609 investisseurs (contre 2 810 en 2013). Outre les cessations d’activité, les marques qui ont quitté le territoire (Chevrolet) ou les reprises d’affaires, les directions de développement réseaux préfèrent préserver le schéma existant, et limiter les nominations et ouvertures de façon à ne pas nuire aux opérateurs et affaires déjà en place. Mais ce n’est pas le cas de toutes les marques.
Neuf marques en recherche
D’ici à 2016, elles sont encore au nombre de neuf à vouloir renforcer leurs dispositifs territoriaux. Toutes n’ont pas les mêmes objectifs ni les mêmes priorités. Ainsi, Porsche ne souhaite compléter son réseau que de deux points de vente. Mais la marque n’a pas de politique d’open point définie, comme l’avait confié Marc Ouayoun, son directeur général, lors du dernier Mondial (JA n° 1212) : “La démarche est effectivement de ne pas compter plus de sites, mais plutôt d’exploiter les zones libres où la marque connaît un déficit de pénétration. Ces ouvertures se justifiaient pour cette raison. Aujourd’hui, il n’y a plus d’open points à couvrir. Le schéma s’applique pour des volumes France de 4 000 voitures, si demain nous devions augmenter nos volumes à 6 000 unités, nous nous poserions la question, mais ce n’est pas d’actualité. Aujourd’hui, l’idéal est de disposer de plaques régionales avec deux, voire trois sites, qui permettent de couvrir parfaitement une zone et de mutualiser les fonctions supports. Un investisseur type du réseau Porsche dispose aujourd’hui de deux à trois sites avec un contrat moyen de 150 VN.” Quant à Opel, qui annonçait vouloir couvrir cinq open points l’an passé, il lui en resterait trois désormais. “L’option développement réseau est envisageable car la marque est appelée à croître dans les prochaines années, mais, pour l’heure, il n’y a rien de concret”, avait de son côté expliqué Eric Wepierre, président de GM France. On notera toutefois que les secteurs de Bourges, Thionville et Lorient n’ont toujours pas été couverts depuis deux ans.
On touche au but
Suzuki est proche du but. Avec 10 open points plus 10 RA, la marque japonaise s’est fixé l’objectif de compter sur un réseau de 215 points de vente (contre 195 fin 2014). Elle devrait y arriver car elle connaît une nouvelle dynamique. Tout d’abord au sein de son réseau (13 nominations en 2014 ainsi que 8 créations depuis début 2015), mais aussi une dynamique produits avec le lancement du Vitara et de la Celerio, en attendant la nouvelle Swift, véritable fer de lance de la marque en France.
C’est ce à quoi s’attend Mazda. Cette autre marque japonaise connaît un plan produits sans précédent en Europe avec les arrivées au sein de sa gamme des Mazda2, CX-3, mais aussi des renouvellements des CX-5, Mazda3 et Mazda6 en attendant l’icône MX-5. Si les ventes sont en hausse, il ne manque plus qu’un réseau plus solide pour enfin décoller. Pour ce faire, la marque a établi une nouvelle feuille de route : nouvelle signalétique, résiliation de l’ensemble du réseau le 1er janvier avec un nouveau contrat, et quelques standards et process supplémentaires… Douze zones libres sont à combler d’ici deux ans pour un réseau devant compter 120 points de vente. “Nous couvrons actuellement 70 % du territoire, ce qui nous laisse de la marge, d’autant plus qu’il nous reste à résoudre certaines équations comme la problématique de la région parisienne. Nous y avons des contacts, mais nous recherchons avant tout des opérateurs qui ont vocation à vendre des voitures et à entrer dans un environnement de marque, et non pas des financiers à la recherche de profits”, rappelait ainsi en octobre Philippe Geffroy, président de Mazda France.
Reste l’équation financière à résoudre. La plupart des marques n’ont pas souhaité s’étendre sur le sujet. Si, du côté de Mazda, on demande un investissement moyen de 51 000 euros pour un opérateur, celui-ci descend à 12 000 euros chez Subaru et 10 000 chez SsangYong. A vos portefeuilles !