Marc Faurie, dirigeant du groupe Faurie
Journal de l'Automobile. Quels sont les épisodes et le raisonnement qui ont animé votre développement ces dernières années ?
Marc Faurie. En 2000, Renault nous a proposé de constituer une plaque autour de Brive-la-Gaillarde en reprenant les sites en Corrèze (19) et en Dordogne (24). Nous étions mono-site et, en deux ans seulement, nous nous sommes retrouvés avec un volume de 5 000 VN. La branche poids lourd était assez développée et l'alternative qui se présentait à nous était, soit de sortir de l'automobile, soit, au contraire, de grossir dans ce domaine. Nous avons fait le choix de poursuivre notre développement dans le VP. Nous avons aussi tenté ce pari parce que nous souhaitions conserver ces deux métiers qui sont à la fois très proches et très différents, et au final très complémentaires.
JA. Êtes-vous parvenu aujourd'hui à consolider toutes ces affaires et à les fédérer au sein du groupe ?
M.F. Il faut arriver à créer une culture commune et à faire travailler les gens en équipe, cela prend du temps. C'est d'ailleurs dans cette dynamique, que s'inscrivait l'événement que nous avons mis en place en 2007, pour célébrer les 80 ans du groupe et qui a permis de fédérer les gens autour de l'entreprise. L'idée était de leur faire partager une histoire commune en mettant en avant la culture propre au groupe axée sur le service et l'après-vente. C'était un moment très fort.
JA. Quelles sont les "recettes" et les valeurs que vous cherchez à préserver, à cultiver au sein de votre groupe ?
M.F. Au-delà de cet événement fondateur, nous faisons travailler ensemble les chefs de service lors de réunions qui ont lieu tous les deux mois, animées par un directeur du groupe, dans des lieux différents à chaque fois. Nous apprenons aux gens à travailler ensemble autour de politiques commerciales communes. C'est aujourd'hui le principal levier au niveau du groupe pour entretenir cette culture.
JA. Quel regard portez-vous aujourd'hui sur la composition de votre groupe ?
M.F. Nous gérons une entreprise de 850 personnes qui sont disséminées sur 25 sites différents et espacées d'un point de vue géographique, puisque nous sommes sur huit départements à faible densité de population. La communication n'est pas facile. Cela pose aussi des problèmes de logistique très importants, les coûts de transport étant plus élevés quand nous livrons les agents. Cela limite fortement les synergies ou les rend plus compliquées car elles sont moins rentables. Nous ne pouvons pas dupliquer les systèmes, les organisations sont forcément différentes et cela nous oblige à avoir des gens autonomes.
JA. Comment se concrétise cette autonomie dans vos affaires ?
M.F. Autonomie ne veut pas dire indépendance, nous avons essayé de développer, dans toutes nos affaires, poids lourd comme VP, la proximité avec le client au niveau de l'après-vente. Nous sommes propriétaires, aujourd'hui, de nombreux sites secondaires de manière à être au plus près des clients et à assurer un service après-vente le plus direct possible. Nous sentons un besoin, chez les clients, d'une relation de proximité. On y revient notamment au niveau du service et de la vente. Cela va à l'encontre d'une centralisation, il faut que nous occupions le territoire et c'est notre force que de représenter Renault et des marques à fort volume.
JA. Les efforts de développement du groupe seront-ils portés en faveur du VP dans les prochaines années ?
M.F. Ce développement s'est déjà matérialisé il y a deux ans avec la reprise des affaires VW, Audi et Skoda de Brive. Il s'agit d'affaires qui étaient dans une situation financière très difficile. Nous avons fini la période de restructuration qui a été très longue et délicate et j'ai de très bons espoirs pour 2010. Nous allons arrêter la distribution de Skoda et nous avons un projet de délocalisation du site Audi pour répondre aux nouvelles normes du constructeur. La concession deviendra un nouveau site à part entière et le site actuel deviendra 100 % VW. Mais je ne souhaite pas développer une stratégie multimarques tous azimuts. Aujourd'hui, la rentabilité se fait beaucoup sur les volumes, et quand vous réalisez de faibles volumes sur un tel territoire, vous vous retrouvez en limite de rentabilité. Nous sommes déjà éparpillés géographiquement, nous ne voulons pas nous éparpiller au niveau du nombre de marques représentées. Je souhaite que 2010 soit l'année du renforcement de nos relations avec le groupe VW dont les marques offrent une complémentarité avec Renault, avec qui nous souhaitons, évidemment, poursuivre le développement.
JA. Comment est représentée la marque Dacia dans vos affaires aujourd'hui ?
M.F. Nous avons des showrooms séparés et dédiés à la marque dans presque toutes nos affaires depuis fin 2009. Je continue à croire au développement de Dacia et Renault a aujourd'hui une longueur d'avance sur la concurrence sur ce type de marché. C'est à nous, ensuite, sur le terrain d'assurer le succès de cette marque. Nous ouvrirons prochainement à Bergerac une agence Renault qui sera couplée avec un espace entièrement dédié à Dacia.
JA. Vous considérez-vous davantage comme un acteur du poids lourd ou du VP aujourd'hui ?
M.F. Autant l'un que l'autre. Mais c'est un sentiment assez nouveau car nous avons historiquement été fortement marqués par le poids lourd, nous figurons parmi les plus importants distributeurs français de VI. Mais nous nourrissons de grands espoirs de développement dans l'automobile, c'est un métier que je veux mettre au cœur de notre stratégie, au moins au même niveau que le camion. Et peut-être aurons-nous d'ailleurs davantage d'opportunités dans le VP ?
Nous avons connu certaines années où nous étions très contents d'avoir le soutien de la branche poids lourd. Et en 2009, la meilleure tenue du marché VP a permis de soutenir l'activité camions et valide d'ailleurs notre stratégie de conserver ces deux métiers.
JA. Votre baisse d'activité en poids lourd est-elle conforme à la baisse du marché ?
M.F. Nous sommes dans la tendance nationale en termes de baisse des ventes. Nous avons vécu une année 2009 qui restera une année de purge et de non-valeur au niveau de stocks. C'est une année qui nous a, aussi, permis de nous recentrer sur un niveau de marché plus bas, tant sur le plan du commerce que de l'après-vente. Nous sommes revenus à un niveau normal en valeur et en volume de stock à la fin de l'année. 2009 a également été un exercice de remise en question, qui nous a incités à développer encore plus les synergies entre les sites. Dans ce genre de période, nous sommes à la fois dans l'action et dans la réflexion et nous parvenons à trouver des ressources là où nous ne pensions pas en trouver. C'est finalement une année où nous aurons énormément progressé au niveau de la cohérence du groupe et dans les synergies entre les sites.
JA. Êtes-vous confiant pour une reprise des activités PL en 2010 ?
M.F. Les difficultés du PL sont avant tout conjoncturelles et 2010 risque d'être tout aussi morose en termes de ventes. Mais les marchés repartiront. En trois ans, nous avons vécu tous les excès, que ce soit à la hausse ou à la baisse. Nous avons vécu pendant deux ans une pénurie de véhicules, que ce soit en VN ou en VO. Cela a eu pour effet d'alimenter une bulle, dans le sens où les distributeurs de tous les pays ont sur-commandé les véhicules pour essayer de réduire les délais de livraison qui s'étaient allongés de manière considérable. Nous avons eu jusqu'à 1 an de délai sur certains modèles. Et le jour où le marché a basculé avec la crise, le train était lancé à grande vitesse et nous sommes d'ailleurs encore en train de freiner.
Depuis plus de dix ans, il existait un marché export qui permettait de vider les stocks VO des réseaux français. Ce fut d'abord l'Espagne et le Portugal et ensuite les pays de l'Est. Mais là, en un an, tout s'est bloqué.
JA. Quels sont les principaux axes de progression du groupe ?
M.F. Même si nous avons bien progressé sur le VO, nous avons encore des progrès à faire sur cette activité. Cela passe par une meilleure offre, élargie notamment aux particuliers, et un plus grand dynamisme. Nous devons être plus pro-actifs sur ce métier.
Ensuite, nous devons assurer une meilleure présence commerciale via un site Internet qui sera opérationnel en début d'année 2010, avec une offre Internet locale pour développer le business au niveau régional et identifiable au niveau du groupe. Enfin, nous devons étendre le plus possible tous les services et les ventes périphériques autour du VN. Nous devrions d'ailleurs proposer le label "Pro+" sur Brive qui devrait donner une exposition médiatique plus forte du site.
ZOOMLe groupe Faurie en dates • 1927 : date de création de la société par Cyprien Faurie à Brive. "Un passionné d'auto et de mécanique qui a acheté à 22 ans son petit garage avant d'y exposer l'enseigne Berliet qui était absente dans la ville". |
FOCUSLe groupe Faurie en chiffres • CA : 300 M euros |
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