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Distribution

Les indépendants ont-ils un avenir ?

Publié le 18 juin 2014

Par Alexandre Guillet
8 min de lecture
Une question : sur un marché tendu et parfois imprévisible, entre le réveil des réseaux constructeurs dynamisant leurs labels et la consolidation des réseaux indépendants, ne sera-t-il pas très difficile de rester totalement indépendant à l’avenir ? Eléments de réponse.

Avec ou sans réseau ?

Hervé Gillotin qui dirige les Etablissements Gillotin Automobiles, créés il y a près de 40 ans, et qui a rejoint le réseau Distinxion depuis un an presque jour pour jour : “J’ai choisi de prendre le panneau Distinxion pour plusieurs raisons au premier rang desquelles se trouve la notoriété du réseau. En outre, il nous apporte beaucoup de choses au niveau du marketing et de la communication, au local comme en ligne. Autant de choses que vous pouvez faire tout seul me direz-vous, mais bien souvent, on se laisse déborder par le quotidien et on fait l’impasse ou tout simplement, on n’est pas structuré pour cela. Bien entendu, il nous revient de nous approprier les moyens que Distinxion met à notre disposition, les choses ne se faisant pas toutes seules. Mais un an après mon adhésion, si je dois tirer un premier bilan intermédiaire, il s’avère très positif”.

Thibault Bouzigon, dirigeant de FB Diffusion, qui a rejoint le réseau VPN il y a un peu plus d’un an : “J’ai choisi VPN car il s’agit d’un facilitateur, pour le Web, le marketing et les approvisionnements. J’ai créé l’entreprise il y a un an et demi avec un associé et le fait de rejoindre un réseau m’a beaucoup aidé à prendre mon envol, car cela rassure aussi très clairement les clients. Mon activité a donc été très significativement dynamisée par mon adhésion à VPN et le bilan est pour l’heure indéniablement flatteur”.

Christophe Laurent-Atthalin, directeur général de Delta Car Trade : “Il y a plusieurs motivations qui peuvent pousser un indépendant à rejoindre un réseau et dans des registres parfois différents. On peut distinguer quatre cas de figure. De par sa force de frappe en sourcing, un réseau est une promesse de rentabilité. Ce premier point est complété par une promesse de développement du business, par le biais de la notoriété de l’enseigne et des outils, notamment sur Internet, qu’elle met à disposition de ses membres. Par ailleurs, il y a une promesse d’amélioration de la compétence, essentiellement via des formations plus régulières. Enfin, il y a encore une promesse de communauté, c’est-à-dire de partages et d’échanges avec d’autres professionnels, ce qui est loin d’être neutre, prémunissant contre l’isolement et l’absence de remise en cause”.

Olivier David, dirigeant du garage David, qui a adhéré puis quitté un réseau : “Nous avions rejoint un réseau il y a huit ans, car nous étions en quête de notoriété sur le VN. Nous n’en manquions pas sur le VO, mais nous estimions qu’il nous manquait quelque chose sur le VN. Toutefois, nous n’avons pas persévéré dans cette voie, en quittant le réseau au bout de quatre ou cinq ans. L’expérience n’a pas été aussi probante que cela au niveau du sourcing comme de la croissance attendue de l’activité”.

Eric Debard, dirigeant de Debard Automobiles, qui supervise quatre centres détenus en propre : “Nous existons depuis vingt ans et il est vrai qu’il y a une dizaine d’années, lorsque nous avons créé le site de Toulouse, s’est posée la question d’intégrer un réseau ou non. Après réflexion, nous avons convenu que la clé de voûte du système était le sourcing et que nous étions des régulateurs du marché, en tant que spécialistes du 0 km, dépendants des constructeurs et des loueurs. Dès lors, créer ou intégrer un réseau ne nous est pas apparu nécessaire. Il est vrai que notre structure financière nous permettait d’évoluer en propre et que notre notoriété était établie dans notre région. Toutefois, je n’ai rien contre le principe des réseaux qui ont leur utilité et leur valeur ajoutée”.

Pierre Guinault, dirigeant d’Appro Automobiles et président-directeur général de Car Group : “Nous avons une double activité, BtoB et BtoC, et la question d’un réseau s’est donc posée pour bénéficier d’un back-office performant. C’est même une réflexion stimulante à mener”.

OD : “Nous avons fait le choix d’intégrer des réseaux pour la carrosserie, Top Carrosserie, et pour la mécanique, avec l’AD. Cela nous permet de fidéliser notre clientèle et de l’orienter. Nous n’avons pas fait ce choix pour le VO, car en fait, nous allons chercher les clients par le biais des services, ce qui nous permet de les fidéliser. En outre, notre notoriété est bien établie et l’apport d’un réseau ne serait pas déterminant de ce point de vue”.

TB : “Pour l’après-vente, nous avons aussi fait le choix d’adhérer à un réseau, à savoir l’AD”.

Les temps changent…

PG : “Oui, je pense que les choses sont plus complexes qu’avant pour un indépendant, surtout que nous vivons une période économique troublée. Je pense ainsi qu’il serait très délicat de se lancer aujourd’hui tout seul, sans liens de confiance pour le sourcing et dans un contexte de marché de plus en plus professionnalisé, notamment avec des labels constructeurs très pointus”.

HG : “Les frais que représente l’intégration à un réseau ne sont pas à négliger, mais cela est compensé par l’apport de business. En outre, chez Distinxion, chaque adhérent choisit les actions à mener, nous ne sommes pas dans une situation d’obligation ou de contrainte. De plus, avec les échanges entre membres du réseau, nous élargissons de facto le spectre de nos stocks”.

ED : “Au niveau économique, pour avoir une bonne assise, il est important d’être propriétaire des bâtiments et de s’assurer que ces derniers sont polyvalents, c’est-à-dire qu’ils pourraient être utilisés pour une autre activité, on ne sait jamais de quoi demain sera fait. L’étude de marché préalable à l’implantation demeure aussi capitale et de notre point de vue, si la zone ne présente pas un potentiel de 600 ou 700 véhicules à l’année, le jeu n’en vaut pas la chandelle. Par ailleurs, pour assurer la rentabilité des sites, au-delà du cœur de métier, il convient de travailler sur les reprises et le financement”.
“Lorsque nous avons dépassé nos traditionnelles frontières régionales, en ouvrant un site au Mans, nous savions que nous n’allions pas bénéficier du même effet de notoriété. Après deux ans d’ouverture, nous progressons légèrement. On voit depuis plusieurs années que les gens se déplacent moins pour voir les véhicules, ils se renseignent sur Internet et privilégient ensuite la proximité”.

C-LA : “Nous aidons nos adhérents et avec un dispositif de scoring, nous évitons que les affaires fléchissent en identifiant très rapidement les premiers signes de ralentissement de l’activité. Aujourd’hui, on constate plus un écrémage géographique, alors que c’est la technique qui faisait la différence auparavant. Il est essentiel de bien calibrer son entreprise par rapport à son potentiel de marché. On le voit bien avec les agents de marque, qui ont tendance à quitter le constructeur pour devenir multimarque et mieux exploiter leur zone de chalandise”.

HG : “Je suis toujours le maître de mon affaire, mais le fait d’avoir intégré Distinxion nous a donné des idées nouvelles, nous a fait penser à des choses que nous n’aurions pas forcément envisagées, pris dans le flux du quotidien. Nous avons par exemple créé l’activité 0 km. Nous avons aussi des démarches de prospection plus actives, notamment par le biais de simples distributions de prospectus, ce qui se révèle pourtant très efficace. Par rapport aux marges qui tendent à s’éroder, il ne faut pas tout mélanger : Distinxion ne peut pas tout faire et c’est notre marché dans son ensemble qui oriente les marges à la baisse”.

OD : “Il est aujourd’hui nécessaire de développer des activités et des services annexes autour du VO. Que ce soit par l’après-vente ou la location, l’idée est de capter les particuliers par tous les moyens, avec plusieurs portes d’entrée”.

ED : “Le Net est clairement devenu incontournable. Les statistiques sont sans appel. Par la suite, il faut les bons produits, ce qui nous renvoie au sourcing et au stock, un pricing adapté au marché et des vendeurs compétents”.

PG : “La trésorerie reste le nerf de la guerre et il faut pouvoir s’appuyer sur des fonds propres bien consolidés. Surtout que les banquiers n’ont pas une vision claire du VO. Ils prennent l’automobile dans son ensemble. Donc, lorsqu’il y a une crise, ils voient la crise partout. Ils sont frileux, mais indispensables… Dès lors, il est important de bien travailler avec des banques de proximité”.

TB : “Le fait d’appartenir à un réseau m’a aidé dans ma relation avec les banquiers. D’une part, du point de vue de la perception même du banquier et d’autre part, grâce aux consultants de VPN. Et je confirme que les banques de proximité comprennent mieux la réalité de notre activité que les grands groupes bancaires”.

PG : “Pour appréhender les évolutions de notre marché, la FFDAI a le mérite d’exister et doit se développer, au-delà des acteurs de taille significative. C’est important pour notre profession et cela peut être un levier d’union”.

C-LA : “Pour conclure, je lance une piste de réflexion en vous invitant à regarder ce qu’il s’est passé dans l’hôtellerie ces dernières années, avec l’émergence d’acteurs comme booking par exemple. Des acteurs qui ont capté 20 % de la marge des hôtels en très peu de temps. Le hold-up a eu lieu sous nos yeux et nous en avons été complices. Qu’est-ce qui empêcherait aujourd’hui le même phénomène de se produire dans nos métiers ? Attention ! Donc le fait de s’unir, d’appartenir à un réseau vous donne une chance de mieux résister, d’instaurer un rapport de force digne de ce nom”.

 

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