e-Commerce : les records tombent
Au mois de janvier dernier, Eric Besson, ministre de l’Industrie, de l’Energie et de l’Economie numérique, saluait vivement les résultats annuels enregistrés par les sites marchands français. En 2011, le chiffre d’affaires du secteur a battu à nouveau son record pour la quatrième fois d’affilée, en atteignant les 37,7 milliards d’euros. Comparativement à l’année précédente, cela correspond à une progression de 22 %. La Fevad (Fédération du e-commerce et de la vente à distance) souligne surtout que ce montant est 2,5 fois supérieur à celui de 2007 et 4,5 fois à celui de 2004. “Je salue ces excellents résultats, qui auront permis la création d’au moins 3 000 emplois pérennes dans ce secteur, en 2011”, a relevé le ministre. Au total, l’industrie de la vente en ligne procure, aujourd’hui, plus de 60 000 postes. Il faut dire que le nombre de sites marchands ne cesse de croître. La barre des 100 400 a été dépassée (+ 23 % en 2011).
Pour réaliser ce chiffre d’affaires, les sites d’e-commerce ont pu compter sur la confiance de 30 millions de consommateurs actifs (ils étaient 28 millions à la fin du premier trimestre 2011). Pour mémoire, la population d’internautes en France s’élève à 38,6 millions. En termes de rythme, les 800 plus gros sites français réalisent plus de 10 000 transactions mensuelles et les 21 000 sites de taille moyenne, de 100 à 1 000.
Auto et moto : une fréquence d’achat bien en deçà
Pour l’heure, l’e-consommation automobile se cantonne en grande partie à la pièce détachée. A la Fevad, les sites autos et motos sont réunis en une seule catégorie. Et même ensemble, ils ne pèsent pas bien lourd : 10 % des internautes déclarent avoir commandé des pièces de rechange au cours des six derniers mois (baromètre Fevad-Médiamétrie NetRatings de juin 2011). Soit autant que ceux qui consomment des articles de sport et au dernier rang d’un classement dominé par la catégorie Voyage/Tourisme (56 %), ce qui prouve que ce n’est pas une question de prix. D’ailleurs, le montant du panier moyen de l’auto/moto est supérieur à la moyenne générale, à 99 euros contre 96 euros. En revanche, la fréquence d’achat y est bien inférieure à la moyenne. Alors que les internautes ont consommé en moyenne 2,8 produits (ou services) par univers durant les six derniers mois, ce chiffre tombe à 1,7, dans l’auto/moto.
A en croire le sondage de la Fevad, 7,1 % des internautes ont acheté des pièces détachées exclusivement sur Internet, contre 24,8 % qui sont allés en magasin et 1 % qui a commandé sur catalogue. La multicanalité porte particulièrement sur la dualité entre Internet et magasin, avec 3,4 % des internautes qui déclarent avoir alterné les deux canaux. Aussi, l’étude révèle-t-elle que si 40 % des internautes préparent online avant de faire leur achat offline, l’inverse n’est vrai que dans 26 % des cas. Cette part chute à 10 % dans le cas des mobinautes, qui restent une population globalement réfractaire à la consommation (87 % des sondés) – ou ne serait-ce qu’à la consultation (77 %) – de pièces détachées en ligne.
La fraude, un combat prioritaire
Le 17 février dernier, les représentants de la Fevad et leurs homologues des pays voisins annonçaient le premier pas vers une union internationale. Celle-ci prendrait la forme d’une association européenne de l’e-commerce. Sept membres ont déjà signé la charte, dont BeCommerce (Belgique), FDIH (Danemark), Netcomm (Italie), Thuiswinkel.org (Pays-Bas), Norge Distansehandel (Norvège), Svensk Distanshandel (Suède) et la Fevad (France), nourrissant des ambitions de lobbyistes de haut rang.
Les dossiers à défendre sont nombreux. Parmi eux, celui de la fraude dans un contexte où, sur Internet, des sommes d’argent de plus en plus importantes sont échangées. S’il n’est pas endigué rapidement, ce phénomène pourrait provoquer de graves préjudices. La Banque de France elle-même a mené une étude sur le sujet. Il en résulte des statistiques saisissantes : Internet, qui ne pèse pas plus de 6 % des règlements en France (parmi tous les moyens possibles), représentait tout de même 36 % des cas de paiements frauduleux en 2009. Pis, cette part a grimpé à 45 % en 2010, faisant de ce canal le plus sensible. Des mesures ont été prises, notamment avec le soutien de la Banque de France. Ainsi a été inventé 3D-Secure, un outil d’authentification visant à fiabiliser les paiements par carte bancaire. En pratique, il génère un code envoyé sur le mobile du détenteur de la carte afin que celui-ci confirme son identité. “Le système est intelligent, mais les banques n’ont pas relayé l’information, n’en ont pas fait la promotion, et finalement le client s’est méfié, au point d’avorter son projet d’achat au moment de payer”, regrette Bertrand Pineau, expert en nouvelles technologies à la Fevad. Certains e-commerçants qui ont adopté 3D-Secure auraient vu leur chiffre d’affaires reculer à cause d’un taux d’échec de 20 %. Le dispositif a donc évolué : “Il peut être programmé pour se déclencher dans certains cas de figure définis”, explique l’expert, soit à partir d’un certain montant ou si le client n’est pas connu du site… Celui-ci estime que le système va gagner en importance au point d’atteindre une pénétration moyenne “significative”, supérieure à 15 % des achats. De surcroît, la globalisation du débat à l’échelle européenne ne pourra que donner plus de crédit et de force à ce combat. Les choses devraient donc évoluer rapidement si on analyse les premiers retours.
NB : Pour consulter les tableaux, cliquer ici.
Gredy Raffin
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ZOOM - Internet doit définir ses limites
Peut-on encore réguler la vente sur Internet après Pierre Fabre ? La question se pose à l’heure où la distribution physique se heurte à la concurrence du Web. Dans son arrêt Pierre Fabre, la Cour de Justice européenne a dit pour droit qu’une interdiction de vente sur Internet dans un contrat de distribution sélective constitue une restriction “par objet” contraire à l’article 101,1 TFUE, sauf justification objective tenant à la propriété du produit. En clair, si l’exemption par catégorie ne saurait être appliquée, il faudra s’en remettre à l’exemption individuelle. En attendant les résultats d’une étude sectorielle commandée pour juin prochain par l’autorité française de la concurrence, et les décisions qui en découleront, l’environnement juridique demeure contraignant. Quelques spéculations vont néanmoins bon train sur les évolutions envisagées et toutes tendent à imposer des obligations aux acteurs de la Toile. Au-delà des standards de qualité, il pourrait être réclamé aux pure players Internet d’ouvrir des magasins avec pignon sur rue et d’y réaliser une part minimum de leur chiffre d’affaires. Une dernière mesure qui constitue une restriction caractérisée, avertit la Commission, tout comme l’idée de faire payer un prix plus élevé des produits destinés à être commercialisés sur Internet. Enfin, l’autre piste contestée serait celle qui donnerait droit au fournisseur d’interdire au distributeur d’inclure une plateforme tierce dans la chaîne de valeur. Cela pourrait sonner la fin des places de marché. A suivre.
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