Un potentiel devenu n°1 en Europe
Vous en avez marre des bouchons parisiens ! Je vous conseille de passer quelques jours à Moscou et à votre retour la circulation dans la capitale française vous apparaîtra tellement fluide. Comme dans un village de province ! Toutefois, ces bouchons sans fin ont au moins l'avantage de nous faire découvrir un parc roulant hallucinant. Sans doute le plus hétéroclite du monde. L'ensemble de la production de la planète s'y croise. En effet, Cayenne, F430 ou ML patientent aux côtés d'un Escalade, d'une March conduite à droite (version japonaise de notre Nissan Micra) ou d'une Lada sans âge. Mais tout change, les Lada vont bientôt faire peau neuve et les bouchons vont sans doute encore grossir vu les chiffres de croissance du marché. Certes Moscou n'est pas représentative de l'ensemble de la fédération mais elle en donne le pouls. Il y a cinq ans, en 2003, seulement 1,059 million de véhicules avaient été immatriculés. Enchaînant les années de croissance à deux chiffres, souvent au-delà de 20 %, le marché russe totalisait déjà 1,882 million en 2006. Puis les choses se sont encore accélérées en 2007 avec une croissance de 36 %. La barre des 2,5 millions est franchie. En sera-t-il de même en 2008 ? Ce sera même mieux ! Le total attendu devrait dépasser 3,4 millions, soit une nouvelle croissance proche de 35 %. La Russie sera alors le premier marché d'Europe devant l'Allemagne. C'est d'ailleurs déjà le cas, si l'on se réfère aux chiffres du premier semestre. Il est toutefois normal de se demander si cette folle croissance va durer ?
La Russie est devenue le premier marché européen devant l'Allemagne
Sauf catastrophe, la Russie est encore appelée à connaître une large croissance et l'automobile avec elle. Un simple indicateur fait rêver tous les fabricants : le nombre de véhicules pour 1 000 habitants. Aujourd'hui, ce chiffre est proche de 200 pour 1 000 et tous pensent qu'atteindre le niveau Européen, qui est proche de 500 pour 1 000 (563 en Allemagne, 558 en Italie, 515 en Angleterre, 500 en France et 456 en Espagne), n'est plus une utopie. La condition sine qua non étant que la classe moyenne continue à se développer. Le potentiel est donc énorme et l'on comprend un peu mieux la vague d'implantation de nouvelles usines sur le territoire de la fédération : Toyota, Renault, Nissan, Volkswagen, Hyundai-Kia, Suzuki, GM, Ford, PSA, Mitsubishi, Fiat, BMW, Volvo, Daimler… il ne manque quasiment personne ! (voir JA N°1051 du 27/06/08 p35). Alors que la majorité de ces usines ne produisent pas encore (le gros des ouvertures se concentre sur 2009 et 2010), la part des véhicules étrangers importés est passée de 75 à 62 % entre 2006 et 2007. La production ou l'assemblage sur place (les pièces détachées importées étant taxées au maximum de 5 %) permet d'éviter une lourde taxe à la cylindrée et à la puissance, qui représente un surcoût de 25 % au minimum. La solution idéale étant de fabriquer et de s'approvisionner sur place (les équipementiers suivent) et pour l'heure, Renault semble être l'un des plus performants en la matière. En effet, la Logan produite à Moscou a un taux d'intégration de l'ordre de 40 % si l'on considère le volume des pièces et de + de 50 % si l'on considère la valeur de ces pièces constituant la voiture. Cette situation devrait encore s'améliorer à l'avenir avec la modernisation de l'usine AvtoVaz de Tagliati. Mais quel que soit le cas de figure, les marques étrangères se vendent comme des petits pains. Entre 2003 et 2007, la part des marques russes est passée de 80 à 36 %. Et cette tendance s'accentue encore en 2008 : elle devrait seulement être de 28 % en fin d'année. Les marques japonaises représentent plus de 32 % des ventes de marques étrangères. Viennent ensuite celles qui ont pour origine l'Europe (23,2 %), la Corée (20,6 %) et enfin les Etats-Unis (20,4 %). Véritable serpent de mer chez nous, les constructeurs chinois sont ici une réalité. Ils détiennent même 3,2 % du marché. Il faut dire qu'ils sont bien aidés par la législation russe qui n'est pas aussi draconienne que la nôtre concernant les homologations ou les normes environnementales. En effet, la norme Euro 3 est applicable depuis le début de l'année et Euro 4 devrait l'être au plus tôt en 2010. Quant à un éventuel impact du CO2…
Un groupe de distribution a investi plus de 120 millions de dollars pour faire sortir de terre un village de concessions.
Avec la Chine et l'Inde, la Russie est un incontestable passage obligé. Si produire sur place apparaît aujourd'hui indispensable, l'ampleur du succès dépend en large partie du réseau de distribution mis en place. Sa constitution est devenue la priorité pour de nombreux constructeurs. Pour encore mieux appréhender cela, Mazda, qui ne cache pas ses ambitions, nous a ouvert les portes de sa plus grande concession dans le pays (voir page 52). Propriété d'un groupe de distribution baptisé Major, ce site est l'exemple d'une certaine démesure mais aussi et surtout de la vigueur du secteur. Major a tout simplement investi 120 millions de dollars dans un village de concessions où pas moins de 23 marques se côtoient. Ce cas est hors norme, mais l'investissement moyen d'un distributeur Mazda pour un showroom exclusif est de 8 millions de dollars avec un retour sur investissement en moins de 5 ans. Je vous laisse imaginer le nombre de millions nécessaires pour une concession cathédrale dans le centre de Moscou ou Saint-Pétersbourg. Mazda s'appuie aujourd'hui sur 41 distributeurs mais ne compte pas s'arrêter là. Le chiffre de 51 devrait être atteint d'ici décembre. Tous les constructeurs cherchent donc à séduire des partenaires. Les français en tête (Voir pages 48 à 50). En effet, Renault qui a déjà 115 points de vente dans les grands centres urbains compte se développer davantage dans les petites villes notamment grâce à l'appui de son partenaire russe AvtoVaz. Peugeot va nommer plus de 30 distributeurs d'ici la fin de l'année et Citroën vise une croissance annuelle de 10 points de vente jusqu'à ce que l'usine de Kaluga entre en production en 2011. Volkswagen quant à lui, qui compte aujourd'hui 63 distributeurs souhaite atteindre rapidement 120 représentations. D'ailleurs, d'ici la fin de cet exercice 17 nouveaux distributeurs auront rejoint le réseau de la marque allemande. De quoi tirer le meilleur parti de la production de l'usine de Kaluga qui vient de débuter (66 000 unités en 2008 et 150 000 Passat et Octavia attendues pour 2009), mais aussi des modèles dont l'importation va débuter comme le Tiguan. Même défi pour Volvo notamment qui était en 2007 la première marque premium avec 21 000 unités, devant Mercedes, Audi (15 000 unités chacune) et BMW (14 000). Ce n'est d'ailleurs un hasard si le S60, tout nouveau SUV compact, était du voyage et incontournable sur le stand de la marque suédoise.
Impossible de ne pas être présent en Russie aujourd'hui tant ses perspectives de croissance sont importantes. D'ailleurs, l'intérêt des constructeurs pour cette édition internationale du Salon de Moscou confirme que la promesse russe semble bel et bien être tenue.
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