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Constructeurs

"Une marque comme la nôtre ne peut pas avoir l’excuse de ne pas savoir traiter ses clients"

Publié le 13 octobre 2011

Par David Paques
11 min de lecture
Paul Sevin, directeur ventes et marketing Seat SA, Thibault Champenois, directeur du développement réseau Seat, Marc de Laitre, directeur de Seat France - Montée du digital, densification du maillage et amélioration de la qualité de service, Seat vient d’entrer dans un chantier qui doit révolutionner son réseau de distribution et sa relation aux clients.
Marc De Laitre

Journal de l’Automobile. Quels sont aujourd’hui les contours du réseau Seat en Europe et dans le monde ?
Thibault Champenois.
Nous sommes présents dans 76 pays, avec 1 826 points de vente dont 1 587 distributeurs et près de 3 000 réparateurs agréés, pour une moyenne de 220 ventes par concessionnaire de par le monde, mais avec de grandes différences selon les pays. Au niveau européen, nous comptons 1 670 points de vente, dont 1 454 distributeurs.

JA. Vous souhaitez aujourd’hui étoffer votre réseau. Dans quelle proportion et à quel horizon ?
TC.
De manière générale, nous avons effectivement un problème de couverture. Suivant les pays, nous souhaitons donc l’élargir de 2 à 10 %. Ce qui revient à augmenter le réseau européen d’environ 15 %.

Marc de Laitre. Côté français, nous avons actuellement 160 points de vente. L’objectif est d’en compter 45 de plus à l’horizon 2015. Mais dans les deux ans qui viennent, il faut que nous ayons couvert 60 % de ces points manquants. Dans ce cadre, la priorité est d’améliorer notre couverture dans les centres urbains. Ensuite, nous nous attacherons à couvrir des zones dont le potentiel actuel se situe entre 80 et 100 voitures. Avec nos objectifs de pénétration, ces points prendront tout leur sens puisque leur potentiel passera mécaniquement à 200 VN, voire plus.

JA. Ce développement s’appuiera-t-il sur vos partenaires actuels ?
MdL.
Nous sommes en train de préparer un plan selon deux axes. Le premier est de donner la possibilité aux partenaires en place d’étendre leurs territoires, sous forme de satellites, de points annexes. Le second consiste à observer les opportunités au sein du groupe Volkswagen. L’objectif final étant de faire en sorte que 85 % des clients potentiels soient à 20-25 minutes d’un point de services, afin d’apporter un service de qualité.

JA. Quelle est votre ambition en la matière ?
Paul Sevin.
Notre volonté est d’être, en France, dans le Top 5 de la satisfaction client. Nous y sommes déjà au niveau du produit puisque, cette année, NCBS nous a placés en 3e position, au même niveau qu’Audi et BMW et juste derrière Jaguar et Mini. Nous sommes donc le premier généraliste. C’est un acquis essentiel. C’est un objectif majeur. Dans la stratégie Seat Europe et Monde, la satisfaction client est une de nos trois priorités. C’est très important dans le choix de nos concessionnaires. Il faut que les candidats aient la capacité de représenter la marque en étant dans le Top 5 des meilleurs concessionnaires locaux.

MdL. Quant à la satisfaction du réseau lui-même, nous avons déjà progressé, mais nous ne sommes qu’à mi-chemin de notre objectif. Nous sommes aujourd’hui dans les 10 premiers. Pour aller plus loin, une marque comme la nôtre doit être différente. Et cela commence par le comportement. Je souhaite d’ailleurs mettre en place certains process à ce sujet.

PS. Seat est une marque en développement. Ce n’est déjà pas une excuse quand on a beaucoup de clients, mais une marque comme la nôtre ne peut pas se permettre de ne pas savoir traiter ses clients. Et en l’occurrence, être dans les cinq premiers à ce niveau, c’est une étape, pas une fin en soi.

JA. Comment cela va-t-il se traduire chez vos distributeurs ?
PS.
Là encore, c’est quelque chose de très simple. Nous avons fixé cinq priorités bien définies à nos concessionnaires, avec cinq programmes de formation qui leur correspondent, avec, derrière, des mesures permettant de fixer des notes à chaque distributeur. Chacun d’entre eux a une feuille de route spécifique.

JA. Quels sont précisément ces cinq points essentiels ?
TC.
Proposition d’essai à chaque client, respect du processus de livraison, relance téléphonique après livraison, réduction des retours sur réparation, satisfaction de la relation au vendeur. C’est un objectif européen, avec des rapports de satisfaction mensuels pour les concessionnaires, des alertes, des programmes de formation Online. Ce qui correspond bien à notre philosophie de faire en sorte que la franchise Seat soit peu coûteuse. C’est une des grandes priorités 2011/ 2012.

JA. Le respect de ces standards a-t-il une incidence sur la rémunération des distributeurs ?
PS.
Je ne conçois pas qu’un concessionnaire dont le métier est de satisfaire les clients ne soit pas en ligne avec cela. S’il n’y arrive pas parce qu’il a des difficultés à tout mettre en œuvre, nous allons l’aider à le faire. S’il ne veut pas progresser, c’est autre chose. Mais côté incentive, oui, il y aura naturellement de l’argent en jeu.

MdL. Sur la France, nous avons ajouté un sixième point. Nous sommes, en effet, assez exigeants avec nos concessionnaires sur la mobilité des clients à l’après-vente. Nous avons donc mis à disposition un programme de véhicule de courtoisie très efficace, dans lequel les concessionnaires s’engagent à avoir des véhicules de moins de six mois, non seulement pour rendre la mobilité au client, mais aussi pour faire essayer nos véhicules sans que cela ne nous coûte bien cher.

JA. Et tout le monde adhère vraiment ?
MdL.
Au niveau de l’incentive, notre logique est très simple. Nous nous positionnons comme des commerçants et comme des gens de bon sens. Nous ne demandons pas d’investissements forts, simplement nous mettons à disposition des vendeurs et des concessionnaires des programmes de formation très pragmatiques que même nos propres équipes de vente suivent. Quand on explique au concessionnaire que le coût est quasiment nul, que c’est très simple, que c’est utilisable tout de suite, qu’il peut en avoir le contrôle et qu’on en mesure les effets… Généralement, nous n’avons aucun problème à le convaincre.

JA. Tendre vers plus de qualité implique bien souvent un changement des habitudes en concession. Comment mettre tout le monde dans la même ligne ?
MdL.
Nous avons mis en place le point qualité : un tableau avec des notations et des lignes correctrices. J’y tiens beaucoup. Cela paraît très simple, mais je peux vous dire que, quand vous allez en concession et que vous ouvrez ce coin qualité, vous pouvez souvent découvrir 2 cm de poussière ! Y apporter toute l’attention que cela mérite nécessite une certaine rigueur. Il faut donc être pragmatique et efficace, à un coût raisonnable pour le concessionnaire. Et quand on en parle avec conviction, les concessionnaires suivent. Après, il faut avoir des résultats. Dans notre système de rémunération, d’abord, existe un soutien pour la formation -avec une partie réservée à la formation dans le système de marge-, puis un système de rémunération pour les meilleurs d’entre eux au travers de marges additionnelles s’ils ont un niveau de satisfaction qui est très supérieur à la moyenne. C’est la même chose à l’après-vente. Ils ont des incentives sur la qualité.

JA. Vous parliez de trois priorités dans votre stratégie. Quelles sont-elles ?
PS.
Notre plan revêt trois points clés pour la marque. La “Driving Experience”, c’est-à-dire amener un consommateur à essayer la voiture. Tout le monde le dit, mais tout le monde ne le fait pas. La “Digitale Experience” dont Seat Connected People, qui vient d’être lancé en France, est le premier pas. Et la “Dealer Experience”, dont nous avons parlé, afin d’améliorer cette satisfaction client. Allons-y étape par étape. Nous ne changerons pas tant que nous n’aurons pas rempli ces points et que tout ne sera pas parfait. Nous le faisons donc méthodiquement, avec les concessionnaires, et en y mettant les moyens pour que la franchise reste accessible. C’est notre politique.

JA. L’objectif est que Seat soit une marque peu exigeante en termes d’investissements ?
PS.
Notre philosophie est claire : simple à comprendre, simple d’accès et à coûts maîtrisés. Pourquoi ? Parce qu’il faut que les investisseurs aient envie de travailler avec nous. Nous voulons être faciles dans notre relation et “pas chers”, de sorte que le concessionnaire ne dépense que l’essentiel, clairement identifié dans le cadre de cette stratégie, de telle manière que le retour sur investissement soit rapide. Ainsi, dans chaque pays, l’objectif est de s’appuyer sur les meilleurs investisseurs et de leur donner une part significative de business pour qu’ils puissent faire de l’argent et que la franchise se développe avec eux.

JA. Il y a quelques mois, vous estimiez que vous n’accepteriez pas un concessionnaire qui gagne de l’argent sans être au niveau. Pour vous, qu’est-ce qu’un concessionnaire qui gagne de l’argent ?
PS.
C’est un distributeur dont la profitabilité dépasse 2 % de son chiffre d’affaires. Un bon concessionnaire doit faire plus de 2 %. Les moyennes ne veulent rien dire. A terme, je veux que le premier tiers de nos meilleurs distributeurs gagnent entre 2 et 4 % de leurs chiffres d’affaires. C’est tout à fait clair. Je veux que les bons entrepreneurs gagnent beaucoup d’argent parce qu’ils m’en feront gagner beaucoup. Tout le monde sera content. On n’y est pas, mais on est sur la route. En France, le premier tiers n’est pas loin de 2 %. Après, ce qui fait avancer la marque, c’est le cœur. Ce sont les 40 % du centre qui vont faire la différence et que la marque sortira du lot. Quand ces 40 % s’y mettront, là, la marque sera forte.

JA. Vous parliez il y a peu de stratégie novatrice en distinguant zones métro et non métro. Concrètement, cela veut dire quoi ?
TC.
Nous sommes clairement sous-représentés dans les grandes villes. Nous avons donc mis en place un programme de support, sous certaines conditions, à des investisseurs privés, avec différents schémas comme du leasing, etc. Nous avons identifié 60 open-points dans les 13 principales capitales européennes. D’ici fin 2011, début 2012, nous devrions couvrir 25 de ces points majeurs. L’idée étant de les couvrir tous d’ici fin 2013. A Berlin, par exemple, nous avons défini trois zones. Nous avons une succursale qui va couvrir l’une d’elles et nous venons de nommer le groupe Berolina pour une autre. A Rome, nous sommes en discussion avec deux nouveaux opérateurs différents.

MdL. A Paris, la “métro” est à l’intérieur de l’A104. Ce que nous appelons la Francilienne. A l’intérieur de cette zone, nous devons nommer 6 points. C’est en discussion.

JA. Les candidats sont-ils là ?
TC.
Nous avons mis en place ce que nous appelons des “Investors days”, au cours desquels nous recevons au siège des investisseurs potentiels. Nous leur ouvrons nos portes, leur présentons notre philosophie et notre avenir. Et cela fonctionne. Nous avons un taux de concrétisation assez important.

PS. Nous n’avons rien à cacher. Nous sommes transparents. C’est un climat très positif qui est d’une grande richesse.

JA. Cette phase de développement va-t-elle s’accompagner d’une évolution des normes de représentation ?
PS.
En Chine, où la marque s’implante actuellement, nous avons envie d’être dans la modernité. En Europe, nous allons nous adapter à notre évolution, mais ce n’est pas une priorité. Nous y travaillons, mais ce n’est pas encore l’heure. Nous sommes dans un contexte de crise et ne souhaitons pas ajouter de contraintes supplémentaires à notre réseau. Nous voulons d’abord que le client soit bien traité avant de nous assurer que le carrelage est neuf. Même s’il faut que ce soit propre.

TC. Nous avons des standards adaptables. En théorie, il y a besoin de plus de surface d’exposition, mais nous avons été soucieux de mettre en place les satellites déjà évoqués, avec des standards plus accessibles, de manière à permettre l’acquisition de parts de marché sur cette zone, à un coût moindre.

PS. Au fur et à mesure de l’élargissement de notre gamme, nous allons ensuite demander aux distributeurs d’agrandir un peu les showrooms, mais nous nous adapterons d’abord aux zones correspondantes. C’est-à-dire que dans des zones urbaines, même si la gamme s’étoffe, nous resterons dans des superficies modestes. Toujours en cohérence avec notre volonté de ne pas faire investir nos distributeurs au-delà du nécessaire.

JA. Vous parliez justement d’un concept de concessions urbaines afin d’être présents dans les grandes villes avec des coûts de fonctionnement permettant aux structures d’être rentables ? Comment va s’articuler ce concept ?
TC.
C’est-à-dire qu’en centre-ville, on ne sera pas obligé d’avoir 250 ou 300 m2 pour exposer des véhicules. Nous aurons un concept davantage orienté vers l’Urban Store, dépendant d’une concession principale qui prendra en charge les opérations d’après-vente. Nous n’avons pas encore présenté le concept à notre réseau. Nous sommes en train de le peaufiner.
 

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