Qui pour succéder à Laurent Burelle ?
LES FAVORIS :
Norbert Reithofer – BMW Group
Systématiquement nominé ces dernières années, Norbert Reithofer n’a pourtant jamais été élu, pâtissant sans doute d’un relatif manque de notoriété en France, Ian Robertson étant souvent mis sous les feux de la rampe lors des salons automobiles. Pourtant, son bilan à la tête du groupe BMW est immaculé, placé sous le signe d’une croissance significative. Mieux que cent analyses, un chiffre symbolise cette tendance : entre le 1er septembre 2006, date de son accession à la tête de BMW, et le 1er janvier 2015, le groupe est passé d’un volume annuel de ventes mondiales de moins de 1,4 million à plus de 2,2 millions d’unités ! Une progression soutenue par la diversification des gammes, mais toujours dans le strict respect d’un cartésianisme financier. De surcroît, le groupe a battu de nouveaux records de ventes en 2014, pour un total de plus de 2,2 millions de véhicules livrés. BMW et Rolls-Royce ont mené la danse, ainsi que BMW Motorrad, tandis que Mini a légèrement fléchi, mais ce repli très limité doit en fait être interprété comme une très bonne performance dans un contexte de renouvellement de gamme. Ajoutons à cela que le groupe a progressé sur tous les grands marchés mondiaux, avec un climax à deux chiffres en Asie. En outre, le lancement de la marque BMW i, sur un marché électrique encore hésitant, pour dire le moins, s’est soldé par un succès qui incite le groupe à envisager un scénario de montée en cadence de la production. Cette percée constitue une illustration, parmi bien d’autres, de la force d’innovation technologique du groupe. Une capacité d’innovation qui s’accompagne d’une véritable audace, Norbert Reithofer n’ayant pas hésité à briser les codes culturels du groupe pour adouber la double révolution de la traction à moteur transversal, appelée à devenir la norme pour les Mini et les gammes de Série 1 et 2 de BMW, via la plate-forme UKL. Le meilleur est donc encore à venir, surtout que la collaboration avec Toyota recèle des projets prometteurs. En somme, l’année 2014 a tout pour être celle de Norbert Reithofer. Surtout que le jury a conscience, même si cela relève d’un champ plus affectif, que c’est la dernière chance, entre guillemets, Norbert Reithofer ayant annoncé qu’il quitterait la direction opérationnelle de BMW Group au printemps.
Elon Musk – Tesla Motors
Le charismatique et cosmopolite entrepreneur américain, natif de Pretoria en Afrique du Sud, anime les discussions du jury depuis plusieurs années déjà, notamment l’an passé où seul Laurent Burelle l’avait battu pour quelques voix. C’est encore le cas cette année et le manager symbole de la Silicon Valley et du nouveau rêve américain, ce qui ferait presque oublier qu’il est diplômé de Stanford, continue de fasciner. “On ne peut pas rester insensible devant son profil de défricheur, de shaker d’idées”, avancent de concert deux membres du jury, avant de poursuivre : “Il parvient à aiguillonner et à stimuler les constructeurs historiquement établis et un grand patron comme Carlos Ghosn en dit même du bien. Peu importe que les produits ne soient pas révolutionnaires, les grands hommes ne sont pas toujours ceux qui inventent quelque chose, mais parfois aussi ceux qui font voir et vivre les choses différemment”. Et un autre juré d’ajouter : “Ce n’est pas un feu de paille et même si les volumes demeurent très réduits, il a le mérite de toujours exister, avec une valorisation boursière certes en baisse en 2014, mais qui reste enviée par beaucoup. De plus, son projet de gigafactory de batteries avec Panasonic est intéressant car il pourrait préfigurer une sorte d’hybridation entre constructeur et équipementier”. Pour d’autres, l’impression est plus nuancée et l’année 2014 a soulevé quelques doutes, notamment à cause du retrait total ou partiel de Daimler et Toyota dans le projet. Un membre du jury estime que l’illusion d’une révolution nous ramène aujourd’hui à la réalité d’une simple harangue, fut-elle séduisante, et que la bulle Tesla est désormais exposée au risque d’être percée. Bref, entre laudateurs et détracteurs ou simples sceptiques, les débats promettent d’être animés au deuxième tour des délibérations.
LES OUTSIDERS :
Laurens Van Den Acker – Groupe Renault
Au-delà du caractère affable et polyglotte du célèbre directeur du design aux baskets branchées, c’est naturellement le renouveau du style des modèles Renault qui est mis en exergue. Après avoir longtemps répété qu’il fallait “attendre pour voir” et “juger sur pièces”, force est de constater qu’un véritable “effet” Laurens Van Den Acker souffle aujourd’hui sur la gamme Renault. “Il a ouvert un nouveau cycle stylistique et les marques du groupe, Renault en tête, s’autorisent de nouveau à séduire. On pense notamment à Twingo ou Espace”, souligne un membre du jury. Sans gratuité, puisque le succès commercial est au rendez-vous, le Captur prenant à cet égard une dimension emblématique. En outre, le programme Alpine suscite beaucoup d’attentes.
Jacques Aschenbroich – Valeo
Comme depuis deux ans, l’administrateur et directeur général de Valeo s’invite dans les débats comme une évidence. Réorganisation du groupe, mondialisation, croissance, innovation, notamment dans le domaine névralgique de la réduction d’émissions de CO2, le tableau d’honneur affiche complet. En 2014 comme cette année, le groupe a aussi frappé les esprits par l’ampleur de sa présence au CES de Las Vegas, affirmant ainsi un sens de l’anticipation et une réelle vision de ce que sera la mobilité du futur, y compris sur le thème très médiatisé du véhicule autonome. “De surcroît, l’homme est très agréable et il a su instaurer une ambiance de travail saine dans le groupe alors que Valeo était auparavant considéré comme une “bonne école”, mais régie par un management dit de terreur”, avance un membre du jury. Peu de voix discordantes au sujet de Jacques Aschenbroich, mais l’élection de Laurent Burelle l’an passé pourrait lui faire du tort, indirectement et injustement, par crainte de la “redite”.
Arnaud Deboeuf – Programme Entry du groupe Renault
Cela devient une habitude, mais plusieurs membres du jury voudraient récompenser le succès de Dacia et de la gamme Entry de Renault en général. Il est vrai que la gamme Entry du groupe a encore fait des étincelles dans le monde en 2014, tandis que Dacia progressait fortement en Europe, tirant le meilleur parti de ses blockbusters Duster et Sandero. Cependant, quelques membres du jury pointent que l’année passée fut aussi celle des premiers échecs commerciaux de la marque, avec la confirmation que le Lodgy ne trouvait pas sa clientèle et l’errance du Dokker. Pour d’autres, l’hésitation naît du fait que le prix devrait alors revenir à Gérard Detourbet, de surcroît actuellement investi sur le projet super low-cost du groupe, le modèle A Entry qui sera commercialisé dans un premier temps en Inde.
ILS PARTENT DE PLUS LOIN :
Dieter Zetsche – Daimler
Quelques membres du jury tiennent à braquer les projecteurs sur le renouveau de Mercedes-Benz, AMG et Smart, sous l’angle des produits comme au plan de l’efficacité commerciale. L’accord conclu avec Renault a aussi porté ses premiers fruits prometteurs. A leurs yeux Dieter Zetsche n’y est naturellement pas étranger, alors même qu’il avait été mis sous pression par le board de Daimler renouvelant son mandat de trois ans seulement au lieu cinq ans initialement prévu. Mais d’autres y voient davantage un rattrapage après une série d’erreurs manifestes.
Carlos Tavares – PSA Peugeot Citroën
Plusieurs jurés signalent que le groupe a retrouvé un certain entrain après une longue période de turbulences. La main de fer de Carlos Tavares aurait des vertus de réorganisation et de prise de confiance. Le choix de faire de DS une marque à part entière est aussi souligné. Pour d’autres, il n’en reste pas moins qu’il reste surtout en mode cost-killer, que les nouveaux modèles phares des marques enregistrent des résultats mitigés et que, hormis en Chine, DS est en déshérence, obligée d’évoluer sous des budgets très contraints, un lourd handicap pour la conquête du Premium.
Sergio Marchionne – FCA Automobiles
Après le coup de force du “put” imposé à GM, la prise de contrôle de Chrysler dans une veine hold-up et une lente et difficile réorganisation d’un nouvel ensemble avec des moyens financiers limités, Sergio Marchionne a finalement bouclé le scénario qu’il avait échafaudé, en 2014, année de naissance de FCA Automobiles suivie par sa réintroduction en Bourse. Un membre du jury souligne ses bons arbitrages selon les opportunités offertes par les marchés mondiaux, en illustrant son propos par les records de Jeep. Un autre salue sa prise de pouvoir chez Ferrari, non sans une certaine inquiétude cependant. Pour d’autres jurés, son bilan demeure néanmoins contrasté à cause de la déshérence de la gamme Fiat, des incertitudes planant sur le rebond promis à Alfa Romeo, sans oublier la lente agonie de Lancia.
ILS SONT CITÉS AU MOINS UNE FOIS :
Bernard Cazeneuve, pour sa clairvoyance vis-à-vis de l’enjeu de la sécurité routière et sa qualité de modérateur face aux associations vindicativement “anti-voitures”.
Gorden Wagener, pour le renouveau enfin affirmé du design de Mercedes-Benz et AMG.
Jean Todt, pour sa gouvernance à la tête de la FIA et une orientation environnementale volontaire.
Mary Barra, pour avoir assis son autorité à la tête de GM, malgré une année mouvementée pour cause de rappels massifs et de changements de culture managériale.
Thierry Hesse, pour l’ensemble de sa carrière et pour avoir maintenu le Mondial Automobile de Paris au sommet jusqu’au terme de son dernier mandat.
Harald Wester, pour sa réussite dans le plan de relance de Maserati.
Toto Wolf, pour les succès sans bavure de Mercedes en F1.
Wolfgang Ullrich, pour l’ensemble de sa carrière et le nouveau succès d’Audi lors des 24 Heures du Mans.
Pascal Vasselon, pour le premier titre mondial de Toyota en WEC.
Sébastien Ogier, pour son nouveau titre de champion du monde en WRC, sur les traces de Sébastien… Loeb ?
Niki Lauda, premier pilote champion du monde de F1, à trois reprises, à doubler la mise en manager d’écurie, avec Mercedes Grand Prix.
Matthias Müller, pour la très forte croissance commerciale de Porsche, via des extensions de gamme abouties, d’autant qu’elles ne nuisent pas aux résultats financiers.
Rupert Stadler, pour la continuité d’Audi au plus haut niveau, tous secteurs confondus, et pour l’amorce d’une nouvelle réflexion sur le design.
Akio Toyoda, pour la régularité du groupe Toyota au sommet de l’industrie automobile mondiale, une réussite dont la perception est souvent biaisée en Europe, faute de résultats probants dans cette région.
Annette Winkler, pour le renouveau séduisant et audacieux de la gamme Smart.
Li Shufu, pour la gouvernance éclairée et orientée à long terme de Geely et de Volvo.
Waldemar Schweigert, pour la pertinence de la stratégie de “e-mobilité” de Volkswagen.
Arnaud Ribault, pour la progression de la marque DS en Chine, qui porte encore sa signature.
Chris Urmson, pour le rôle de leader d’opinion du programme Google Car. On peut lui associer Sebastian Thrun, Anthony Levandowski et Mike Montemerlo.
Maurice Ricci, pour le rayonnement d’Akka Technologies, groupe français méconnu, auprès de presque tous les principaux constructeurs.
Stefan Sommer, pour la gigantesque opération de croissance externe orchestrée par ZF.
Frédéric Mazzella, pour le succès audacieux de BlaBlaCar et sa vision de la mobilité.
Damien Biro, pour le charme de l’initiative Pariss Electric.
IL EST CITÉ EN GUISE D’HOMMAGE :
Jean-Pierre Beltoise, décédé le 5 janvier dernier, pour l’ensemble de sa carrière et sa personnalité.
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FOCUS - Les membres du Jury
- Astagneau Denis, France Inter
- Barbe Stéphane, L’Equipe
- Bazizin Luc, France 2
- Bellu Serge, free lance
- Botella Jean, Capital
- Boulanger Pascal, TF1/LCI
- Bourroux Christophe, RTL
- Calvez Laurent, France 3
- Chapatte Dominique, M6
- Chevalier Jacques, Auto-Addict
- Chevalier Mathieu, L’Auto-Journal
- David Christian, L’Express
- David Marc, free lance
- Ducamp Pauline, L’Usine Nouvelle
- Etienne Thierry, Le Figaro
- Faiche Cédric, BFM
- Feuerstein Ingrid, Les Echos
- Fréour Cédric, Les Echos
- Frost Laurence, Thomson Reuters
- Gallard Philippe, free lance
- Gay Bertrand, AutostratInternational
- Genet Jean-Pierre, L’Argus
- Genet Philippe, La Revue du Vin de France
- Guillaume Gilles, Thomson Reuters
- Jagu-Roche Jean-Pierre, Auto Infos
- Jouany Félicien, free lance
- Lagarde Jean-Pierre, free lance
- Le Bailly Rémi, Investir
- Lefevre Jean-Christophe, free lance
- Macchia Jean-Rémy, France Info
- Meunier Stéphane, L’Automobile Magazine
- Normand Jean-Michel, Le Monde/Le Monde 2
- Pennec Pascal, Auto Plus
- Péretié Olivier, L’Obs
- Queméner Tangi, AFP
- Robert Lionel, Auto Moto
- Roubaudi Renaud, free lance
- Roy Frédéric, CB News
- Roy Jean-Luc, Motors TV
- Verdevoye Alain-Gabriel, Challenges
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