"L’extension de la gamme passe d’abord par le CX-5"
Journal de l’Automobile. Après une chute de 13,5 % de vos ventes l’an dernier, à 182 684 VN en Europe de l’Ouest, l’érosion de vos performances se poursuit cette année avec des résultats en retrait de 23 % à fin juin, à 79 323 VN. Comment l’expliquez-vous ?
MARTIN BENDERS. Il y a plusieurs raisons. Si nous regardons marché par marché, il y a eu un déclin dramatique des ventes à particuliers sur les trois premiers mois, qui a selon les pays été compensé par le canal des entreprises. Mazda étant concentrée sur les ventes à particuliers et nos ventes flottes étant restées marginales durant cette période, nous avons donc vu notre business et nos parts de marché se réduire. L’autre raison qui peut expliquer cette tendance est que nous sommes à la fin d’un cycle produit commencé il y a cinq ans. Notamment sur nos produits clés, comme Mazda 2 et Mazda 3.
JA. Dans quelle mesure l’accident de Fukushima a-t-il pénalisé vos ventes ?
MB. Ce premier trimestre délicat s’est en effet ponctué par la catastrophe de Fukushima. Si nos usines japonaises n’ont pas subi de dommages, notre production a été arrêtée au deuxième trimestre à cause des problèmes survenus chez nos fournisseurs. Elles ont dû cesser de tourner de mi-mars à fin avril et n’ont pas repris leur rythme normal tout de suite. Nous avons ainsi perdu 35 000 unités au global, dont 20 à 30 % de ces volumes sur les marchés européens. C’est donc clairement un facteur impactant. Désormais, la production est redevenue normale, grâce à de gros efforts de notre part, mais aussi de nos fournisseurs.
JA. On sait que la collaboration industrielle entre Ford et Mazda a cessé en Chine et aux Etats-Unis, et continue de se réduire ailleurs. Comment la marque va-t-elle adapter son outil de production ?
MB. Nous conservons tout de même deux usines en Chine par le biais de deux joint-ventures. L’une avec FIW, pour les Mazda 6 et CX7, l’autre avec Changan pour les Mazda 2 et 3, ces accords concernant une production spécifique pour le marché chinois. Nous avons une usine en Thaïlande qui fabrique la Mazda 2 et notre pick-up PT50, dans le but de renforcer notre présence générale en Asie. Pour le reste, nous avons annoncé un investissement important dans la construction d’une usine au Mexique pour l’assemblage de Mazda 2 et 3, qui doit nous permettre d’augmenter nos ventes en Amérique du Sud, notamment au Brésil, en Argentine et bien entendu, au Mexique.
JA. Entre les problèmes récents et le jeu des taux de change, certains modèles ne risquent-ils pas d’être sévèrement contingentés sur les marchés européens ?
MB. Il est vrai que tous les constructeurs ou équipementiers japonais doivent trouver des solutions de production extérieure, à cause du yen fort. Mais, aujourd’hui, notre outil est calibré. Si besoin urgent, nous pouvons optimiser notre production. Par exemple, si nous estimons que le futur site mexicain peut produire pour l’Europe, nous le ferons. Mais ce n’est pas sa raison d’être.
JA. Dans le détail, quelles sont vos principales satisfactions en termes de performances marché ?
MB. En Russie, nous nous portons bien. Nous surperformons par rapport au marché. A fin juin, nous y enregistrons une croissance de 80 % sur un marché à + 54 %. Nos volumes et nos parts de marché grossissent en conséquence. Cela reste le pays dans lequel nous avons le plus de potentiel à exploiter. L’Autriche reste importante pour nous et représente 65 % de notre business en Europe.
JA. En termes de produits, quels sont les modèles dans le trend et ceux qui ne le sont pas ?
MB. Nous avons souffert sur la Mazda 2 car le segment B, déjà très concurrentiel, n’a pas évolué comme nous le pensions. Nous devons donc compenser cette perte de volume avec les autres modèles, comme le CX-7, pour aider les distributeurs à maintenir leur profitabilité, même si le segment en question n’est pas assez important pour compenser réellement le manque à gagner.
JA. Pensez-vous encore que, comme le disait Jeff Guyton à Genève, Mazda a les moyens de revenir à un volume de 300 000 unités par an dans les cinq ans ?
MB. D’ici 2015, nous aurons un nouveau cycle produit, avec de nouvelles plateformes à travers la gamme. Nos nouveaux produits vont offrir des taux d’émissions record et des économies d’énergie importantes sans toucher aux performances routières ni amoindrir le plaisir de conduite. Notre offre devrait donc être compétitive sur les marchés européens. Le CX-5 que nous dévoilons aujourd’hui introduit cette nouvelle génération de produits qui devrait améliorer l’ensemble et faire retrouver la croissance à la marque. C’est donc une vision toujours valide.
JA. Parfois, les distributeurs appellent de leurs vœux une proposition de la marque sur le segment A. Etes-vous d’accord avec eux ?
MB. Nous n’irons probablement pas sur ce segment. Nous fabriquons des produits globaux. Nous avons donc nécessairement besoin qu’un produit atteigne une masse critique pour être rentable. Or, les petits véhicules de ce type sont très importants en Europe, mais quasiment inexistants en Amérique. Quant au Japon, nous y avons un joint-venture avec Suzuki pour nous apporter les produits que nous n’avons pas. L’extension de la gamme passe d’abord par le CX-5. C’est un véhicule au centre du marché des SUV compact. Un segment qui, de mon point de vue, continue de grandir partout dans le monde. Il représente environ un million de voitures en Europe de l’Ouest. Et je pense qu’il peut aller plus loin.
JA. Il y a quatre ans, Mazda vendait 14 000 véhicules en France. Depuis, les ventes reculent chaque année. A fin août, elles ont encore subi un repli de 40 % (4 119 VN). Y a-t-il un problème spécifique au marché français ?
MB. Là encore, il y a plusieurs raisons à cela. D’abord, le système de taxes ne nous aide pas vraiment. Ensuite, nous n’avons pas participé à la course aux remises sur les petits véhicules. Ce qui fait que nous ne pouvions pas être très compétitifs. Et puis, il y a également eu une restructuration interne. Nous avons un tout nouveau directeur général depuis quelques jours, qui a pour mission de reconstruire notre commerce en France en s’appuyant, dès l’année prochaine, sur notre nouveau plan produit.
JA. Quel est précisément la feuille de route de Philippe Geffroy, votre nouveau directeur général ?
MB. Il a un plan en trois parties. D’abord, il doit s’adresser à notre réseau de distributeurs pour trouver les bons partenaires qui accompagneront notre croissance étape par étape. Nous avons encore des concessionnaires loyaux et performants. Nous devons reconstruire à partir de ceux-là. Le deuxième axe est de s’entourer d’une équipe qui partage notre vision et notre stratégie. Et enfin, il s’agit de choisir les bons modèles pour avoir le portefeuille le mieux adapté, entre ce que nous avons et ce qui va arriver, pour retrouver la croissance en France.
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