Citroën se réinvente
...du tournant que souhaitait prendre la marque, Citroën a enfin levé le voile sur sa nouvelle stratégie. Les 4 et 5 février derniers, le constructeur a ainsi présenté ses intentions au réseau, puis au public, paré de sa toute nouvelle identité. Nouveau logo, nouvelle signature, lifting des structures de représentation et modernisation des process et métiers, Citroën a résolument changé de cap. Visuellement d'abord. Après 25 années passées dans leur carré rouge, les chevrons s'affranchissent de leur cadre géométrique. Les voici libres, mais surtout plus consistants, plus dynamiques. Une nécessité, selon le constructeur. "L'image de la marque passe après celle de nos produits. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, nos clients achètent d'abord un C4 ou une C5 avant d'acheter une Citroën. Pire, dans certains pays, la marque est un frein à l'achat", estime Xavier Chardon, directeur marketing et communication de Citroën. "Nous faisons donc le choix de ne pas subir et de repartir en conquête", ajoute-t-il. La marque aux chevrons puise donc dans le passé pour se construire un avenir et revient ainsi aux fondamentaux de son histoire. Mieux, Citroën veut "se réinventer" et retrouver les valeurs qui avaient fait de ses produits des voitures d'ingénieurs, parfois trop en avance. Cet "ADN", Citroën le reprend donc dans sa nouvelle signature "Créative technologie". Pas suffisant, cela dit, pour remplir les objectifs du constructeur. Ces évolutions de façade sont donc surtout le reflet d'une vraie stratégie trouvant son écho dans le plan produit et dans la relation que la marque entretient avec ses clients.
Deux gammes et un retour
"Citroën a aujourd'hui la gamme la plus large de son histoire. Pourtant, nous allons accélérer le rythme de notre évolution", annonce Vincent Besson, directeur produits et marchés de Citroën. Dans les trois ans à venir, en effet, le constructeur va lancer six modèles entièrement nouveaux avec une stratégie produit à double étage. "D'une part, nous allons poursuivre le renouvellement de notre gamme majeure, pour les clients qui souhaitent évoluer sans bouleversement ou pour qui l'automobile répond à une simple logique de satisfaction des besoins fondamentaux de mobilité. Mais il est clair qu'une partie des clients voudront des changements plus profonds. Nous allons donc d'autre part lancer une gamme complémentaire", détaille Vincent Besson. Une gamme à part, en rupture, tant au niveau du design qu'au niveau de la technologie. Et pour ce faire, Citroën ressuscite la DS. Le nom, uniquement. Pas la voiture. Quoique les véhicules qui porteront cette appellation reprendront les gènes de la mythique Citroën. Bien sûr, C5 ou C6 resteront des véhicules haut de gamme. Mais ils reprendront des codes automobiles conventionnels. La gamme DS, elle, sera vraisemblablement en marge, privilégiant le plaisir automobile, "tout en restant pragmatique", prévient pour autant Vincent Besson. "Car les clients ne seront plus prêts à surpayer les produits des spécialistes", poursuit-il. "Du statut, des sensations, du raffinement" qui vont donc naître sous les traits de trois produits à venir sur les segments B, M1 et M2 à partir de 2010 et dont les noms, DS3, DS4 et DS5 devront rendre compte "d'une vision optimiste et réaliste de l'automobile".
Un gros chantier pour le réseau
"A mon sens, le plus grand changement visible sera au niveau du réseau de distribution", estime Xavier Chardon. Intérieur ou extérieur, les sites de distribution et de réparation agréés Citroën vont être en effet entièrement revisités. Nouvelle signalétique, nouvel accueil après-vente, nouveau label VO (Citroën Select), nouvelle façon d'accueillir les entreprises (Citroën Business), chaque activité de la concession subit aujourd'hui un lifting complet qui doit "témoigner de la volonté de Citroën de devenir leader en termes de relation et de satisfaction client", nous dit-on. Le constructeur entend donc voir ses 8 000 points de vente passer à sa nouvelle image dans les cinq ans à venir. Côté français, c'est dans les deux années qui viennent que l'intégralité des opérateurs devront s'y conformer. Les distributeurs devraient débourser en moyenne près de 150 000 euros. Quant aux agents, l'investissement devrait être inférieur à 50 000 euros. "Je sais qu'il n'est pas facile de trouver du cash en ce moment, mais il faut comparer les investissements aux enjeux. Je ne suis donc pas inquiet. Nous avons d'ailleurs présenté tout cela à nos distributeurs. L'adhésion du réseau a été totale", assure Vincent Besson. Mais pour remplir ce nouvel objectif de satisfaction client, cet investissement conséquent sera accompagné d'un double déploiement. Celui de ce que la marque nomme les "Incontournables" du métier, mais aussi l'adoption du lean management.
Du "lean" à tous les étages
A la manière de la politique mise en place dans le réseau Renault pour la sortie de la Laguna 3 en septembre 2007, avec notamment les 20 fondamentaux du métier, Citroën fait à son tour une piqûre de rappel à ses collaborateurs. Ce sont ainsi 9 incontournables de la vente (comme proposer des essais à chaque client) et 9 autres de l'après-vente, qui devraient être prochainement rappelés aux opérateurs de la marque. Une démarche qui vient en complément d'une politique de fluidification des pratiques. Le constructeur désire en effet appliquer au réseau les méthodes de lean management qui ont fait leurs preuves dans l'outil industriel de Citroën. "Tout est basé sur l'analyse des flux. L'objectif est de tout organiser de manière à rendre fluide chacune des actions", explique Gérald Ponce, responsable du lean management de Citroën. Dans 13 pays, une cinquantaine de concessionnaires sont actuellement en train de chercher quelles sont les bonnes pratiques à adopter. "Nous travaillons avec les partenaires pour identifier les gaspillages et lisser les comportements. Nous tentons de trouver quels sont les leviers sur lesquels nous pouvons jouer avant d'établir un plan d'action concret. Dès que nous aurons des résultats probants, nous les généraliserons", détaille Gérald Ponce. En France, cinq sites pilotes participent actuellement à cette phase de tests (Rouen, Versailles, Evreux, Rennes et Orléans). Les premières prérogatives de lean management adaptées au réseau devraient donc être distillées dans les affaires entre 2009 et 2010. Concessions et agences auront alors un visage résolument différent, prêts à accueillir les deux gammes coiffées des chevrons et de réinventer à leur tour, l'histoire que Citroën entretient avec sa clientèle… voire celle des autres !
3 QUESTIONS A
Vincent Besson, directeur produits et marchés de Citroën. "Les trois véhicules seront produits en France" Journal de l'Automobile. Comment se "réinventer" sans renier son identité ? Vincent Besson. La marque a beaucoup bougé depuis 10 ans. Le logo, lui, n'avait pas bougé depuis 25 ans. Il y a un décalage entre nos modèles et la réalité de notre identité. Il fallait mettre tout ça au niveau des ambitions que nous avons pour les 10 à 15 années qui viennent. Notre ambition est de faire les voitures que le client demande. L'objectif est d'avoir une offre qui couvre le maximum d'attentes. C'est la meilleure façon de répartir les risques ou les opportunités. C'est-à-dire avoir des produits attractifs dans la continuité et d'autres plus en rupture.
JA. Pourquoi avoir été recherché le sigle DS ? JA. Peut-on imaginer que certaines évolutions technologiques, comme l'hybride Diesel, seront réservées à cette gamme ? Par ailleurs, pouvez-vous nous renseigner sur la production ? |
Photo : Le concept DS Inside, ici dévoilé, préfigure le visage de la future DS3 qui doit apparaître en 2010.