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Industrie

Nuance s’engage dans la voie du regard

Publié le 18 avril 2018

Par Gredy Raffin
5 min de lecture
Il sera bientôt possible d’associer le regard et la parole au volant d’une voiture. Le spécialiste du traitement de la voix, Nuance, a confirmé son projet de nouvelle interface, entrevue à Las Vegas.

 

Son état embryonnaire ne lui avait pas assuré une couverture médiatique des plus larges au CES. Pourtant, le concept de Nuance a fait son chemin. Ce 17 avril 2018, lors de sa conférence biannuelle, qui se tenait en Italie, le spécialiste du traitement des signaux vocaux a présenté à ses clients de l’industrie automobile les avancées de ses recherches en matière d’association de la voix et du regard au volant d’un véhicule. 

 

Dans les faits, il s’agit d’un nouveau mode de communication avec le système embarqué d’info-divertissement de sorte à obtenir des informations géolocalisées sur les points d’intérêt (POI) identifiés. Cela peut être un restaurant, un hôtel, une concession automobile ou tout autre forme de commerce physique, lieu culturel ou de loisir. L’automobiliste n’a qu’à regarder le bâtiment et poser sa question pour obtenir une réponse.

 

Pour réaliser ce tour complexe, il convient de conjuguer plusieurs compétences de pointe. Avec la contribution du Centre de recherche sur l’intelligence artificielle allemand GFKI, Nuance a donc conçu une fonctionnalité qui emploie une caméra braquée sur le conducteur, le microphone de la voiture et la cartographie de précision, fournie par Here, Google Maps et GFKI. Le calculateur combine alors les données de détection de l’orientation du regard, celles du GPS et le résultat de la synthèse vocale pour aller chercher les éléments sur Internet.

 

En test en 2018 ?

 

L’expérimentation menée dans le cadre de la conférence en Italie a été réalisée sur une route définie. La base des POI était donc maîtrisée. Le véhicule de location a été équipé d’une caméra, tandis que le calculateur Drive PX2 de Nvidia, partenaire de longue date de Nuance, a été installé dans le coffre. Le conducteur a pu obtenir des horaires d’ouverture de restaurant, mais il aurait été possible de commander une réservation, en allant plus en avant dans le parcours d’utilisation.  

 

Un parcours d’utilisation, qui, en fonction du niveau d’intégration souhaité par le constructeur, laisse encore libre cours à l’imagination. Nuance pourrait notamment recouper les informations avec un historique. Ainsi, le conducteur pourrait demander : "Quand suis-je venu dans ce restaurant pour la dernière fois ?". Au sortir d’une visite, le système pourrait également s’enquérir de la qualité du service, dans une logique de notation des établissements. Les ingénieurs ne s’interdisent rien sur le plan technique, mais prennent soin de ne pas construire une solution trop intrusive.

 

Nuance se heurte pour le moment à une limite, celle de l’intégration réelle. Raison pour laquelle, la société américaine mène une campagne de recrutement d’un constructeur prêt à s’engager dans une démarche de preuve par l’essai (PoC). Ce sera la prochaine étape du concept que l’équipementier veut faire mûrir dès 2018, d’autant qu’il estime pouvoir en tirer un autre bénéfice, généré par l’or noir du 21e siècle, la donnée.

 

En suivant le regard des conducteurs, tout en géolocalisant le véhicule, Nuance croit, en effet, pouvoir fournir des informations critiques valorisables par les acteurs de la sécurité et du marketing. Comment ? Par la mesure à grande échelle (ou big data), le système pourra identifier, d’une part, les zones où les automobilistes sont distraits par des éléments extérieurs et, d’autre part, là où les panneaux publicitaires seront les plus efficaces sans nuire.

 

La voix et l’haptique

 

Cette innovation en devenir de Nuance pose la question du futur des interfaces à bord des automobiles. L’équipementier estime légitime de participer à la réflexion alors qu’il vient, avec Nvidia et Harman, entre autres, d’accoucher d’une toute nouvelle architecture dotée d’intelligence artificielle pour le compte de la Mercedes Classe A. Sans nul doute, la nouvelle référence en la matière sur le marché européen.

 

Ni la voix, ni le toucher, ni le regard ne s’imposeront. Nuance prêche pour une mixité des solutions. L’équipementier est conforté dans cette conviction par les analyses de Designaffairs, le cabinet d’étude à qui on doit notamment le concept futuriste de véhicule comme prolongement de la maison, Renault Symbioz.

 

Selon les études internes de Nuance, les conducteurs privilégient la combinaison de commande vocale et de surface à retour haptique. Le duo composé de la voix et du suivi de regard suit de près. La solution en triptyque ne figure qu’au troisième rang. En revanche, du point de vue des passagers, il n’y a pas débat. Les écrans tactiles s’imposent dans l’opinion (66 %), devant la voix (56 %) et les boutons physiques (31 %).

 

Plus d’humanité

 

Comment aborder alors l’intégration des assistants ? Face à ses clients venus en nombre, Nuance a confirmé son rôle de passerelle agnostique, vers la "multitude croissante" d’assistants intelligents à travers le monde. "Les consommateurs auront autant d’assistants que de variétés de besoins. Les OEM veulent garder le contrôle, mais ne sont pas les plus légitimes pour réinventer cette fonctionnalité. Nous voulons les aider à intégrer de la manière la plus fluide ce qui existe", ont défendu d’une seule voix les ingénieurs de Nuance.

 

Cela étant dit, Nuance se concentre sur l’humanisation du système. Au Drivelab, le centre de recherche européen du groupe, les programmeurs œuvrent à conférer à l’ordinateur une forme d’empathie. Au travers des intonations de la voix, du volume, du rythme ou bien même du vocabulaire, l’assistant doit capter les émotions de l’utilisateurs pour adapter sa réponse. La voix synthétique adapte le rythme du dialogue, les suggestions faites et le ton employé.

 

En 2017, il s’est immatriculé 93,5 millions de véhicules dans le monde. 51,4 millions d’entre eux ont été livrés avec une fonctionnalité associée à la voix. De ce total, Nuance tire profit, avec 45 millions d’unités à son compte.

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