Laurent Oliveras, directeur Ventes et Distribution de DuPont Performance Coatings France SAS
Journal de l'Automobile. Quelle analyse faites-vous d'un exercice 2009 qui a longtemps fait craindre le pire ?
Laurent Oliveras. Je distinguerais deux niveaux d'analyse. Sur le front de la distribution, le 1er semestre s'est révélé très difficile avec un net impact de la LME. Le second semestre fut meilleur. En ce qui concerne les carrossiers, nous nous attendions à une chute du nombre des réparations et en fait, ce ne fut pas le cas. L'activité a été constante, voire en légère progression par rapport à 2008.
JA. Dans ce contexte, quelle a été l'évolution respective de chacune de vos trois marques, étant entendu que leur positionnement diffère ?
LO. DuPont Refinish a enregistré de très bonnes performances en tirant notamment pleinement profit de l'année record réalisée par Five Star. L'autre satisfaction provient de Standox qui a dégagé un chiffre d'affaires supérieur à celui de 2008. Cela s'explique par l'activité de certains distributeurs d'envergure et par le fait que certains ont opté pour la carte mono-marque ou mono-groupe, Paban en étant sans doute l'exemple le plus emblématique. Enfin, pour Spies Hecker, le début d'année a été beaucoup plus délicat. Au final, la marque n'a pas connu d'événements majeurs réalisant un exercice correct.
JA. Le 1er trimestre de 2010 est-il venu confirmer ces différentes tendances ?
LO. Même si les volumes sont toujours orientés à la baisse et que le marché se caractérise par beaucoup d'initiatives, le contexte a changé. On retrouve un schéma plus classique avec moins d'à-coups et de surprises. Nous sommes donc en ligne avec nos objectifs selon une linéarité plus fiable. C'est aussi le cas pour Spies Hecker, d'autant que le partenariat avec Axial s'est bien remis en place, et dès le début de l'année, contrairement à 2009.
JA. Parlons de "conquête" : où peut-elle vraiment se faire aujourd'hui, surtout entre "majeurs" qui font valoir une qualité de produits très homogène ?
LO. Votre question tombe à pic car j'estime précisément qu'il est dommageable qu'on ne parle plus des technologies comme d'un argument commercial. Il existe des différences entre les produits et les outils de colorimétrie sur le marché. Il y a aussi des différences de méthodes. Chacune a ses avantages et ses inconvénients et on peut donc jouer sur cet argument. Au sein du groupe, cela fait partie de notre stratégie de conquête et nous incitons la distribution à bien faire valoir les avantages spécifiques de nos différentes marques.
JA. La distribution cristallise justement les débats et les tensions : quelle est votre position à cet égard ?
LO. Nous avons une stratégie de mise sur le marché très pérenne depuis une dizaine d'années et nous nous appuyons clairement sur la distribution. Que la stratégie des apporteurs d'affaires évolue fortement et dans des directions diverses est indéniable, surtout depuis 2008. Nous devons donc le prendre en compte. Nous l'avons d'ailleurs déjà fait en créant par exemple l'unité FLI pour Fleet-Lease-Insurance. Le point de vue du groupe est que la distribution doit apporter des services, notamment sur le management d'atelier, pour l'accueil, la gestion des flux, etc. Simultanément et en toute cohérence, nous nous attachons à développer nos réseaux, Five Star et Repanet. A l'avenir, peut-être devrons-nous composer avec d'autres réseaux, afin d'apporter des solutions plus complètes aux donneurs d'ordre, mais c'est encore à long terme dans l'état actuel des choses.
JA. Sur cette base, qu'attendez-vous des groupements, notamment Starexcel et Egide avec lesquels vous avez récemment conclu des accords ?
LO. Toujours dans une optique de développement des compétences et du business, notre attente se focalise sur la construction de réels partenariats pour normaliser et standardiser la qualité de distribution, aujourd'hui encore très et trop hétérogène. Il faut aussi s'adapter aux nouveaux types de négociations du marché. Un premier cap
a été passé avec la mise en place de commerciaux dédiés à la peinture, mais un second cap reste à franchir, à savoir le déploiement d'équipes adaptées aux différents clients, carrossiers indépendants, après-vente constructeurs, etc. Ce ne sont pas les mêmes profils d'acheteurs.
JA. Qui va assumer le coût de ces évolutions ?
LO. Nous sommes des fabricants de peinture. Notre rôle consiste à développer des produits et solutions de qualité, à assurer leur livraison et à proposer des services associés.
JA. Vous évoquiez à l'instant Repanet : ce club devenu réseau parvient-il enfin à prendre de l'importance ?
LO. Il a fallu convaincre de l'intérêt de ce réseau pour Standox, notamment les distributeurs qui n'avaient pas forcément une expertise réseau. Au sein du groupe, nous l'avons, avec Five Star. Cela a pris du temps, plus de temps que prévu admettons-le. Mais aujourd'hui, nous sommes en ordre de bataille et une stratégie de montée en puissance est programmée pour 2010 et 2011.
JA. La professionnalisation de la distribution et des réparateurs est mise en avant depuis des années, mais dans les faits, où en est-on ?
LO. De gros progrès ont été accomplis depuis dix ans. Même si les carrossiers structurés et performants, ceux qui ont intégré des process industriels à l'échelle de l'atelier, restent minoritaires par rapport aux petits artisans, ce qui n'a rien de péjoratif, ils gagnent du terrain en volume et concentrent de plus en plus de business. A nous de les accompagner et de choisir les bons partenaires. Sachant que dans dix ans, il y aura plus de "productivistes" que d'artisans traditionnels. Par ailleurs, au niveau de la distribution, la consolidation est en cours et les groupements vont avoir un rôle très important dans les années qui s'annoncent. De taille locale, on passera à taille régionale avec une organisation plus keynésienne, articulée en départements et spécialisations. D'ici cinq ans, la professionnalisation sera effective et certains groupements auront beaucoup de poids. Là encore, à nous de faire les bons choix, sans oublier, en parallèle, de considérer les nouvelles demandes des grands influenceurs. Car tout est lié, bien entendu.
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