Tout va plus vite sur le Net
...Les professionnels les rejoignent également pour accélérer leurs ventes de voitures, essentiellement des VO, et y puiser des informations sur la valeur du marché. Analyse.
Le Net a-t-il résisté à la crise ? La réponse semble plutôt positive. De récentes études menées par TNS Sofres ont révélé une tendance des consommateurs à s'orienter de plus en plus vers Internet et l'achat en ligne, soulignant notamment que "la mesure de l'attractivité des sites e-marchands et de la fidélité de leurs clients est stratégique". Une autre étude menée par Brandallay et Benchmark Group auprès d'un panel de 36 982 personnes (par questionnaire), et intitulée "Internet face à la crise", abonde en ce sens. Ainsi, pour 71 % des répondants, Internet apparaît comme une bonne alternative à la crise dans la période d'incertitude actuelle. D'ailleurs, 59,5 % d'entre eux privilégient ce mode d'achat. En revanche, pour ceux plus importants tels que l'automobile, près de 30 % des internautes ont reporté leurs investissements. Sur ce point-là, Internet n'a pas fait exception et les effets devraient s'en ressentir notamment sur l'exercice 2009. Sur les six derniers mois de l'année 2008, le secteur automobile a affiché une pénétration de 5 %, soit une progression significative de 2 points par rapport à la même période en 2007.
3 Questions à :Marc Lollivier délégué général de la FEVAD (fédération du e-commerce et de la vente à distance). Journal de l'Automobile. Comment le e-commerce traverse-t-il la crise ? Marc Lollivier. Les ventes en ligne ont progressé de 29 % en 2008. Nous avons assisté à un très bon premier semestre, un tassement à la rentrée de septembre suivi d'un très bon dernier trimestre. Cette croissance a été tirée par la demande puisque le nombre de nouveaux acheteurs a progressé de 13 %. Cette dynamique est également perceptible au niveau de l'offre puisque nous totalisons plus de 48 500 sites marchands actifs, soit une hausse de 30 % par rapport à 2007. Nous ne pouvons pas, cependant, affirmer que le e-commerce est épargné pas la crise car il s'intègre dans un contexte global. Preuve en est, le montant moyen des transactions a diminué, passant de 94 euros à 87 euros au quatrième semestre. Cette baisse du prix moyen a toutefois été compensée par la hausse des volumes. Nous pensons que la croissance va se poursuivre car la marge de progression du e-commerce en France est importante. Nous sommes confiants mais restons prudents.
JA. Quel regard portez-vous sur l'évolution du secteur automobile sur le Net ?
MO. Le secteur automobile a représenté en 2008 une pénétration de 5 %, soit 1,1 million d'internautes qui ont acheté un véhicule via le Net. Lorsque l'on sait que la pénétration du secteur de l'alimentation pèse entre 10 et 11 %, on s'aperçoit que l'automobile sur Internet commence à compter. Tout ce qui tourne autour de la voiture comme les ventes de pièces ou de pneumatiques, est également en plein développement. JA. Et son avenir ? |
Internet : accélérateur de ventes
A l'heure où les termes de "rationalisation", "économie" ou "low-cost" alimentent nombre de discussions, Internet semble effectivement répondre aux préoccupations des consommateurs, mais aussi des acteurs. En fin d'année dernière, le canal Web s'est révélé particulièrement efficace dans l'optique de réduire les stocks des distributeurs, et s'avère, d'ailleurs, toujours aussi judicieux pour accélérer les ventes de véhicules. En ce début d'année, les loueurs ont clairement intensifié leur présence sur la Toile. Entre GE Capital Solutions qui a renforcé sa plate-forme de ventes de VO à professionnels, Hertz qui a créé son site www.hertz-occasions.fr pour les particuliers ou encore ALD Automotive avec sa place de marché Carmarket, ces lancements simultanés n'avaient rien d'anodin. Le Net est clairement devenu un accélérateur de ventes. Autoscout 24 en a même fait un argument publicitaire avec le message "Boostez vos ventes de VO". Pour les professionnels de l'occasion, l'argument "gain de temps" semble même avoir pris le dessus sur le "gain d'argent". "Il est évident qu'entre le professionnel qui est sur Internet et celui qui n'y est pas, la crise n'est pas traversée de la même manière. 68 % des gens vont d'abord sur Internet pour rechercher leur VO. Si vous n'êtes pas présents sur la Toile, vous n'êtes pas dans le marché", juge Olivier Alléhaut, responsable eBay Auto Pro.
Passage obligatoire par la case Web
Avec les incertitudes qui pèsent sur le marché et le flou qui peut logiquement gagner les consommateurs devant la surenchère de remises, de promotions diverses associées aux mesures gouvernementales, Internet se révèle être un support d'information d'une rare efficacité. Ce qui est vrai pour les consommateurs l'est aussi pour les professionnels. Internet donne aujourd'hui la température du marché et semble reléguer au second plan, en termes d'indicateur, la cote argus. "Nous avons le sentiment, aujourd'hui, que le seul instrument de régulation et le seul moyen de savoir si les véhicules sont dans le bon prix ou pas, c'est Internet, rappelait Olivier Lamirault, président de la branche nationale des concessionnaires du CNPA, lors de la récente table ronde organisée par Autoscout 24 sur le thème : "Que faire pour sortir le marché des VO de la crise et booster les ventes de véhicules neufs ?" Et Olivier Lamirault d'illustrer : "Tous les distributeurs ont leur stock de VO sur le Net. Nous pouvons avoir des voitures qui n'ont pas un seul appel, vous bougez de 200 euros le prix et la voiture est vendue dans les deux heures. C'est d'ailleurs un problème qui se pose : comment ferons-nous dans le futur pour déterminer quelle est la bonne valeur résiduelle et la bonne valeur d'un VO ?"
Internet : un média prescripteur
Autres arguments qui plaident en faveur du Net : une pénétration géographique forte et des coûts réduits. Ancien responsable commercial de la société Courtis Automobiles à Fontainebleau, Stéphane Micaletto a abandonné la distribution physique de véhicules pour se consacrer au développement de son site Internet, EchangeXpress, opérationnel depuis février. "La conjoncture m'a amené sur ce support qui, à mon sens, est le plus en adéquation avec le marché. Dans la distribution automobile, les marges se réduisent. D'ailleurs, chez Courtis, nous avions subi une perte sèche de 50 % de marge. Dès lors, il faut réduire les frais fixes d'au moins 50 % pour pouvoir travailler correctement, explique Stéphane Micaletto. Par conséquent, tous les éléments sont réunis aujourd'hui pour le lancement de cet outil et la crise a été une mise en action d'EchangeXpress".
Pour autant, Internet ne remplacera pas le point de vente. Le canal est certes parfaitement ancré dans le quotidien des distributeurs, et représente des avantages considérables, mais reste encore très perfectible tant dans l'usage que dans l'approche. "On n'achète pas sur Internet, on recherche. C'est pourquoi je dis "Tout change, rien ne change". Tout change car il faut être sur Internet, rien ne change car après être allés sur Internet, les acheteurs se rendent dans le point de vente, et le professionnel fait son métier comme il a l'habitude de le faire", juge Olivier Alléhaut. "Internet est un média de prescription et d'influence dans la voiture, mais peu de prises de commandes. Notamment pour le VN qui représente un achat assez impliquant", confirme de son côté Pierre Kosciusko-Morizet, président-fondateur de PriceMinister. Et de pousser l'analyse un peu plus loin : "Je trouve le marché automobile sur le Net très particulier. Il fonctionne selon des règles assez uniques, où les constructeurs tiennent une grosse partie du marché VN et VO. Est-ce que c'est bien ou pas bien, je ne sais pas. Néanmoins, la question se pose de savoir pourquoi Internet a si peu pénétré le secteur automobile. Je pense que les constructeurs ont un peu freiné cette pénétration parce qu'ils ne savent pas nécessairement comment s'ajuster vis-à-vis de leurs succursales et de leurs réseaux de distribution".
ZOOMInternet : la France bon et mauvais élève Pierre Kosciusko-Morizet, président de PriceMinister, revient sur l'évolution un peu paradoxale d'Internet en France : "La France est très bonne sur le taux de connexion haut débit, c'est-à-dire que sur la masse des français connectés il y en a environ 95 % qui sont en haut débit. Nous sommes l'un des meilleurs pays du monde. Cela s'explique par des offres ADSL compétitives et pas très chères. Aux Etats-Unis, par exemple, ils ont historiquement des prix d'appel locaux gratuits et des connexions bas débit à des prix extrêmement compétitifs qui ont conservé une forte part de marché. Mais si nous prenons le taux de connexion des foyers, c'est-à-dire sur 100 foyers combien sont connectés, il y a des études diverses qui montrent que nous nous situons entre 55 et 60 %. Et, globalement, la plupart des études s'accordent à dire que nous avons passé la barre des 50 % en 2008. Ce n'est pas beaucoup au regard de l'Angleterre où la part est plutôt de 80 % et de l'Allemagne qui affiche 75 %. Cela se répercute ensuite dans l'usage. Le e-commerce est 2,5 fois plus important en Angleterre qu'en France et deux fois plus gros en Allemagne. D'une part, parce qu'il y a plus d'internautes dans ces pays, mais aussi parce qu'à nombre d'internautes égaux, ils sont plus actifs". |