Que du “bonus” pour assurer une vente dans les réseaux
En décembre 2007, une enquête TNS Sofres révélait que pour plus de deux automobilistes français sur trois, l'écopastille aurait un impact sur leur prochain achat. Certains d'entre eux envisageaient également un transfert sur un segment inférieur et ce, pour maximiser le bonus. Quelques mois plus tard, les chefs de vente de la plupart des marques françaises ont constaté ce changement de comportement, les incitant à adapter leur discours sur l'environnement. Un discours qui se limite plus à la fiscalité qu'à la motorisation. "Les clients ne veulent pas connaître au gramme près les émissions de CO2 de nos véhicules, ils veulent savoir s'ils auront la prime", témoigne Anne Lavest, responsable de la formation chez Peugeot. Thierry Lespiaucq directeur général de Volkswagen France estime qu'il y a une véritable "prise de conscience" mais que "face à un filtre à particules à 700 euros, il ne passera pas à l'acte d'achat." Même constat pour Luc Wise de l'agence V, interrogé dans Le Monde : "Si 90 % des Français se disent attachés à l'environnement, seul un quart est prêt à payer plus cher". Peu étonnant en ces temps de crise… Ainsi, les vendeurs sont amenés à faire du vert pragmatique. Qu'elles s'appellent Blue Lion chez Peugeot, Blue-Motion chez Volkswagen ou EfficientDynamics chez BMW, les gammes labellisées vertes par les constructeurs font l'objet d'une PLV particulière en point de vente qui vient soutenir concrètement l'argumentaire "fiscal" du vendeur.
Le design et le prix indétrônables
Ainsi, chez la plupart des constructeurs, il n'existe pas de formation entièrement dédiée à l'environnement. Dans la plupart des cas, les innovations technologiques vertes et la législation sont intégrées aux formations portant sur les produits de la marque. "ça ne veut pas dire que nous minimisons cet aspect mais nous avons tellement de chose à (leur) dire…", indique la communication de Ford. "Pendant les sessions annuelles de formation sur les nouveaux produits, nous leur parlons de l'écotaxe et de ses conséquences pour le client", explique Thierry Lespiaucq. Vincent Salimon, directeur des ventes BMW ajoute de son côté que dans les formations produits, ses formateurs donnent pour consignes aux vendeurs de "casser l'image selon laquelle une marque premium ne peut pas avoir des voitures propres, de fait, nous les incitons à s'intéresser à tout ce que nous faisons en la matière pour abaisser nos émissions de CO2." Même problème pour Jean-Luc Matussière, responsable de la formation commerciale VP pour Mercedes : "La marque n'étant pas bien placée vis-à-vis de l'écotaxe, nous avons insisté sur le bilan carbone auprès de nos vendeurs mais ça restait flou pour eux. Ils nous ont demandés de nouveaux modèles adaptés à la législation, aujourd'hui c'est chose faite avec notre gamme Blue Efficiency. Il leur a fallu réadapter leur discours et ça n'a pas été simple au début", confie-t-il. Moins de difficultés en revanche pour les constructeurs français qui profitent assez largement du bonus : Renault et Peugeot vont même jusqu'à former leurs vendeurs à l'éco-conduite qu'ils transmettront aux clients lors des essais de véhicule.
Avec l'hybride et la future commercialisation de l'électrique, les constructeurs devraient renforcer, dans les années qui viennent, leurs sessions de formation sur les produits "environnement" auprès de leurs vendeurs.
"S'adapter à la sensibilité du client"
Chez Peugeot, des documents sur l'Hymotion (motorisation hybride) sont d'ores et déjà envoyés au réseau de vente. Chez Mercedes, Jean-Luc Matussière explique qu'il y a "un travail de formation à faire sur les hybrides" or ils ont "peu de temps et de nombreuses technologies à leur présenter". L'argumentaire du vendeur ne va-t-il tourner qu'autour de l'environnement dans les années à venir ? Certainement pas pour Vincent Salimon qui rappelle que le design et le prix sont indétrônables. "Oui mais certains clients veulent afficher une image au travers de leurs choix environnementaux", assure Anne Lavest. Pour trancher le débat, elle estime que de toute façon un bon argumentaire de vente "doit s'adapter à la sensibilité du client".
ZOOM"L'écotaxe" de Land Rover A partir du 1er janvier 2009, Land Rover France lance un programme de compensation des émissions de CO2. Initiée par le Royaume-Uni en 2006, l'opération consiste à ajouter au prix du véhicule, une participation écologique, qui peut varier de 200 à 300 euros selon les émissions de CO2 des modèles. Les sommes seront ensuite reversées à l'association Climate Care, qui soutient des projets de réduction des émissions de CO2 et des gaz à effet de serre. Par ce biais, l'automobiliste pourrait compenser ses émissions sur 75 000 kilomètres, soit les trois premières années d'utilisation. Le constructeur britannique entend adopter "une attitude citoyenne" avant de "proposer des solutions hybrides" à ses clients, indique-t-on à la communication de la marque. Reste aux acteurs du réseau à insuffler une "conscience environnementale" à la clientèle, capable de la faire payer plus cher des modèles déjà "malussés". |
Photo : Selon l'agence de communication V, si 90 % des Français se disent attachés à l'environnement, seul un quart est prêt à payer plus cher.
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