Pour la liberté d’essaimage
...2005, date à laquelle tout concessionnaire opérant à l'intérieur d'un système sélectif pourrait donc ouvrir des succursales de vente où il l'entend en Europe. Il devrait simplement respecter les critères qualitatifs définis par le constructeur, comme cela se passe aujourd'hui pour les réparateurs agréés. Nous n'examinerons pas ici les sept arguments développés par le CNPA : ils n'apportent aucun élément nouveau et ont déjà été abondamment réfutés. La seule vraie question qui se pose est celle de l'utilité d'une telle bataille pour les concessionnaires, que le CNPA est censé représenter. A ce sujet, on rappellera quelques vérités premières, puis on examinera les conséquences probables d'une éventuelle victoire du CNPA, laquelle est heureusement fort improbable.
Ce qui se passe sur les marchés
Aujourd'hui, soulignons-le, les tenants de l'immobilisme ("rien n'a changé, rien ne changera") sont démentis par les faits, à quelques mois seulement de l'entrée en vigueur effective du règlement 1400/02. Ainsi, nombre de concessionnaires qui ont investi dans des structures immobilières lourdes, dans l'espoir que leurs collègues résiliés allaient disparaître sans autre forme de procès, sont-ils déçus. Ils constatent que les collègues en question, après avoir été nommés réparateurs agréés, comme c'est leur droit, continuent à vendre des V.N. de la marque, comme c'est aussi leur droit. Cette réalité frappe lourdement les marchés allemand, français, italien… Le fait que certains constructeurs soient intervenus de façon parfois illicite pour bloquer les sources d'approvisionnement, n'est pas une surprise ; mais ce n'est pas non plus un remède durable : dans six mois, le tableau aura considérablement évolué, toujours dans le sens d'un accroissement de la pression concurrentielle. Nous pourrions aussi citer l'essor du multimarquisme dans l'après-vente, qui est à son tour porteur de ventes VN multimarques, à court terme. En fait, il faut simplement considérer que l'avant garde des acteurs du marché a déjà bougé, et que d'autres s'apprêtent à le faire, indépendamment du sort qui sera réservé à la bataille du CNPA. On ne sort pas vainqueur du nouveau commerce automobile en refusant le surcroît de concurrence, notamment intra marque, qu'il implique.
En un combat douteux…
Supposons, à Dieu ne plaise, que la clause de localisation soit maintenue, que cette tentative d'enrayer la concurrence intra marque soit couronnée de succès. Les conséquences de cette victoire seront de deux ordres. Tout d'abord, comme on n'arrête le progrès qu'en se tirant une balle dans le pied, on ne manquera pas d'assister à un développement des activités commerciales à la limite de l'illicite, et parfois au-delà de cette limite. L'ex-enfant de chœur que nous sommes ne voudrait pas indiquer que, depuis quelque temps, des quasi-salons d'exposition mono ou multimarques fleurissent là où ils ne devraient pas, à ce que l'on murmure. Sacrilège ! Mais non : ce n'est qu'une anticipation ; comme toujours, le droit suivra le fait et ce qui n'est pas très légitime aujourd'hui le deviendra demain. Ceci nous conduit tout naturellement à rappeler que le règlement actuel est une simple étape dans la libéralisation du marché : celle-ci est graduelle depuis 1985, avec une forte accélération en 2002. En fonction de ce que sera le rapport d'évaluation du fonctionnement du règlement, prévu pour 2008, la commission pourra décider si un autre règlement d'exemption est souhaitable ou si, au contraire, il est temps pour le secteur automobile d'accepter les règles générales de la concurrence, qui valent pour la quasi totalité des autres biens. C'est ici que se situe le deuxième ordre de conséquences d'une victoire du CNPA. En voulant à tout prix freiner l'évolution naturelle du marché vers plus de liberté d'entreprendre et plus de concurrence, on risque fort d'imprimer une accélération involontaire à la dynamique de libéralisation, par exemple en incitant la commission européenne à opter pour la sélectivité qualitative pure, bref en appliquant à la vente les règles qui disciplinent aujourd'hui l'après-vente... et en ouvrant grandes les portes à de nouveaux entrants, sans privilégier le moins du monde les concessionnaires existants. Est-ce bien de cela que ceux-ci ont besoin ?
Ernest FerrariSur le même sujet
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