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Distribution

Au-delà du strass et des paillettes

Publié le 3 décembre 2014

Par La Rédaction
4 min de lecture
Comment sortir de la dictature du seul produit ? Comment échapper à la spirale infernale des remises ? Comment s’émanciper de la concession cathédrale ? Autant de questions qui touchent à l’avenir de la distribution automobile et auxquelles Steve Young apporte ici des éléments de réponse.
Steve Young, directeur d’ICDP.

A l’issue de ma visite au Mondial de l’Automobile, nombre de personnes m’ont demandé : “Alors, qu’est-ce que tu as vu ?”. Ces personnes attendaient clairement que je leur réponde que j’avais été enthousiasmé par le nouveau Renault Espace ou la Jaguar XKE, et soit dit en passant, j’avais été enthousiasmé, mais ma réponse spontanée et sincère fut la suivante : “du monde !”. Pour un visiteur professionnel sur le Salon, ce sont aussi ces contacts qui justifient le déplacement. Mais cette réponse a peut-être aussi du sens pour tous les professionnels investis dans la distribution et l’entretien de tous ces excitants et rutilants nouveaux modèles.

Des produits qui répondent aux besoins des clients constituent naturellement une clé du succès commercial, mais l’appréhension de ce qui est pertinent est plus large qu’on ne le pense de prime abord. Ainsi, de nombreux modèles très bien accueillis se retrouvent parfois, dans les classements de ventes, derrière des voitures n’ayant pas bénéficié du même enthousiasme critique ou du label 5 étoiles dans la presse auto. Normalement, le flot des nouveautés permet de maintenir les tarifs dans une zone haute, mais dans la pratique, on constate qu’en l’espace de quelques semaines ou de quelques mois, des remises significatives sont proposées aux clients particuliers, car les concessionnaires sont rivés sur leurs objectifs mensuels de vente et les primes afférentes. L’analyse de la rentabilité des distributeurs, en tenant compte de la diversité des marques et des marchés, laisse apparaître des différences infimes. Quelles que soient la marque distribuée et la zone de chalandise, un bon concessionnaire fera toujours mieux qu’un concessionnaire moyen. En clair, ce sont les hommes qui font vraiment la différence, pas les produits.

Ce sont les hommes, s’appuyant bien entendu sur les bons process et les bons outils, qui attirent et valorisent le client. Ce sont les hommes qui sauront développer le degré de confiance avec le client, qui fera que ce dernier dépensera un peu plus en options, ne succombera pas aux remises plus importantes d’un concessionnaire voisin, souscrira à des services ou acceptera des opérations additionnelles lors de ses entretiens. Une étude clientèle menée par ICDP dans sept marchés européens démontre que les facteurs humains sont les plus influents quand il s’agit de conclure un acte de vente en concession. Sur une échelle de 1 à 5, seuls les facteurs humains (la qualité de l’accueil, les échanges avec le vendeur, la considération…) obtiennent une note d’influence au-dessus de 4. Alors que le parcours client évolue fortement sous l’influence de l’environnement numérique, ce qui est avéré pour la vente, mais aussi pour l’après-vente désormais, il y a un réel risque de perdre la dimension humaine pour basculer dans une relation client-concessionnaire totalement mécanisée où la dépense est prédéterminée. Dans un tel univers, la seule possibilité de différenciation entre un distributeur ou un réparateur et un autre sera précisément le prix, ce qui orientera donc les prix à la baisse, c’est ce que le fondateur de PayPal et Tesla, Elon Musk, appelle, la course vers le fond, vers le vide. Si on veut éviter de s’engager dans cette voie peu engageante, il est nécessaire de s’investir plus en amont dans le process de la relation clients et d’introduire de nouveaux facteurs dans l’écosystème de la décision d’achat, au-delà du seul produit ou du seul prix.

La plupart des sites Internet des constructeurs et des concessionnaires sont passifs, offrant très peu de possibilités de s’engager dans une interaction humaine avec le vendeur. Les rares opportunités qui existent, comme les demandes d’essai ou les formulaires de prise de contact par exemple, sont limitées et se révèlent surtout peu efficaces (moins de 1 % des sondés de l’étude). En outre, elles ne créent pas de conversation directe et réelle ou de véritable dialogue en ligne. Dès lors, il faut être capable d’encourager les prospects à s’identifier pour créer un espace de dialogue et l’opportunité de découvrir les hommes derrière le site Internet. Construire une relation de cette nature, via le téléphone, le mail ou un “livechat”, nécessite des compétences que les forces de vente traditionnelles n’ont pas forcément et on ne saurait donc exclure la nécessité de mettre en place des équipes dédiées. En s’assurant bien que ces équipes seront disponibles aux heures auxquelles les clients et prospects sont le plus souvent sur Internet, c’est-à-dire le soir. Voici donc un grand challenge pour tous les distributeurs, sauf peut-être les très grands groupes. Mais il n’y a pas d’autre alternative. Ou plutôt si, l’autre alternative est d’abandonner le facteur le plus influent sur la décision d’achat et de devenir un vendeur de marchandises au prix le plus bas du marché.

Par Steve Young, directeur d’ICDP.
(traduit de l’anglais par Alexandre Guillet)
 

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