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Nouvelle dégradation

Publié le 6 février 2013

Par Alexandre Guillet
8 min de lecture
Après une baisse de 13,9 % en 2012, qu’attendre du marché 2013 ? Un nouveau repli… C’est en tout cas ce qu’anticipent de nombreux constructeurs, ainsi que notre partenaire IHS Automotive qui estime un marché VP en recul de 4,5 %. Encore une année difficile en perspective…
Renault Captur.

Un coup d’œil dans le rétro

Le scénario fut finalement pire que prévu. En effet, après une bonne année 2011, avec plus de 2,2 millions d’unités, il ne faisait aucun doute que l’exercice 2012 serait moins engageant. Cependant, en janvier 2012 (JA n° 1153), après avoir interrogé de nombreux acteurs, un consensus se dégageait autour de 2 millions de ventes. Voire 1,9 million pour les plus pessimistes. Ces derniers avaient finalement raison. Tous s’entendaient sur un mauvais premier semestre mais ils imaginaient le second bien meilleur. Le 1er trimestre, fut conforme aux attentes avec des baisses mensuelles de plus de 20 %, car les ventes de ces trois premiers mois 2012 étaient comparées à un 1er trimestre 2011 qui avait été véritablement dopé par les dernières livraisons de la prime à la casse. Ensuite, durant le deuxième trimestre, une plus faible décroissance laissait penser à la réalisation du scénario initial. Mais le contexte macroéconomique, avec la crise des dettes souveraines et de l’euro en toile de fond, puis les échéances politiques du printemps ont définitivement enterré tous les espoirs de rebond à partir de septembre. Et les difficultés des constructeurs français, notamment la violente crise qui a saisi PSA, n’étaient pas de nature à restaurer la confiance.

Des remises toujours élevées

C’est ce que relève Carlos Da Silva, analyste automobile chez IHS : “Le niveau des remises pratiquées par les constructeurs est resté à un niveau élevé. On peut citer l’exemple de PSA qui, frappé par la crise, a joué cette carte massivement, même pour la marque Peugeot et même pour un nouveau modèle comme 208. La 208 est d’ailleurs l’une des relatives déceptions de l’année, Peugeot retombant dans les travers des lancements approximatifs des années 80, puisqu’il manquait des versions et les moteurs essence au lancement. Reste à savoir si c’est la cause ou la conséquence des problèmes du groupe. Bref, même si les volumes semblent se ressaisir, on est loin du raz-de-marée attendu. A la décharge de PSA, le modèle ne sort pas dans un climat économique favorable”.

Quelques gagnants… beaucoup de perdants

Dans ce contexte, sept constructeurs ont toutefois réussi à battre leur record d’immatriculations : Audi, Chevrolet, Hyundai, Land Rover, Kia, Porsche et Skoda. A propos de Hyundai et Kia, Carlos Da Silva souligne que “le résultat des deux marques est presque surprenant en France dans la mesure où il y a trois marques domestiques qui concernent la même clientèle. Eu égard à leur notoriété et à leur part de voix, cette performance est d’autant plus remarquable. Le sponsoring de l’Euro et les offres de garantie ont sans doute beaucoup aidé à les faire entrer dans la shopping-liste de certains consommateurs. Hyundai et Kia ont vraiment les moyens de leurs ambitions, notamment la part de marché de 5 %. De plus, la plupart de leurs concurrents généralistes européens n’ont pas les moyens d’allumer des contre-feux”. Et d’ajouter sur la performance de Land Rover et du Premium en général : “Land Rover a fait des miracles grâce à l’Evoque, ce qui veut bien dire qu’un produit qui apporte quelque chose au marché et qui est attrayant reste un gage de succès, en dépit du malus. D’autant que la France reste un pays riche, avec une classe aisée non négligeable”. D’autres constructeurs, comme Toyota, Mercedes-Benz, BMW, Jeep, Lancia ou Subaru ont également amélioré leur volume, sans toutefois battre un quelconque record. Viennent ensuite ceux qui gagnent des parts de marchés grâce à un recul moins important que le marché : c’est le cas de Volkswagen, “un rouleau compresseur qui commence vraiment à faire mal en France” dixit Carlos Da Silva, Dacia, Nissan, Mini, Volvo, Honda ou Jaguar. A propos de Dacia, Carlos Da Silva glisse cette remarque : “Dacia a un peu marqué le pas, malgré le lancement de Lodgy. Le lancement de ce modèle très rationnel n’est pas un échec, mais il lui manque l’atout charme du Duster. C’est une surprise, mais cela préfigure peut-être un peu les limites du système Dacia sur les marchés matures”. Enfin, dernière catégorie, les perdants qui affichent un repli supérieur aux -13,9 % du marché. On y retrouve les trois marques françaises, Renault, Peugeot et Citroën, mais aussi Ford, Opel, Fiat, Seat, Alfa Romeo, Suzuki, Mazda, Mitsubishi ou Lexus.

Le petit millésime 2013

“En France comme en Europe, l’année 2013 sera vraisemblablement la valeur plancher du marché. Nous risquons donc de toucher le fond, surtout que notre scénario global intègre le fait que la Grèce va faire défaut. Au niveau du VP, on estime que le marché français va encore reculer de 4,5 % par rapport à 2012, malgré les lancements importants des français et l’exploitation des Clio IV, 208 ou encore Golf en année pleine”, assène Carlos Da Silva, avant de poursuivre : “Le problème de la confiance des ménages et des entreprises reste entier. Il n’y aura pas d’effet de rattrapage non plus, car le pain blanc a déjà été mangé”. En fait, on peut espérer un léger rebond en 2014, si l’Eurozone n’explose pas, bien entendu… Par ailleurs, avec le nouveau dispositif du bonus-malus, le marché devrait se recentrer sur la zone neutre. “Les grosses berlines comme les gros SUV vont souffrir. Entendons-nous bien, les constructeurs du Premium allemand ne vont pas souffrir pour autant, car les modèles qui font leurs gros volumes ont su s’adapter à la nouvelle équation du CO2. Leur gamme s’est élargie et beaucoup de modèles sont ainsi dans la zone neutre”, précise Carlos Da Silva.

Des hybrides et des VE encore confidentiels

Une nouvelle grille qui réoriente massivement les aides vers les hybrides et le véhicule électrique, sans que cela ne soit pour autant en mesure de changer les règles du jeu et de bousculer le marché. Ces motorisations resteront en effet encore confidentielles en 2013. Cependant, Carlos Da Silva estime que la situation est susceptible d’évoluer : “L’hybride va encore être porté par le bonus spécifique en 2013, mais ce sera surtout le cas sur le marché des flottes. D’autant que les motorisations hybrides rivalisent désormais avec le Diesel et qu’elles bénéficient en plus d’un effet d’image. D’ailleurs, nous parvenons sans doute, avec la période 2013-2016 et la norme Euro VI en ligne de mire, au point d’inflexion de l’hégémonie absolue du Diesel en France. Sans revenir sur les raisons historiques de cette situation, on sait que cela profitera aux petits moteurs essence, surtout pour les petites et moyennes voitures, et aux motorisations hybrides”. A ses yeux, pour le VE, la donne est différente, le principal problème restant le déploiement des infrastructures : “Même si Renault est aux avant-postes, cela demeure un point bloquant pour l’essor de ce marché. De plus, à l’échelle européenne, s’ajoute un problème d’harmonisation fiscale et des aides. Toutefois, on ne peut pas s’interdire l’hypothèse de la bonne surprise. Surtout qu’avec le “super bonus”, on constate qu’un modèle comme Zoé se retrouve au niveau, non seulement d’une Clio Diesel, mais aussi d’une Clio essence. La Zoé bénéficie d’un écosystème favorable en France, avec le jeu politique et l’Ugap notamment, et on peut donc tabler sur un volume de 7 500 unités dès 2013, surtout que le frein du design est levé”.

Les constructeurs français stoppent l’hémorragie

Au contraire des gros SUV, le petits SUV vont continuer à connaître une forte croissance. “D’une part, c’est dans l’air du temps et d’autre part, les constructeurs français investissent le segment. Ce dernier devrait donc quasiment doubler en 2013”, indique Carlos Da Silva. Par ailleurs, le Premium va poursuivre sur sa lancée, principalement porté par l’offre des segments B et C, le segment C s’annonçant notamment très florissant. En somme, malgré un environnement défavorable, le Premium pris dans son ensemble ne devrait pas subir une brutale chute de pression en 2013. Audi, avec l’A1 et surtout l’A3, devrait même encore progresser. Autre bonne nouvelle, entre guillemets, selon Carlos Da Silva, “On parvient, semble-t-il, à la fin de la descente aux enfers sur le mix et l’effet “je n’achète que du prix”, particulièrement prégnant sur le segment A par exemple, tend à s’estomper. Le mix produits-équipements redevient plus confortable pour les constructeurs et les distributeurs”. Enfin, les marques françaises devraient enfin stopper l’hémorragie. Elles devraient grosso modo parvenir à se stabiliser, grâce à leurs lancements importants et à l’exploitation de modèles phares en année pleine. Pour Renault, la nouvelle Clio IV est notamment prometteuse. “La Clio IV a enregistré des volumes importants dès son lancement, mais il convient de relativiser cette donnée à l’aune de la taille du réseau en France, qui crée un effet “volume” quasi automatique. Cependant, le modèle semble bien accueilli. On peut émettre une réserve sur le positionnement prix élevé du modèle. Ce n’est pas dans les habitudes de la marque et on va voir si elle parvient à tenir ce cap sur le long terme. Mais d’une manière générale, nous sommes optimistes pour la Clio IV en France, comme en Europe d’ailleurs”, explique Carlos Da Silva. Parallèlement, Dacia devrait aussi bénéficier d’un effet Sandero significatif, car le modèle a vraiment franchi un palier.

Pour consulter tous les tableaux des prévisions, cliquer ici.

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