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Constructeurs

Steco…Corico !

Publié le 17 juillet 2009

Par Frédéric Richard
6 min de lecture
Depuis quelques semaines, on entend parler du rachat de l'usine Exide d'Auxerre par Steco Power, le seul fabricant à produire sur le territoire national. L'occasion de revenir sur la réalité de cette transaction, et...
...d'évoquer la stratégie de développement.

Finie la morosité au sein des équipes de Steco. Deux ans après la reprise de la société par le fonds d'investissements Hélix Partners, créé par Denis Chabaneix, le fabricant français de batteries profite d'une nouvelle dynamique. Paradoxalement à une conjoncture économique globale plutôt défavorable, Steco Power fourmille de projets, et analyse ses marchés avec pragmatisme.

Tout d'abord, le fabricant est actuellement en discussions avancées pour la reprise du site d'Exide, basé à Auxerre. En effet, le concurrent américain a annoncé la fermeture prochaine de l'usine, qui emploie actuellement 300 personnes… Pour autant, l'affaire s'est compliquée ces derniers jours… car Exide, qui délocalise en Pologne, souhaite également emmener ses moyens de production, que Steco souhaitait racheter, afin de gagner du temps et du confort sur la mise en production. Resterait donc à Steco les murs de l'usine, qui sont d'ailleurs en location…

Cependant, ce contretemps n'effraie pas les équipes dirigeantes du fabricant français. Même si les machines disparaissent, l'implantation Auxerroise de Steco reste judicieuse, selon Georges Trehoux, directeur général de Steco Power, qui tient beaucoup à relancer la production locale de batteries : "Les 300 personnes qui travaillaient chez Exide connaissent le métier, savent faire des batteries. Et même si nous devons remonter une usine de toutes pièces, le projet reste viable, d'autant que le site se trouve à 150 km seulement de notre siège de Outarville (45)". 150 personnes devraient, à terme, être employées sur le nouveau site de Steco. La production sera orientée "grandes ventes", afin de laisser à Outarville la primeur sur les batteries spécifiques. De 1,2 million de batteries produites actuellement, l'équipementier compte doubler ses capacités avec l'usine d'Auxerre.

Quant aux raisons qui poussent Steco à ouvrir une nouvelle usine en France, Georges Trehoux tempère les spéculations : "La première monte, ce n'est pas exclu, mais pas à court terme. Nous devons d'abord consolider notre activité rechange".

Et pour cela, les dirigeants de Steco ont fomenté un plan stratégique ambitieux. Il part d'un constat, et même d'un pari. L'investissement polonais d'Exide semble étrange. En effet, pourquoi délocaliser dans un pays à bas coût de main-d'œuvre, pour une industrie où la main-d'œuvre recouvre justement un pourcentage, somme toute, limité ? D'autant que, s'il faut faire revenir les produits sur le marché français, avec le coût logistique du produit batterie, on perd tout le (maigre) bénéfice engendré plus haut… A cette question, Georges Trehoux apporte sa vision des choses : "Nous pensons qu'Exide ne compte pas forcément renvoyer toutes ses batteries en France. En s'installant en Pologne, l'équipementier se rapproche en fait des marchés émergents, c'est là qu'est la cohérence de son initiative".

Et du coup, c'est autant de batteries qui vont manquer au marché français, et qu'il faudra trouver ailleurs. D'autant que JCI (Varta) a aussi récemment annoncé la fermeture de l'usine de Sarreguemines. En tout, ce sont donc plus de 14 millions de batteries de déficit en production dès l'été 2009, soit deux fois les besoins de l'aftermarket français ! Une situation de pénurie se dessine, à l'horizon des prochains mois et plus particulièrement pendant la saison hivernale. Il n'y aura donc pas de batteries pour tout le monde. C'est là que Steco Power entre en jeu. Pas question de laisser les exotiques investir le marché. Le fabricant français va donc réagir, et profiter du départ de ses deux plus sérieux concurrents pour communiquer, retrouver de sa superbe chez ses clients, et rappeler les nombreux atouts dont il dispose. Objectif avoué : Devenir le leader stratégique du marché.

Forces et faiblesses

Pour parvenir au but, Denis Chabaneix, Georges Trehoux et leurs équipes d'Outarville se sont livrés à une belle introspection, en toute humilité. Une "psychothérapie" dont ils nous livrent l'analyse, pour repartir sur des bases saines.

Sans détour, Georges Trehoux, transfuge du groupe Honeywell, admet la lente dérive que Steco Power a subie depuis plusieurs années, notamment en raison des multiples changements d'actionnariats. Ainsi, aujourd'hui, l'entreprise souffre du manque de différenciation qui existe entre ses produits, de marque nationale ou de MDD. Par ailleurs, Steco a perdu il y a maintenant longtemps son produit stratégique, la fameuse batterie rose, qui apportait une vraie valeur ajoutée d'image sur la concurrence. Ajoutez à tout cela l'absence de référencements en première monte, et voilà comment Steco est entré dans une spirale descendante dont il compte bien désormais sortir. Car la société ne manque pas de dynamisme. La marque Steco peut encore s'enorgueillir d'une forte notoriété. Une renommée due à la qualité des produits, elle aussi reconnue. En termes de positionnement marché maintenant, Steco dispose d'une très forte présence en PL et en IAM, ce qui sera un atout indéniable pour asseoir sa nouvelle politique stratégique.

La stratégie 2009/2010

Steco Power ne va pas seulement jouer sur la corde sensible du désormais "seul fabricant en France". Confrontée à des compétiteurs orientés "bagarre des prix & gros volumes", qui travaillent essentiellement le 20/80 (surtout les exotiques), et abandonnent leurs clients sur le reste du marché, Steco va continuer à élargir ses gammes. De même, pour faire face à la concurrence des marques venues d'Asie à la qualité souvent douteuse, Steco réaffirme sa politique de qualité, en ouvrant récemment un centre de contrôle des batteries ultra-équipé et tout à fait unique, à Outarville. Un service qui permet aussi à l'entreprise d'effectuer des benchmarks réguliers…

Enfin, si Steco redevient leader sur son marché, Georges Trehoux crie à qui veut l'entendre qu'il jouera le rôle d'un leader. "Le marché de la batterie souffre d'une absence chronique de leader. Même si un acteur se taille près de la moitié du marché, il ne joue pas son rôle en termes de locomotive du marché. Il ne propose pas suffisamment d'innovations, de communication, d'éducation vers le grand public".

De grandes ambitions donc, fruits de longues réflexions. On peut même annoncer le retour de la batterie rose, dès le mois de mars 2010, et même de sa petite sœur, la batterie verte, entièrement recyclable. Le rachat du site d'Auxerre venant en support de cette future politique de développement de masse dans les volumes. Longue vie à Steco…Corico !

ZOOM

Les clés du marché de la batterie

Le marché français total représente 8,5 millions de batteries, un chiffre en régression de 7,6 %. Le premier équipement se taille 1,3 million de batteries, et enregistre une chute conjoncturelle de 35 %. L'aftermarket représente pour sa part 7,2 millions de batteries, un marché stable en volume, mais dont la valeur augmente, en raison de la diésélisation du parc.Début 2009, la capacité de production des usines françaises était de 16 millions de batteries pour un marché annuel de 9 millions, dont 7 millions pour l'aftermarket. Les 80/20 sont fournis par les fabricants locaux, les plates-formes, les spécialistes batteries. Ces références sont devenues des produits stratégiques, que seuls les acteurs de proximité peuvent fournir dans des conditions optimales, en raison de la largeur de gamme nécessaire et des coûts logistiques pour ce produit lourd.

Photo : Georges Trehoux, directeur général de Steco Power

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